IA: les avocats québécois en retard
Delphine Jung
2017-06-14 11:15:00
Mais tandis que Montréal s’affiche comme la plaque tournante des nouvelles technologies, les cabinets d’avocat montréalais ont du mal à faire le grand saut. Beaucoup en sont encore à étudier les possibilités qu’offrent les logiciels intelligents.
« Nous n’utilisons pas de logiciels d’intelligence artificielle pour le travail de nos avocats au quotidien. Nous sommes par contre, à évaluer et tester différentes solutions d'affaires », explique assez énigmatiquement Jean-François Lemieux, relationniste du cabinet Lavery.
Certains font timidement un effort comme Langlois qui utilise le logiciel Summation Pro depuis décembre 2016. «Il nous permet de colliger un gros volume de documents électroniques, de concentrer toutes les informations sur un même document ou encore de faire un élagage de la base de données», dit Lisa Cook, superviseur des parajuristes.
Dominic Jaar, associé chez KPMG et leader national, enquêtes technologiques explique la frilosité qui existe au Québec par « un inconfort » par rapport aux nouvelles technologies dans les tribunaux québécois: « à Toronto, presque tous les cabinets se sont dotés de logiciels en intelligence artificielle. Il faut savoir que hors Québec, la cour endosse de plus en plus cette manière d’utiliser les nouvelles technologies ».
« Redonner au travail de l’avocat sa juste valeur »
Les plus jeunes sentent en tout cas le filon. Maxime Lussier a récemment lancé deux applications sur une plateforme baptisée « Redox » avec Nicolas Saudrais. Détenteur d’un bac en droit et en train de faire une maîtrise en fiscalité à l’Université de Sherbrooke, M. Lussier explique: « lorsque j’ai fait mon stage, j’ai effectué beaucoup de tâches répétitives… J’ai appris à programmer par la suite et je me suis dit qu’il serait intéressant de proposer quelque chose qui serait un accélérateur de tâches répétitives ».
L’une de ses applications utilise ainsi des algorithmes de similarité qui compare les noms de marque de commerce: « Chaque mercredi, des centaines de nouveaux noms de marque sont rendus publics. Grâce à cet algorithme, l’avocat va pouvoir suivre en un temps record si une nouvelle marque créée ressemble à celle de l’un de ses clients. À la main, ce travail est fastidieux », poursuit le jeune homme.
Pour lui, l’utilisation de l’IA et d’outils de traitement de tâches répétitives va permettre « de redonner au travail de l’avocat sa juste valeur. Au lieu de s’occuper de la paperasse, il aura plus de temps pour être à l’écoute de ses clients ou en chercher de nouveaux ».
Me Andre Garber, de chez Dentons à Toronto, confirme ce potentiel gain de productivité : « ces programmes nous donne du temps pour nous occuper de notre client à qui nous pouvons offrir un service encore meilleur, c'est un système gagnant-gagnant. Cela aide les clients à obtenir de meilleurs résultats et c'est ça que nous cherchons tous en tant qu'avocats ».
Il attend avec impatience l’arrivée du logiciel Ross Intelligence sur le marché canadien. Ce programme est capable d’analyser toutes les sources juridiques pour fournir une réponse instantanée aux questions des avocats et n’est pour le moment disponible qu’aux États-Unis.
Sentant les besoins croissants au Canada, la compagnie a décidé d’ouvrir bientôt un bureau dans la ville Reine. Le Québec suivra peut-être...