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Armes à dispersion : toujours pareil

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Samuel Blais-bergeron

2015-04-01 11:15:00

Avocat, l’auteur revient sur l’utilisation du Muzzle Blast, l’arme qui a blessé une étudiante au visage pendant une manifestation, et qui a déjà donné lieu à plusieurs décisions...

Me Samuel Blais-Bergeron a effectué son stage auprès du bureau du Commissaire à la déontologie policière
Me Samuel Blais-Bergeron a effectué son stage auprès du bureau du Commissaire à la déontologie policière
Le 26 mars dernier, lors de la manifestation devant l’Assemblée nationale, un policier qui tenait entre les mains une arme de type Muzzle Blast 35 mm a tiré à bout portant Naomie Tremblay-Trudeau, 18 ans, la blessant sévèrement au visage.

Un Muzzle Blast est une arme de calibre « intermédiaire » qui projette un irritant chimique sous forme de poudre afin de disperser les foules. Cela provoque des picotements intenses au niveau des yeux, une sensation de brûlure au niveau des parties moites de la peau et une difficulté à respirer.

Afin d’éviter les accidents, le programme de formation des préposés aux irritants chimiques (PIC) indique que « lorsque (la poudre) est tirée sur une personne, le policier devrait viser à la hauteur de la ceinture pour éviter les blessures ». Malgré tout, cette arme a fait les manchettes à plusieurs reprises au cours des dernières années.

Dans une décision datant du 23 janvier 2004, la Cour d’appel de l’Ontario avait retenu la responsabilité civile de policiers torontois pour une utilisation du Muzzle Blast qui a causé la perte d’un oeil à une femme. Ces derniers étaient à moins de trois pieds de celle-ci.

Le 20 avril 2012, des manifestants tentaient d’entrer dans le Palais des congrès à Montréal. La vidéo prise à cette occasion montrait clairement un policier armé d’un Muzzle Blast faire feu à la hauteur de la poitrine à quatre ou cinq pieds d’un manifestant.

À la suite des événements, une plainte est déposée au bureau du Commissaire à la déontologie policière. Le Comité de déontologie policière, un tribunal spécialisé, est alors saisi du dossier. Les conclusions publiées le 11 avril 2014 sont sans équivoque et révèlent que le respect d’une distance minimale ne fait pas partie du protocole de formation.

Le comité ajoute que « l’emploi du Muzzle Blast n’est pas toujours sans risque et sans conséquence et se permet de recommander que la formation (…) soit revue pour les instruire des dangers inhérents à l’utilisation de cette arme intermédiaire et pour éliminer les sources de confusion quant aux endroits à atteindre ».

De retour en 2015, force est de constater qu’il y a toujours des lacunes dans la formation offerte aux policiers qui utilisent le Muzzle Blast. Bien que notre société se soit dotée d’un processus déontologique afin de faire des recommandations dans le but d’améliorer les interventions, nous avons la fâcheuse habitude de tabletter ces rapports et d’oublier les décisions des tribunaux. Il m’apparaît inacceptable qu’un tel niveau de risque plane au-dessus des citoyens se retrouvant dans des manifestations. J’invite par conséquent les autorités à traiter de cette situation rapidement afin de garantir le libre exercice des droits démocratiques.

Sur l’auteur :

Membre du Barreau depuis 2014, Samuel Blais-Bergeron est passionné par tout ce qui touche de près ou de loin les interventions policières. Ayant effectué son stage auprès du bureau du Commissaire à la déontologie policière, il continue sa pratique en droit criminel et pénal.

Le Commissaire à la déontologie policière a ordonné la tenue d'une enquête sur l’incident impliquant Naomie Tremblay-Trudeau et un rapport devra être remis dans 180 jours.

Par ailleurs, le policier Charles-Scott Simard, responsable du tir, est en arrêt de travail « pour des motifs personnels», a indiqué le directeur des communications du SPVQ, François Moisan.

- Avec Agence QMI

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