Fraudes: Des avocats québécois ciblés
Agence Qmi
2012-09-13 10:15:00
En mars dernier, elle reçoit un courriel d’une femme se présentant sous le nom de Rebecca Schneider, de l’État du Kentucky aux États-Unis, qui faisait appel à son aide pour récupérer 50 0000$ d’une entreprise de Gatineau.
Elle lui demande alors de saisir un immeuble, une exécution hypothécaire que l’avocate a l’habitude de faire.
« J’ai vérifié. L’entreprise de Gatineau avait bien pignon sur la rue Notre-Dame », se rappelle-t-elle.
Tout suit son cours jusqu’au moment où cette entreprise lui écrit pour se confondre en excuses. Elle lui envoie alors un acompte de 145 000$, à transférer à sa prêteuse américaine.
« Des avocats n’attendent pas toujours les 10 jours réglementaires pour savoir si le chèque a des fonds. Si j’avais transféré l’argent avant d’avoir la réponse de la banque, j’aurais été dans le trouble », affirme-t-elle.
Divorce de 848 900$
L’avocate lavalloise Carole-Marie Allard a, elle aussi, réussi à déjouer une variante du même type de fraude en 2010.
« Une femme de Hong Kong m’a écrit pour que je l’aide à récupérer les 848 900$ pour régler le divorce avec son mari qui était en Ontario », d’expliquer l’avocate.
Après plusieurs correspondances, le mari envoie à l’avocate un chèque de 180 000$ pour qu’elle le transfère à son ex.
« Le chèque était vraiment crédible. Il portait même la mention du curateur public de l’Ontario, dit-elle. Puis la femme s’est mise à me harceler pour que je lui transfère vite le montant dans une banque coréenne. Imaginez : elle m’a même accusée de garder son argent et menacé de me poursuivre ! »
Dans les deux cas, le simple fait de ne pas transférer l’argent a permis de mettre fin aux tentatives de fraude.
Le Centre antifraude du Canada et le Barreau du Québec ont reçu plusieurs plaintes depuis deux ans. Le Barreau a demandé à ses membres d’être prudents.
Deux présumés fraudeurs leur auraient soutiré 29 M$
Aux États-Unis, deux présumés fraudeurs, dont une Canadienne, viennent récemment d’être accusés d’avoir soutiré 29 M$ à 70 avocats américains.
Il s’agit d’une fraude moyenne de plus de 400 000 $ par avocat.
Emmanuel Ekhator, un Nigérian, et l’Ontarienne Yvette Mathurin, qui transigeait souvent depuis Toronto, risquent 80 ans de prison s’ils sont reconnus coupables des 16 chefs d’accusation de fraude dont ils font l’objet.
Fraude nigériane évoluée
Ces procédures ont été intentées par les procureurs de l’État de la Pennsylvanie, il y a un mois.
La façon de procéder est très similaire à la fraude nigériane, qui f ait des milliers de victimes chaque année. Dans la plupart des cas, un homme envoie un courriel à un cabinet d’avocats pour qu’il l’aide à récupérer l’argent d’un client américain.
Ici, la grande différence est qu’on ajoute un complice dans le pays où la fraude est perpétrée, question de d’accorder plus de crédibilité au stratagème.
« Ça n’a rien d’extraordinaire ce genre de requête, expliquait Me Robert Milavetz le mois dernier au réseau américain ABC. On fait ça tous les jours, valider des ententes entre les gens. C’est ça le travail des avocats. »
La faute de la banque ?
Son cabinet du Minnesota a été victime du stratagème. Il a dû rembourser les 400 000 $ envoyés à la banque Wells Fargo avec qui il fait affaire depuis plus de 30 ans.
Avant de transférer l’argent, l’avocat dit avoir obtenu l’assurance de sa banque que le chèque était légitime. Et c’est pour cette raison qu’il accuse l’institution financière de négligence.
La banque rejette les accusations. Tout ce beau monde se retrouvera bientôt devant un juge qui tranchera l’affaire.