Le quart-arrière des entrepreneurs
Jean-francois Parent
2018-06-19 14:15:00
Certains des propriétaires exploitants qu’il conseille auront davantage besoin d’un guide que d’un comptable. « Évidemment, je fais les audits, mais il faut offrir de la valeur ajoutée. Mon travail est donc de faire l’analyse de ce que le client a, par rapport à ce qu’il pourrait avoir », explique celui qui vient tout juste d’établir ses pénates chez MNP.
Des chiffres en contexte
Il ne fait donc pas que scruter les livres comptables, il s’attarde à leur contexte. « C’est là qu’on voit si l’entreprise tire tout le profit de ses activités : les coûts, le financement, les marges, on regarde tout, et on évalue si la situation permet au client d’aller là où il veut aller », en colmatant les brèches au passage.
Parfois, « on tombe sur des entreprises qui ont beaucoup de revenus, mais peu de profitabilité. On se rend compte que le propriétaire sort trop d’argent de l’entreprise. La solution serait donc de revoir l’encaisse », plutôt que d’augmenter les ventes, par exemple.
L’important, pour Isaac Benizri, est donc de bien cibler les causes d’un problème auquel son client veut s’attaquer. « Un distributeur manque d’argent pour agrandir ses installations. Et en y regardant de près, je constate qu’il paie 600 000 dollars en loyer. Il est évident qu’une acquisition immobilière, dont l’hypothèque sera moins coûteuse, lui sera bien plus avantageuse », illustre le diplômé de ESG-UQAM en 1996.
Le client qui ne voulait que régler un problème de liquidités vient tout d’un coup d’augmenter son encaisse tout en se dotant d’une bâtisse qui pourra servir éventuellement à financer un projet d’expansion.
Des relations payantes
Autre aspect essentiel des services conseils offerts par Isaac Benizri : le réseautage. C’est qu’il faut souvent trouver des investisseurs, des partenaires d’affaires, des vendeurs ou des acheteurs.
Quand un client a des visées sur une entreprise, ou qu’il a besoin d’un partenaire pour mousser ses affaires, identifier le bon joueur d’en face est crucial. Car l’autre pilier de la valeur ajoutée proposée par Isaac Benizri, c’est de pouvoir négocier la meilleure entente possible.
S’il n’est « pas convaincu que l’alliance sera équitable pour tout le monde », il ne la propose pas. C’est qu’il arrive qu’un client soit vulnérable et ait besoin d’un soutien pour faire face à la concurrence. Comme cela peut être le cas pour un entrepreneur prêt à vendre une participation dans son capital en échange d’un soutien logistique.
« Les besoins sont relatifs à la vulnérabilité du client. Plus il a besoin de croître rapidement, plus il sera prêt à donner », en échange d’un investissement. Outre le doigté exigé pour sceller une entente profitable pour le client, il faut également lui proposer un vis-à-vis qui ne profitera pas indûment de la situation.
Un bon casting
D’où l’importance des relations que Isaac Benizri cultive et qui servent à dénicher le bon ‘’casting’’ pour son client. Un casting d’autant plus important que le comptable pourra alors négocier de bonnes ententes.
Autre aspect important d’un bon réseautage : recommander le bon juriste à son client. « Dans le transactionnel, on a toujours besoin du légal. Mais il faut que le client se sente à l’aise avec l’avocat. Au-delà de la spécialité, il faut aussi évaluer la meilleure personnalité pour desservir le client. »
Au-delà de la culture relationnelle, il faut également que le comptable opère avec intégrité, poursuit Isaac Benizri.
Dans un petit marché comme Montréal, « si tu n’as pas l’intégrité, tu n’as plus d’amis », dit-il.
Et comme les bons comptes font les bons amis… cela continue d’être payant pour le client. « Il est même arrivé que j’aie fait pencher une banque du côté de mon client. »
Car la confiance est essentielle à toutes les étapes du processus, de la sélection du client jusqu’à la conclusion de l’accord. Par exemple, « quand un entrepreneur vient me voir, je dois moi-même être convaincu que son projet est gagnant et qu’il a ce qu’il faut pour que ça fonctionne. Sinon je ne le présente pas au banquier. »
Une passion
Dans le quartier Côte-des-Neiges, où il a grandi, ses parents « voulaient que je fasse de la science », se rappelle Isaac Benizri. Il a certes la bosse des mathématiques, mais à l’époque, il se considère surtout comme un vendeur. Il brocante dans les marchés aux puces, achète et revend des trucs et des machins… « Mais j’étais le studieux de la famille. Et comme j’étais plutôt matheux, je me suis retrouvé en comptabilité. »
Pendant ses études, il fait surtout de la vérification, notamment chez E&Y, puis chez Nexia Friedman. Rapidement, il s’ennuie à n’aligner que les colonnes de chiffres.
Il s’emballe davantage quand vient le temps de trouver des solutions aux problèmes des clients : fiscalité, financement, problèmes d’encaisse…
Il devient alors associé chez Ammar Cousineau Telio Hadid en 1998. Le cabinet, acquis par BDO en 2012, se spécialise dans le service-conseil aux propriétaires exploitants. C’est alors qu’il attrape la piqûre. Prendre un client, tout petit, et le faire croître devient vite sa passion.
« C’est plus intéressant d’être le quart-arrière des startups », celui qui prépare les jeux.
Il retrouve son côté vendeur, qu’il continue d’utiliser aujourd’hui qu’il est arrivé chez MNP, où il est associé depuis février.
Il y apporte un letomotiv enthousiaste. « C’est trippant d’aider les gens à faire de l’argent! », conclut-il.
Montréal.
Ses services comprennent la préparation d’états financiers et de déclarations
de revenus des sociétés, la planification et la conformité fiscales pour
les particuliers et les sociétés, ainsi que le redressement financier et la
réorganisation d’entreprises.
Il détient un baccalauréat en administration des affaires. Comptable
professionnel agréé (CPA), il a obtenu à l’origine le titre de comptable
agréé (CA).