La justice militaire gagne
Jean-Francois Parent
2019-08-01 11:15:00
Dans l’arrêt Reine c. le caporal Beaudry, la Cour suprême a invalidé une décision de la cour d’appel de l’armée qui avait statué qu’un soldat inculpé d’une infraction criminelle grave avait droit à un procès avec jury.
Voici plusieurs années, le caporal Beaudry a été accusé d’agression sexuelle causant des lésions corporelles, un crime passible d’une peine de 14 ans d’emprisonnement. Invoquant que la Charte canadienne prévoit que tout accusé a droit à un procès devant jury, le caporal Beaudry plaidait ainsi pour que son procès se tienne sous les mêmes conditions que toute personne civile.
Estimant que le crime dont il était accusé ne relevait pas du droit militaire, la Cour d’appel de la Cour martiale du Canada lui accordait ce droit. En soutenant que le crime reproché ne se retrouvait pas à l’article 130 de la Loi sur la défense nationale qui dispose que la majorité des infractions criminelles sont également des infractions militaires et relèvent ainsi de la cour martiale.
Plusieurs soldats soutiennent que la justice militaire ne devrait pas s’appliquer aux infractions ne relevant pas du service militaire. Ils s’agirait là d’une violation des droits garantis par la Charte.
Ils se sont toujours vu refuser ce droit, puisque la Charte contient une exception, à l’article 11 : celle s’appliquant aux infractions commises par des militaires enrôlés.
Le 26 juillet dernier, la Cour suprême a décidé à l’unanimité de maintenir le statu quo.
Puis, le même jour, dans l’affaire Caporal-Chef C.J. Stillman, et al. c. Sa Majesté la Reine, la Cour suprême a maintenu le rejet de la Cour d’appel de la cour martiale de refuser les contestations constitutionnelles de l’al. 130(1)a) de la Loi sur la défense nationale.
Mes Mark Létourneau et Jean-Bruno Cloutier, des Services d'avocats de la défense de Gatineau, plaidaient pour les demandeurs dans les deux dossiers.
Ils s’opposaient dans les deux cas à Me Dylan Kerr du Canadian Military Prosecution Service.
Dans une décision 5-2, la Cour suprême estime ainsi que puisque la Constitution accorde au Parlement le pouvoir de légiférer la chose militaire, il peut également décider que les infractions commises par des soldats, même si elles ne sont pas des infractions militaires, relèvent néanmoins de la cour martiale.
Stillman c. la Reine impliquait plusieurs dossiers d’agressions commises par des militaires et remontant à quelques années.