Un gros 300 000 $ pour une victime de violence conjugale!
Éric Martel
2018-11-28 13:30:00
La victime, défendue par Me Daniel Romano de Kalman Samuels, affirme avoir été séquestrée pendant trois jours en septembre 2012 et battue par son ex-conjoint. Il consommait sans arrêt de l'alcool et de la drogue pendant ces trois journées.
Le tribunal en arrive à la conclusion que l'ex-conjoint devra verser à sa victime un peu plus de 300 000 $ en dommages, dont 25 000 $ pour chaque jour de séquestration et d'agression.
Une cause phare?
« C’est un message qu’envoie la Cour aux victimes de violence conjugale. Elles savent maintenant qu’elles peuvent être compensées au civil », dit Me Martin Courville à Droit-Inc.
Même son de cloche du côté de l’avocat de la victime Me Romano qui estime que ce jugement fera jurisprudence et qu'il enverra comme message aux victimes « qu'elles ne sont pas seules, qu'il y en a d'autres qui ont vécu cela et qu'elles ont des recours ».
Questionné par Droit-Inc, Me Alain-Pierre Lecours de Lecours Hébert avocats explique pour sa part que le cas fera jurisprudence et qu’il enverra surtout un message important à la population québécoise.
« Ce genre de cas là fait comprendre à la société que la violence conjugale a des conséquences, et pas seulement au niveau criminel. »
Le mouvement #MeToo peut-il avoir influencé la décision du juge? Me Lecours voit plus loin que ça. À ses yeux, la jurisprudence suit un mouvement sociétal important.
« Le mouvement #MeToo provient d’un désir commun de voir les relations hommes-femmes rééquilibrées, plus saines.» C’est ce même mouvement de société, punissant les actes malsains, qui est aussi à l’origine de ce jugement, estime l’avocat.
Lien de causalité
Le juge Pierre Journet, de la Cour supérieure du Québec, écrit dans son jugement que les agressions violentes qu'a subies la victime lui ont causé un stress post-traumatique qui l'affecte toujours et qui la suivra possiblement pour une grande partie de sa vie.
« Le lien de causalité entre les dommages subis par madame sur le plan moral, matériel et corporel est évident », écrit le juge Journet dans sa décision. « Monsieur a contrôlé madame, a assouvi ses instincts guerriers sur elle, l'a menacé de représailles durant la vie commune et l'a blessée lors d'une agression sauvage et impardonnable. »
Selon Me Courville, spécialisé en litige civil et commercial, le cas est quasi unique.
« Il est assez rare de voir des liens de causalités prouvés entre deux jugements. Le fait que le défendeur avoue ses torts y est pour beaucoup. »
En effet, l’avocat estime qu’on ne voit pas souvent un juge utiliser un procès criminel afin de justifier des dommages dans un procès civil.
Choc post-traumatique
La victime soutient que l'homme, avec qui elle partageait sa vie depuis plus de sept ans, l'a privée de nourriture, lui a cassé un doigt et lui a infligé de multiples contusions et lacérations.
La femme était convaincue à ce moment-là que sa mort était imminente, apprend-on dans le jugement.
Profitant d'un moment d'inattention de l'homme parti fumer sur le balcon, elle a réussi à s'échapper et à contacter la police de Laval.
L'ex-conjoint a été arrêté, accusé et condamné à huit mois de prison pour séquestration et agression armée.
Peu de temps après cette condamnation, la victime a décidé d'intenter une poursuite civile de près d'un million de dollars contre son agresseur.
Dans le jugement, on peut lire également que l'homme en question n'a exprimé aucun remords, « plaidant que si Madame le craignait, elle n'avait qu'à fuir les lieux ».
« Elle voulait être dédommagée et elle voulait parler pour d'autres femmes pour donner l'exemple qu'on peut avoir recours au droit civil pour tenter d'obtenir plus de justice dans des situations de violence conjugale », a expliqué son avocat Me Romano.
- Avec Radio-Canada
CFF
il y a 6 ansLien du jugement SVP? Le défendeur était-il représenté par avocat?
Anonyme
il y a 6 ansEt voilà la référence 2018 QCCS 4918