Une avocate québécoise à la tête juridique de l’armée
Julien Vailles
2017-06-22 15:00:00
Ce sera la quinzième personne à occuper cette fonction et la première femme à y accéder.
Le rôle de la juge-avocate générale est d’être la conseillère juridique du Gouverneur général du Canada et du Ministre de la Défense nationale pour toutes les questions concernant le droit militaire. C’est en quelque sorte la courroie de transmission entre les Forces armées canadiennes et le pouvoir politique. De plus, cette fonction comprend la supervision de l’administration de la justice militaire dans les Forces.
La passation des fonctions aura lieu le 27 juin prochain, à Ottawa. Ce faisant, la capitaine de vaisseau sera automatiquement promue commodore.
Le Ministre fédéral de la Défense, l’Honorable Harjit Sajjan, s’est déclaré « extrêmement heureux » que la capitaine Bernatchez ait été désignée à ce poste.
Kosovo, Afghanistan, Libye...
Me Bernatchez a étudié le droit à l’Université de Montréal et a complété une maîtrise en études juridiques internationales avec spécialisation en matière de sécurité nationale à l’Université de Georgetown, à Washington. Depuis 1993, elle est membre du Barreau du Québec.
L’avocate a débuté ses classes dans la Réserve navale canadienne, alors qu’elle s’y est enrôlée en 1987. Dix ans plus tard, elle se joignait au Cabinet du juge-avocat général. Dans la même veine, elle a alors été transférée à la Force régulière.
Sa feuille de route est costaude.
En 2010, elle était promue comme juge-avocate générale adjointe aux opérations et capitaine de vaisseau. Puis, elle a été tour à tour chef d’état-major du juge-avocat général et juge-avocate générale adjointe aux services régionaux.
Ses implications comprennent notamment le conflit au Kosovo, en 1998-1999. Alors qu’elle était juge-avocate générale aux opérations, elle était la principale responsable de fournir des conseils juridiques au Ministère de la Défense nationale concernant les missions des Forces, dont celles en Afghanistan et en Libye.
Une impressionnante « dame de coeur »
« Si je pouvais la décrire en une seule phrase, je dirais que c’est une « Dame de Cœur », dans le bon sens de l’expression », dit Me Pascal Lévesque, de chez Fradette Le Bel avocats, Chicoutimi, un spécialiste des questions militaires.
« C’est une excellente décision pour les FAC. Sans rien enlever aux qualités des autres personnes qui ont pu être considérées pour le poste, la capitaine de vaisseau (bientôt commodore) Geneviève Bernatchez est, à mon avis, la personne idéale pour assumer ces fonctions », dit-il.
« Trois aspects majeurs » l’amènent à cette conclusion. D’abord, ses qualités de juriste hors pair, notamment lors d’opérations des FAC à l’étranger, que ce soit au Kosovo ou plus récemment en Afghanistan et en Libye. « C’est une spécialiste des questions de sécurité nationale et de cyberconflits. Elle a d’ailleurs co-rédigé le Manuel de Tallinn, premier guide international sur les questions juridiques que soulève la cyberguerre. »
Me Bernatchez a par ailleurs des compétences exceptionnelles en gestion des ressources humaines, estime Pascal Lévesque : « elle a la réputation de faire preuve d’un leadership sensé et juste. Consciente des réalités de l’environnement militaire, des exigences de la mission et des besoins de l’organisation, elle est reconnue pour son côté profondément humain. »
Enfin, dit Me Lévesque, c’est une femme forte. « Tout au long de sa carrière, elle a conjugué les joies et les aléas d’un parcours professionnel riche, sa vie de couple et de famille. Ce qui lui permet de prendre toute la mesure des défis que vivent les militaires ayant eux aussi à maintenir l’équilibre travail-famille. »
Il estime que Geneviève Bernatchez poursuivra les chantiers initiés par le JAG sortant, le major-général Blaise Cathcart, « notamment en matière de lutte contre les inconduites sexuelles et de révision globale du système des cours martiales ».