Jean-Louis et moi

La conférence était organisée de concert avec la Chaire Jean-Louis Baudouin en droit civil de l’Université de Montréal, l’Association Henri Capitant des amis de la culture juridique française et les Éditions Yvon Blais.

Cet événement s'inscrit dans "une tradition universitaire qui est celle de rendre un hommage à un professeur qui prend sa retraite", explique Me Salehabadi, mais pas seulement. La conférence coïncidait également avec le lancement du livre ''Les mélanges Jean-Louis Baudouin''.

Un quadruple hommage rendu à un homme polyvalent,"sous ses quatre chapeaux : celui de professeur de droit, d'écrivain, de juge et d'avocat", précise Amélia Salehabadi.

Pour l'occasion, des conférenciers du monde entier étaient présents. On pouvait y croiser "le who's who des juristes de la francophonie" d'après l'avocate :

• Trois juges de la Cour d'appel dont deux magistrats en exercice Nicholas Kasirer et Jacques Chamberland et l'ancien juge de la cour d'appel Paul-Arthur Gendreau;
  


• les professeurs de la Faculté de droit de l'UdM : Jean Pineau, Didier Lluelles, Benoît Moore, Adrian Popovici, Patrice Deslauriers, Élise Charpentier, Brigitte Lefebvre
  


• les professeurs de la Faculté de droit de Mcgill tels que Lara Khoury, Pierre-Gabriel Jobin;
  


• les professeures de la faculté de droit de Sherbrooke Suzanne Philips-Nootens et Nathalie Vézina;
  


• la professeure Mariève Lacroix de la Section de droit civil de l'université d'Ottawa;
  


• La professeure de l'université Laval Danielle Blondeau;
  


• De France : les professeurs Camille Jauffret Spinosi, Catherine Labrusse-Riou, Philippe Dupichot, Denis Mazeaud, Michel Grimaldi;
  


• De Suisse, Pierre Wessner;
  


• De Belgique, la professeure de l'Université de Liège Christine Biquet.
  

Les coûts de la conférence - plus de 600 $ - n'ont pas découragé les participants. "La salle était archi-bondée, plus d'une centaine de personnes était présente, raconte Amélia Salehabadi. Et pas n'importe qui ! On aurait dit que la magistrature était au complet; de la Cour du Québec à la Cour d'appel - j'ai croisé les juges Dutil et Dalphond - en passant par la commission des droits de la personne."

Les grands cabinets n'étaient pas en reste avec Fasken Martineau auquel Jean-Louis Baudoin est lié, mais aussi l'ex-associé directeur du cabinet Me Claude Auger "en pleine forme", ainsi que des collaborateurs de Norton Rose et d'autre cabinets.

Parmi les souvenirs les plus marquants, Amélia Salehabadi retient "outre la valeur des contenus des présentations sur les sujets de prédilection de Jean-Louis Baudouin, l'émotion dégagée par ces deux journées de conférence; celle montrée à Jean-Louis Baudouin par ses pairs car tout le monde admire et aime le travail de Jean-Louis, mais aussi et surtout, tous aiment l'homme ou si vous voulez l'être humain". Une conférence placée sous le signe d' "un amour déclaré avec humour et finesse", prévient-elle.

La fille du professeur, Christine Baudouin, également avocate, a décrit son père, comme "un humble pathologique". Avant d'entrer à la faculté de droit de l'université de Montréal, elle ignorait tout de la popularité de son père dans le milieu juridique. Elle s'en est vite rendue compte lorsqu’elle devint ultra populaire à la faculté. "Les étudiants insistaient pour étudier avec elle, puisqu'elle habitait toujours avec sa famille, relate Me Salehabadi. La seule fois où son père a été content d'être reconnu, en revanche, c'était dans un autobus à Londres car on l'avait pris pour Peter Sellers!"

Une pluie d'hommages s'est donc abattue sur le professeur. Ce dernier a réagi comme à son habitude. "Fidèle à lui même, il a été très attentif, concentré, et très bon public. Il se tordait de rire lors de nombreuses anecdotes racontées par les uns et les autres", indique l'avocate.

D'après elle, les hommages ont été préparés dans le plus grand secret, à l'initiative de Benoit Moore, titulaire de la Chaire Jean-Louis Baudouin, et par l'épouse du professeur. "Ses réactions étaient spontanées, mais toujours empruntes d'une certaine pudeur, ajoute Me Salehabadi au sujet du professeur Baudoin. À un seul moment, il a craqué lorsqu'il a prononcé son discours et a évoqué son passage à la Cour d'appel; sa voix s'est étranglée et quelques larmes ont coulé discrètement."

Ses petits-enfants âgés de 2 ans à 10 ans, qui couraient et s'amusaient dans la salle, se sont alors précipités spontanément vers le grand-père sur l'estrade, pour le consoler, se rappelle Amélia Salehabadi. "Des étreintes, des bisous et des 'je t'aime à profusion'; comme quoi, Jean Louis Baudouin est vraiment aimé... la vérité sortant de la bouche des enfants", dit-elle.

Me Salehabadi avoue avoir "flashé" sur trois présentations en particulier au cours de cette conférence : "j'ai eu un coup de cœur pour l'hommage rendu par le juge Kasirer de la Cour d'appel, dont la conférence portait sur l'ouvrage mythique de Jean-Louis Baudouin les ''Obligations''; il m'a donné envie de replonger dans ce livre mythique."

Second coup de cœur : "sa fille Christine bien entendu, toute en humour, en émotion et en finesse". Le dernier va au "coloré Denis Mazeaud, professeur à Paris 2 et président de la société Henri Capitant. Fidèle à sa réputation d'orateur hors pair et de chouchou des étudiants parisiens - surtout des étudiantes - il a su électriser, comme j'ai rarement vu, la salle qui était pendue à ses lèvres".

Un bilan extrêmement positif selon l'avocate, qui n'a pas de regret. Ou peut-être un seul. "Je ne comprends pas pourquoi le professeur Moore ne m'a pas invitée comme conférencière pour que je puisse moi-aussi rendre hommage à Jean-Louis Baudouin", plaisante-t-elle.

Mais si elle avait pu, elle aurait dit ce qui suit : "je lui aurais rendu hommage en tant qu’étudiante, pour son immense respect des étudiants. Il écoutait les opinions de tous sans distinction, même celles des étudiants de 1ère année, et les analysait comme si ces opinions émanaient de pontes juridiques. Je lui aurais rendu hommage en tant que journaliste, pour sa disponibilité et sa franchise. Jean-Louis Baudouin assume ses opinions et ses amitiés. En tant qu'être humain, malgré sa grande notoriété, il ne vous fait jamais sentir que vous le dérangez, même si, comme moi, vous avez les questions faciles..."

En un mot, pour prolonger un peu cet hommage, l'avocate exhorte tous les lecteurs à courir acheter le livre ''Les mélanges Jean-Louis Baudouin''. Car, conclut-elle, "c'est un bijou ; des textes courts, mais percutants par des auteurs - avocats, professeurs, juges, doyens de haute voltige - sur des sujets d'actualités et sur les amours de toujours de Jean-Louis Baudouin."