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Les avocats volages...
Nicholas Teasdale
2011-02-14 15:00:00
2011 sera-t-elle l'année des avocats volages? En tout cas, les avocats qui travaillent à court terme sur des mandats précis pour plusieurs firmes sont de plus en plus nombreux...
Il n'est pas le seul à le penser.
Pour la recruteuse juridique Caroline Haney, les avocats qui se lancent dans le travail contractuel ont été nombreux pendant la récession. Trois scénarios sont récurrents : remplacement d’un congé de maladie, augmentation temporaire de la charge de travail et création d’un poste contractuel qui sera ensuite transformé en poste permanent.
« Au Québec, c’est surtout un phénomène qui touche les entreprises. Ceci dit, tous les grands cabinets ont déjà embauché quatre ou cinq avocats pour une courte période lorsqu’ils avaient un dossier particulièrement important, pour travailler sur la documentation. »
Les cabinets préfèrent encore donner tout le travail possible aux employés, quitte à transférer une partie d’un dossier d’un bureau à un autre, par exemple de Toronto à Montréal ou de Montréal à Québec.
« Surtout en période de récession, pourquoi faire affaire avec des gens qu’on ne connaît pas alors qu’on peut utiliser toutes nos ressources à l’interne ? » Demande Me Haney.
Un statut flexible, mais précaire
Les avocats contractuels bénéficient d’une plus grande flexibilité dans leurs horaires et dans la direction qu’ils souhaitent emprunter dans leur carrière. De plus en plus, ils se voient confier des tâches plus spécialisées. En contrepartie, ils doivent composer avec des revenus moindres, un travail souvent moins gratifiant et une sécurité d’emploi inexistante.
« Comme consultant, je n’ai pas de sécurité d’emploi. C’est plus stressant de savoir que personne ne me fait de chèque à toutes les deux semaines. C’est la même chose pour ces avocats », explique Jordan Furlong.
Malgré l’importance grandissante de ce type de travail, Jordan Furlong croit que le travail très spécialisé, souvent le plus intéressant, restera au sein des firmes, parce que c’est ce qui justifie leurs honoraires.
« C’est ce qu'on observe en ce moment, mais qui sait ce que nous réserve l’avenir ? »
Caroline Haney estime que le remplacement contractuel peut devenir une spécialité : il faut savoir s’adapter rapidement à une entreprise pour ne pas changer les façons de faire dans un dossier.
« Il est possible de faire une belle carrière et de se développer comme spécialiste des remplacements en contentieux », selon l'avocate.
Repenser l’école et l’éthique
Dans le reste de l’Amérique du Nord, les facultés de droit devront probablement s’ajuster au fait que les grandes firmes embaucheront de moins en moins de salariés pour se tourner vers les contractuels. Au Québec, les frais de scolarité sont assez bas pour permettent aux étudiants qui sortent de l’université de choisir un travail moins payant mais plus flexible.
« Les grandes firmes à Montréal et à Québec vont aussi entrer dans la danse. Cela fait partie d’un réajustement majeur du marché qui forcera les firmes à adopter les solutions employées dans les autres secteurs de l’économie. Les clients sont heureux de payer pour des services spécialisés, mais ils ne veulent plus payer des honoraires faramineux pour un travail qui ne requiert pas une spécialisation particulière », croit M. Furlong.
Selon le consultant, il se pourrait que les règles d’éthique doivent être repensées. Les avocats pigistes pourraient effectivement se trouver rapidement en conflit d’intérêts du fait de leurs mandats diversifiés.
« C’est un problème potentiel important. On voit une situation où il y aurait une demande pour des avocats contractuels qui ne pourraient plus travailler après une dizaine de mandats. Ceci dit, je crois que les forces du marché l’emporteront à terme sur les règles d’éthique que se sont fixées les avocats.»
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