Un ministre s’emporte contre un prof de droit
Camille Laurin-Desjardins
2020-12-21 14:15:00
« Ark. Complètement dégueulasse. Ça me lève le coeur. J’ai honte de mon université. Honte qu’elle tolère qu’un de ses professeurs tienne ce genre de propos » a écrit le ministre, jeudi.
Ark. Complètement dégueulasse. Ça me lève le coeur. J’ai honte de mon université. Honte qu’elle tolère qu’un de ses professeurs tienne ce genre de propos. https://t.co/JEc3FPLtOe
— Mathieu Lacombe (@lacombemathieu) December 17, 2020
Il répondait à un tweet (voire une série de tweets) d’Amir Attaran, professeur titulaire à la Faculté de droit - section common law de l’Université d’Ottawa, qui n’avait pas été tendre envers le gouvernement Legault.
« François Legault a choisi une voie tout aussi non scientifique et immorale que Donald Trump. Les deux sont des nationalistes, dont l’accomplissement est de décimer une multitude de leurs concitoyens. Laissons l’histoire refléter que les nationalismes américain et québécois auront été des échecs meurtriers », a notamment écrit le professeur Attaran.
Plusieurs internautes ont souligné que le prof de droit n’en est pas à sa première controverse sur les réseaux sociaux.
Cet individu manque notoirement de jugement et en fait état de manière intense.
— Martin Boudreault (@martinboudro) December 18, 2020
Pour l’@uOttawa tolère ce raciste mais écarte une prof non raciste qui cite un mot dans un contexte pédagogique.
C’est le recteur @recteurUOpres qui devrait être congédié
Je vous félicite pour votre prise de position concernant ce professeur Amir Attaran qui tient souvent des propos vulgaires, odieux et diffamatoires à l'endroit de certains Québécois. D'autres politiques devraient aussi le dénoncer.
— Julie Chiasson (@JulieChiasson6) December 18, 2020
« J’aime dire la vérité »
Mais en entrevue avec Droit-inc, M. Attaran, qui enseigne également à la Faculté de médecine de l’UdO, précise que son but n’est pas de soulever la controverse.
« J’aime dire la vérité, peu importe qui cela dérange. Je me fous vraiment du fait que ça puisse mettre des gens en colère. Si les données et les preuves sont exactes… alors il faut le dire! Et les preuves sont extrêmement fortes : l’approche nationaliste du Québec, dans sa gestion de la pandémie, est un échec. »
Le professeur précise également que, contrairement à ce que plusieurs internautes lui ont reproché, il n’a rien contre le peuple francophone.
« Cela n’a rien à avoir avec la langue. Regardez le Nouveau-Brunswick, c’est l’une des provinces qui s’en tire le mieux au pays! »
Quant à la réaction du ministre Lacombe, sur Twitter, le professeur Attaran croit que c'est une bonne chose, puisque cela met en lumière « l’échec de son gouvernement ».
« Vous pouvez tirer sur le messager… mais ça ne change pas la réalité! » s’exclame le professeur, qui trouve déplorable que les magasins et les bureaux soient encore ouverts au Québec.
D’autres internautes ont soulevé que cette prise de position était un peu ironique, après que la CAQ a fortement défendu la liberté d’expression, en lien l’affaire Lieutenant-Duval.
Pauvre Mathieu. Il est peiné. Il aime la liberté d'expression et la liberté académique que quand une professeur balance le mot en "N" devant ses étudiants.
— Les Matins de Maniwaki (@LManiwaki) December 18, 2020
Rappelons qu’il y a quelques semaines, Verushka Lieutenant-Duval, elle aussi professeure à l’Université d’Ottawa, a été suspendue pour avoir prononcé le « mot en n » pendant un de ses cours, ce qui avait soulevé l’indignation chez plusieurs, dont le ministre Lacombe. Ce dernier, un ancien étudiant de l’Université d’Ottawa, avait condamné « la vague de haine contre les professeurs francophones ».
Joint par Droit-inc, l’attaché de presse du ministre a indiqué que ce dernier n’était pas en mesure de répondre à nos questions, et que tout avait été dit dans le tweet.
« Il s’est exprimé afin de dénoncer des propos déplorables d’un professeur de l’Université d’Ottawa qui ne reflètent pas du tout la gestion de crise actuelle par le Québec », a répondu Antoine de la Durantaye par courriel.
L’attaché de presse de François Legault, Ewan Sauves, a affirmé qu’il ne ferait pas de commentaire, tout en précisant que « étant un ancien étudiant de l’Université d’Ottawa », le ministre Lacombe était « dans son droit ».
L’Université d’Ottawa a quant à elle choisi de ne pas réagir à cette affaire.