Une avocate superwoman lance son cabinet
Delphine Jung
2018-04-30 15:30:00
Si ce n'est pas pour s'occuper de l'un de ses dossiers en droit familial, c'est pour peindre, biberonner ou encore organiser une exposition pour un organisme communautaire.
Cette avocate de 34 ans, née à Toronto, membre du Barreau du Québec et de l’Ontario, a décidé en janvier d'ouvrir son propre cabinet, chez elle, dans sa maison cossue de Hampstead, en banlieue de Montréal.
Lorsqu’ils entrent, les clients découvrent une pièce ornée d'un grand tableau représentant une paire d'escarpins. Sur la table, un bibelot dont le design rappelle les œuvres de l'excentrique Jeff Koons et son Balloon dog. Et sur une commode, une belle collection de spiritueux.
« Je travaillais de chez moi comme avocate indépendante pour le cabinet Kalman Samuels. Alors je me suis dit « autant lancer mon affaire », dit-elle.
Un premier bac en arts visuels
Pourtant, le droit n'est pas sa première carrière. Me Spunt détient un bac en arts visuels obtenu à l'Université Western, à London en Ontario. « Durant mes études, j'ai été amenée à m'impliquer auprès des femmes abusées, dans des centres d’hébergement. Je me suis rendu compte que faire des études de droit était un bon moyen de venir en aide aux gens », explique-t-elle.
Elle est donc revenue au Québec, là où sa famille s’est installée lorsqu’elle avait cinq ans. « Je voulais vraiment apprendre à parler français et donc j'ai quitté le milieu anglophone », dit l'avocate.
Et quoi de mieux pour s'imprégner de la langue française que de s'installer à Québec. Montréal ? Bien trop bilingue pour Me Spunt !
« J'ai appris à mon rythme. C'était un vrai challenge. Je suivais par exemple des cours de yoga en français, j'apprenais le vocabulaire du quotidien », dit-elle en ajoutant que d'une certaine manière, elle a appris deux nouvelles langues : le droit et le français.
Aujourd'hui, elle est fière de pouvoir plaider dans les deux langues officielles du pays.
Entre Montréal et Toronto
Après son bac en droit obtenu à l'Université Laval et son juris doctor obtenu à l'Université d'Ottawa, Me Spunt navigue entre Montréal et Toronto.
À Montréal, elle passe par BLG puis au cabinet Goldwater Dubé. « On avait une relation particulière, Anne-France et moi. On dit toutes les deux ce qu’on pense. J’ai juste un peu plus de filtres qu’elle », lance en riant Me Spunt.
Puis elle pratique dans un cabinet torontois, Niman Gelgoot. Elle assure avoir travaillé avec « la version masculine d’Anne-France, qui était connu comme le meilleur plaideur en droit matrimonial à Toronto ».
En 2012, elle décide de s’installer définitivement à Montréal et commence à travailler comme avocate indépendante pour le cabinet Kalman Samuels.
« Pourquoi y rester alors que j’étais déjà indépendante et que je n’étais pas toujours d’accord avec leur manière de faire ? Je me sentais limitée », explique-t-elle pour justifier sa volonté de se lancer à son compte.
Et depuis peu, elle reçoit l’aide de sa stagiaire, Becky Etingin, 26 ans. Diplômée en psychologie de l’Université McGill et en droit de l’Université de Montréal, la jeune femme sera donc bientôt membre du Barreau du Québec et de New York.
Les deux juristes se sont rencontrées chez Kalman Samuels. « Nous nous sommes tout de suite bien entendues. Nous sommes également toutes les deux impliquées dans notre communauté », explique Becky.
Me Spunt est notamment impliqué au centre communautaire MADA et JEM Workshop, un atelier qui emploie des adultes handicapés pour leur donner la possibilité de travailler en fonction de leurs capacités spéciales.
L’efficacité avant tout
Becky a aussi été séduite par le style de sa mentor et comment elle a imaginé son cabinet. « Elle est très efficace et je ne pense pas que beaucoup d’avocats soient comme ça. Elle veut aboutir rapidement à un règlement pour faire gagner du temps et de l’argent au client », explique la stagiaire.
« Je suis passionnée et je sais établir de bonnes stratégies, dit Me Spunt. Notre approche, c’est de se rendre accessible, on ne veut pas passer pour des personnes intimidantes. Les gens doivent se sentir à l’aise et en confiance lorsqu’ils viennent nous voir. »
Elle peut compter sur le soutien de son mari, lui aussi avocat… chez Goldwater Dubé : « on se comprend, on sait ce que c’est que le stress quand on est avocat, ce que ça prend de préparer un procès ».
Rien ne fait vraiment peur à celle qui se présente comme une « combattante professionnelle ». Encore moins un troisième enfant. Car Me Spunt devrait accoucher dans deux semaines. Pourtant, elle ne compte pas délaisser ses dossiers trop longtemps !