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Netflix-CRTC: qui remportera la bataille?

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Agence Qmi

2014-10-06 10:30:00

Est-ce que le CRTC a le pouvoir de réglementer les entreprises comme Netflix ? Un professeur de droit nous apporte son éclairage...
Est-ce que le CRTC a le pouvoir de réglementer les entreprises comme Netflix ?
Est-ce que le CRTC a le pouvoir de réglementer les entreprises comme Netflix ?
L’agence fédérale, qui réglemente la quantité de contenu canadien sur nos ondes, le pense certainement. Les experts ne sont toutefois pas convaincus. Même si le CRTC parvient à gagner une bataille judiciaire, il pourrait au final perdre la guerre.

« Bien, nous ne le savons pas encore », a déclaré Michael Geist, de la Chaire de recherche du Canada en droit d’internet et du commerce électronique, de la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa.

Légalement, a ajouté M. Geist, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) pourrait en théorie traîner Netflix et Google devant les tribunaux et même gagner.

En pratique toutefois, il n’a pas les dents assez longues pour forcer des services étrangers de streaming à se conformer à des ordonnances canadiennes.

Le CRTC ne peut pas, par exemple, forcer une entreprise dont le siège social est aux États-Unis à obtenir une licence canadienne. De plus, toute tentative de bloquer l’arrivée de Netflix et de YouTube au Canada provoquerait probablement une réaction du gouvernement canadien et des protestations de la population.

Zone juridique grise

Des compagnies comme Netflix ont opéré dans une zone juridique grise depuis plus d’une décennie. En 1999, le CRTC a exempté les diffuseurs internet de ses règles de contenu canadien.

Lors des récentes audiences du CRTC intitulées : « Parlons télé : une conversation avec les Canadiens », Netflix et Google ont répliqué à l’affirmation qu’elles devraient être considérées par le CRTC comme des diffuseurs au Canada, en faisant valoir que l’organisme de réglementation n’avait aucune compétence à leur endroit.

Lors des audiences, les diffuseurs traditionnels comme Bell et Rogers ont dénoncé ce qu’ils considèrent comme un avantage injuste à Netflix.

Contrairement à Netflix et Google, les diffuseurs canadiens doivent en effet produire un quota de contenu canadien et verser de l’argent dans un fonds qui subventionne la production télévisuelle canadienne.

Traitement inégal ?

Michael Geist, Chaire de recherche du Canada en droit d’internet et du commerce électronique, de la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa.
Michael Geist, Chaire de recherche du Canada en droit d’internet et du commerce électronique, de la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa.
Rogers et Shaw se préparent à lancer leur propre service de streaming, appelé Shomi, et craignent que leur service souffre d’une réglementation que les compétiteurs américains peuvent contourner.

« Nous demandons simplement un traitement égal, a déclaré à l’Agence QMI la porte-parole de Rogers, Patricia Trott. Si des services de télévision par contournement comme Netflix ne sont pas réglementés, alors n’importe lequel service similaire que nous offrons ne devrait pas être réglementés.»

Netflix et Google ont tous deux assuré lors des audiences du CRTC qu’elles se débrouillaient très bien en ce qui concerne le contenu canadien, sans que le CRTC ne regarde par-dessus leurs épaules.

« Considérant la popularité du contenu canadien sur notre service, Netflix estime que la réglementation en ligne est inutile et pourrait avoir des conséquences qui sont incompatibles avec les intérêts des consommateurs », a déclaré au CRTC la directrice des politiques publiques mondiales chez Netflix, Corie Wright.

Le CRTC a demandé des preuves, mais Netflix et Google ont refusé de remettre l’information sur leur contenu canadien de même que l’information sur leurs abonnés. Ce refus est une violation directe d’une décision prise en 1999, qui stipule que le CRTC a le droit de collecter des données de diffuseurs internet.

Les deux géants d’internet ont réagi en haussant les épaules. En fait, disent Netflix et Google, elles ne se sont présentées aux audiences du CRTC que par courtoisie.

Le CRTC va-t-il capituler ?

Le CRTC les a donc exclus du processus de consultation et a l’intention de prendre une décision « sur la base des autres éléments de preuve au dossier ».

Le professeur Michael Geist entrevoit que le Conseil va lentement battre en retraite puisqu’il ne peut pas gagner cette bataille.

Le CRTC a fait savoir qu’il n’allait pas annoncer une décision basée sur les audiences avant l’année prochaine. M. Geist pense qu’il est peu probable que le CRTC va s’en prendre à Netflix et Google. « Pour une raison, il n’est pas appuyé par le gouvernement », a-t-il dit.

La ministre du Patrimoine, Shelly Glover, a d’ailleurs déclaré que le gouvernement favorisait le statu quo concernant Netflix. « Le CRTC a décidé dans le passé de ne pas réglementer de tels services et c’est une position que notre gouvernement continue à appuyer fermement », a-t-elle indiqué.

Selon les observateurs de l’industrie, le CRTC a tout simplement du mal à faire appliquer des règlements dépassés face aux technologies émergentes.

« Lorsque les technologies nous amènent dans cette direction, ces instruments de réglementation ne vont tout simplement plus fonctionner, ou bien elles vont désavantager les entreprises canadiennes », selon Hunter Lawson, le coauteur d’un rapport de l’Institut C.D. Howe qui s’oppose à une réglementation de Netflix.
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