Cet avocat fait le tour du monde à vélo!
Céline Gobert
2016-10-21 15:00:00
Lorsqu’on parvient à l’avoir au bout du fil, le juriste de 30 ans se trouve au nord du Kirghizistan, à Bichkek et a déjà parcouru plus de 9000 kms à vélo depuis mars dernier.
« Quand tu vis selon ton salaire, tu es prisonnier de ton chèque de paie, nous explique-t-il. Tu te dis que ce serait ridicule de quitter la sécurité d’un emploi permanent. Mais la personne qui se met le plus de barrière, c’est souvent soi-même. » En plus, la vie est trop courte, dit-il… « Ma mère est décédée d’un cancer à 55 ans et j’ai commencé à réfléchir sur combien de temps on avait dans la vie, je me suis donné un an pour m’organiser, pour économiser, puis j’ai démissionné. »
98% de son entourage approuve alors son choix. « On me disait: “j’aimerais vraiment avoir ton courage, de dire non à la vie facile, t’as des couilles de faire ça! “ » Selon celui qui est aussi diplômé en génie et musicien, tout le monde est capable de le faire. « L’être humain a des forces insoupçonnées, si on se lance, si on a confiance en soi, on peut accomplir beaucoup plus qu’on ne pense! »
Le droit ne lui manque pas vraiment. Pendant son stage chez Gowling WLG il ne « trippait pas beaucoup. » « En cabinet privé, tu es le dernier en bas de la ligne, tu n’as pas l’impression de faire partie d’un projet. Quand ça va pas bien, tu patches des trous, mais tu ne bâtis pas de maisons… »
Une meilleure personne
Au total, il dépense moins de 25 $ US par jour. Cela comprend la nourriture, l’hébergement et représente environ 9500 dollars par an. Évidemment, son voyage lui coûte ce que l’on appelle en économie « the opportunity cost » c’est à dire, dans son cas, l’argent qu’il aurait fait s’il était resté dans sa job. « Mais l’expérience ne se calcule pas. Je suis déjà une meilleure personne. Face à un nouvel employeur, je peux affirmer qu’après avoir fait le tour du monde à vélo, y’a pas grand-chose qui va me stresser !! (Rires) ». Négocier avec un syndicat? Rien de plus facile après avoir eu à traiter avec les douaniers de l’Ouzbékistan!
Quand il n’est pas en train d’alimenter son blogue de photos, de vidéos et de textes qui narrent son expérience, l’avocat fait face à mille obstacles : la chaleur accablante de 50 degrés dans le désert, de multiples tempêtes de neige, des épines qui rentrent dans les pneus de son vélo, le vent qui souffle de face, les zones sans population, les frontières à franchir…
À son entrée au Kirghizistan, il a descendu pendant des dizaines de kilomètres le massif montagneux du Pamir avant de se retrouver dans une plaine entre deux chaînes de montagnes. « J’ai eu de la chance avec l’altitude. À 4000 mètres au Tadjikistan, un autre cycliste n’a pas eu cette chance et s’est retrouvé à l’hôpital avec seulement 58% d’oxygène. Faut tout le temps écouter son corps et rester en alerte. »
Parfois, des amis ou de la famille le rejoignent pour rouler à ses côtés.
Les limites sont davantage mentales que physiques selon lui. « Mon derrière est imprégné dans ma selle, 8 heures par jour. Une fois dans le désert, le vent aspirait mon eau intérieure. C’était si sec. Mais je ne suis pas quelqu’un qui abandonne facilement. » Il faut également accepter de « retourner à la base », confie-t-il : faire ses besoins dans la nature, ne pas prendre de douches… « Ça change ta façon de penser. » Au Kazakhstan, il a ainsi passé 7 jours sans prendre une seule douche. Sa plus grande distance à vélo, il l’a parcourue en Bulgarie, 137 km entre Sofia et Plovdiv, et 120 km, dans le désert en Ouzbékistan.
Des rencontres inoubliables
C’est en Autriche et au Tadjikistan que Me Roy dit avoir admiré les plus beaux paysages. Et, contre toutes attentes, il a trouvé les gens les plus accueillants… en France! « Je me suis fait inviter par plein de monde! Les Français se sont tellement fait dire qu’ils étaient chiants qu’ils en font deux fois plus pour casser cette réputation! (Rires) C’est d’ailleurs le seul pays dans lequel j’ai encore des contacts. J’ai rencontré une femme près de Dieppe, elle m’a accueilli chez elle, on s’écrit encore, elle est devenue une amie. »
Une fois, en Suisse allemande, il tombe malade. Il cogne à la porte d’une maison dans un petit village et demande à l’habitante s’il peut planter sa tente sur son terrain. Elle lui ouvre volontiers sa porte, lui prépare une soupe au poulet, ils discutent des voyages qu’elle avait fait quand elle était plus jeune. « Elle est en phase terminale d’un cancer. Elle m’a dit que ça lui avait fait du bien de me rencontrer », se souvient-il, avec émotion.
Plus il roule, plus il rencontre des personnes, souvent très pauvres, qui l’accueillent comme un roi. En Turquie, le premier jour du Ramadan, un jeune adolescent ne veut plus le laisser partir. « La famille avait invité de la famille, des voisins, je pensais que c’était pour la fête du Ramadan, mais en fait c’était pour moi! Pour échanger sur la culture. Tout le monde était là pour me parler!»
Au coeur des hautes montagnes du Pamir au Tadjikistan, un homme est obnubilé par l’une de ses photographie de montagnes verdoyantes de Géorgie. « Il me demandait tout le temps où c’était, pour lui c’était la vision du paradis...». Plus tard, il fait la rencontre de Davlat et de sa famille qui se disent honorés : il se fait en plus offrir un souper, un déjeuner et du thé à volonté!
« Tout ça d'un gars heureux qui n'a pas de toilette, pas d'eau courante et à peu près pas l'électricité », écrit-il sur son blogue. Il dit ne pas vouloir oublier, une fois de retour, la facilité du mode de vie occidentale. Garder en tête ce qu’il a compris lors de ce voyage.
Le jeune avocat en a peut-être encore pour un an et demi à pédaler. Il ne sait pas exactement, il suit ses envies... Il pourrait bien se rendre à Tokyo, en Australie, au Chili, en Birmanie, aux Philippines. Et poursuivre encore son rêve…
Une chose est évidente pour lui aujourd’hui : la réussite n’est pas proportionnelle à la somme qui figure sur un chèque de paie. Le bonheur non plus…
Pour le suivre sur sa page Facebook, c’est ici et sur son blogue, c’est par là : www.jonathanbroy.com.
Anonyme
il y a 8 ansMarry me