Lettre d’un avocat euthanasié
Marie Pâris
2014-03-28 13:45:00
L’avocat a laissé une lettre de trois pages puissante et passionnée, «L’approche de la mort». Il y raconte ses derniers mois, durant lesquels il a interpellé le Parlement canadien pour lui demander de changer sa législation sur le suicide assisté.
Diagnostiqué l’année dernière avec la maladie de Lou Gehrig, l’avocat avait écrit : «Il est certain que la dégénerescence va progresser et que la souffrance sera de pire en pire au fil du temps. À l’heure où j’écris, j’ai perdu l’usage de mes deux mains».
«Étant donné la nature de la maladie, il me semblait naturel de choisir moi-même quand je voulais partir et cesser de souffrir», rapporte-t-il dans sa lettre. Il raconte être allé jusqu’en Israël et en Chine pour rencontrer des médecins.
«Je suis parti déçu mais je me consolais à l’idée qu’il me restait une porte de sortie. Malheureusement, cette option n’est pas possible au Canada à cause de notre législation contre le suicide assisté ; c’est une loi injuste qui nous retire notre droit premier. Moi, Canadien, je n’ai pas eu d’autre choix que d’aller en Suisse.»
Il décrit aussi les différentes étapes qu’il a du suivre pour avoir droit au suicide assisté, des démarches laborieuses, lourdes, coûteuses et frustrantes.
«Supplier pour obtenir le droit de mourir dans un autre pays»
La lettre a été distribuée par courriel lundi, le lendemain de son décès, à ses collègues et amis. Me Hung voulait qu’elle soit lue par le plus grand nombre de personnes afin d’alimenter le débat national sur le droit à mourir. Il écrit :
«J’ai eu la chance d’avoir le soutien et les ressources nécessaires pour me permettre d’approcher la mort de la façon que je voulais. Cependant, ce n’est pas le cas de tout le monde dans ce pays. (...)
À l’heure où j’écris, je satisfais finalement à toutes les conditions pour le suicide assisté, et c’est un grand soulagement. Cependant, ma fierté d’être Canadien a quelque peu diminué depuis que j’ai été forcé de supplier à genoux pour obtenir le droit de mourir dans un autre pays. Ce n’est pas juste et je ne le souhaite à aucun de mes compatriotes.
Notre Parlement devrait autoriser les Canadiens en détresse à avoir facilement accès à de l’assistance pour mourir et j’espère que cela sera bientôt possible. (...) Je vais reposer en paix, sans douleur, sans regret, et avec comme réconfort la pensée que j’ai pu approcher la mort avec un but.»
Me Hung avait quitté son poste au bureau du procureur général en 1984 pour se lancer en pratique privée. Il a également eu une émission hebdomadaire sur le droit à CHIN Radio pendant plusieurs années.
L’avocat avait notamment défendu le cas d’une femme qui avait noyé dans sa baignoire sa fille autiste, à laquelle le docteur avait appris le matin-même qu’elle aurait besoin d’assistance toute sa vie.