Les avocats à temps partiel
Céline Gobert
2011-06-29 15:00:00
Aux États-Unis, on assiste à une véritable expansion de ce statut à part : celui d’avocat à temps partiel, embauché durant une période définie, pour effectuer des tâches variées, qui vont de la simple révision de documents à de plus complexes travaux d’expertise.
Mais qu’en est-il au Québec ? Assiste-t- on au même phénomène ?
« Le phénomène gagne en popularité au Canada », nous explique Dominique Tardif, directrice du cabinet de recrutement juridique ZSA, à Montréal.
Toutefois, il ne prend pas la même forme qu’aux États-Unis et semble bien plus encadré.
Des entreprises- mais aussi des cabinets, et même le gouvernement- font appel aux services de cabinets de recrutement afin de trouver des avocats pour des contrats de courte durée.
L’explication est simple : trop de pression sur les entreprises, et, la nécessité de mieux contrôler les dépenses, gérer les coûts.
« Le plus courant pour les cabinets ce sont des demandes concernant de la révision de documents sur un dossier de recours collectif », dit Me Tardif.
Il peut aussi parfois manquer une expertise- dans un domaine bien spécifique (finances, environnement) pour obtenir un mandat auprès d’un client. Le besoin concerne un consultant expert, sur une période déterminée.
Les entreprises, elles, ont des besoins pendant les périodes de restructuration, essentiellement lors des phases d’acquisition.
Barbara Shore, présidente du cabinet Shore & Associés, travaille avec les compagnies.
« Les avocats sont recrutés pour supporter un surplus de travail, pour des mandats plus longs, lors de congés maternité par exemple », dit-elle.
Mais, qu’est-ce qui pousse un avocat à se lancer dans du temps partiel ? Nécessité ? Choix ?
« J’aspirais à un changement dans ma vie : gagner en expérience, acquérir plus d’indépendance», explique Kiran Mathur qui effectue des projets pour Lexlocom, division de ZSA spécialisée dans les mandats de ce type.
Il y a toutefois différents profils, précise Me Tardif.
L’avocat qui va préférer travailler seulement quelques mois dans l’année, pour pouvoir consacrer plus de temps à sa famille.
Celui, qui, entre deux emplois, veut rester occupé. Ou celui, à la retraite, ancien VP ou associé, qui souhaite garder un pied dans le domaine.
« La sélection est très pointue, les cabinets ne recrutent que du personnel motivé et compétent », déclare Me Mathur, contrant ainsi les diverses attaques dont ces pratiques font l’objet.
Car The Wall Street Journal pointe du doigt certaines dérives. Des salaires plutôt bas (des annonces sur Craiglist qui proposent du 15$ de l’heure!), des interrogations autour de la confidentialité des données, des litiges autour du non paiement d’heures supplémentaires.
Au Québec, tout cela ne semble pas se produire.
« Nous ne recrutons que des avocats expérimentés. Je n’ai eu écho d’aucune mauvaise expérience », déclare Barbara Shore.
Une situation que confirme Pierre Arcand, directeur de la division juridique d’Arcand et Associés, à Montréal.
Selon lui, nous ne sommes pas du tout confrontés à de tels problèmes à Montréal.
« Employer des avocats externes au rabais serait vraiment mal vu! » dit-il.
L’avocat à temps partiel Me Mathur confirme : tout est fait pour minimiser les éventuels conflits. Les cabinets de recrutement attachent beaucoup d’importance à choisir les bonnes personnes.
De plus, un avocat à temps partiel ne gagne pas tellement moins qu'un temps plein.
« L’avocat qui travaille sur un mandat où il s’agit de rassembler et identifier une preuve complexe dans le cadre d’un dossier important sera payé en conséquence. Pour lui, ce ne sera pas 25 $ de l’heure! » explique Me Tardif.
Toutefois, si le salaire peut être intéressant, elle nous précise qu’il varie selon l’expérience et le contrat.
« Mon salaire n’a pas changé », nous informe, quant à lui, Me Mathur.
Heureux, donc ?
« Oui ! » lance-t-il de but en blanc, en conclusion.