Comment améliorer le système de justice?
Elyse L. Perreault
2018-10-09 11:15:00
Mes Gilles Trudeau, Denis Roy et Pierre Noreau sont trois avocats qui s'intéressent à notre système de justice. Droit-inc leur a posé quelques questions.
Besoin d’éducation criant pour désengorger le système
«Il faut à tout prix que notre gouvernement prenne les moyens nécessaires afin que la population connaisse et comprenne la Loi et le système de justice», s’entendent-ils pour dire.
D’une part, ils estiment que des citoyens mieux éduqués à cet égard pourront éviter d’entrer dans le tourbillon de la justice en faisant des choix plus éclairés, sachant mieux quels gestes pourraient les mettre dans l’embarras et comment ne pas se faire berner.
D’autre part, ils croient que si la population connaît les rouages du système, mais aussi les autres ressources qui peuvent lui venir en aide en cas de litige, elle pourra opter pour d’autres alternatives en cas de pépin, plutôt que d’avoir le réflexe de se tourner vers les tribunaux dès le début.
Des citoyens laissés à eux-mêmes
«Selon notre système de justice, à compter de l’âge de 18 ans, tout citoyen est réputé connaître et respecter la Loi, dit Me Roy. Mais on constate vite que c’est loin d’être le cas!», poursuit-il.
Le juriste, qui a été président de l’aide juridique pendant 12 ans, interroge la logique de s’attendre à ce que la population connaisse et comprenne bien le fonctionnement du système de justice alors qu’on ne lui fournit aucun outil pour y parvenir. Il est d’avis que des cours sur le sujet devraient être obligatoires au secondaire.
Son confrère, Me Noreau, renchérit:
«On parle minimalement d’une base, d’une matrice! Ce serait un bon début, dit-il. La plupart des gens ne savent même pas en quoi consiste un contrat, ni quand ou comment il est applicable! Pourtant, c’est le genre d’apprentissage qui va nous servir toute notre vie», souligne-t-il.
Le rôle des médias
Me Noreau note que les médias ont aussi leur part de responsabilité dans l’ignorance des citoyens sur les questions juridiques.«Très peu de dossiers civils sont médiatisés. Quand ils pensent Justice, les gens imaginent automatiquement un gros procès criminel devant juge et jury», dit-il.
«Plusieurs n’ont aucune idée du fonctionnement applicable aux causes civiles, alors quand ils entrent dans le système, ils sont perdus», renchérit-il.
«De plus, l’image du système de justice que projettent les médias éveille la crainte… Elle contribue à miner la confiance de la population envers le système», déplore son collègue Me Trudeau.
Et l’aide juridique dans tout ça?
Selon Me Trudeau, il va sans dire qu’outre l’éducation du peuple, un investissement majeur dans les services d’aide juridique serait également bénéfique au désengorgement des tribunaux.
«Les avocats de l’aide juridique sont des acteurs importants dans le système de justice, dit-il. Ils connaissent bien les citoyens et leurs problématiques et peuvent sans contredit contribuer positivement aux changements qui s’imposent», ajoute-t-il.
Somme toute, le juriste se dit optimiste pour la suite des choses. Cela dit, il conclut en disant: «Mais comme pour tous les systèmes aussi gros et complexes, il faut être patient et savoir donner du temps au temps...»