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Le miracle chinois de la Faculté de droit

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Marie Lambert-Chan

2013-03-20 11:15:00

En l'espace d'une quinzaine d'années, la Faculté de droit de l'Université de Montréal a signé des ententes avec de prestigieuses universités chinoises. Un petit miracle...
«Il est difficile pour une université francophone de se tailler une place en Chine» affirme Guy Lefebvre
«Il est difficile pour une université francophone de se tailler une place en Chine» affirme Guy Lefebvre
Les ententes sont avec la China University of Political Science and Law (CUPL), la East CUPL de Shanghai, l'Université de Wuhan, l'Université de Macao et l'Académie des sciences sociales de Chine, le groupe de réflexion le plus influent d'Asie.

Un miracle en soi, aux yeux du doyen Guy Lefebvre. «Il est difficile pour une université francophone de se tailler une place en Chine. Cela exige de la patience et de la persévérance. Nous en récoltons aujourd'hui les fruits, car nous sommes l'une des facultés canadiennes les plus présentes dans ce pays», affirme-t-il avec fierté.

L'aventure chinoise a débuté en 1998. L'Agence canadienne de développement international donne à la Faculté de droit, ainsi qu'à l'Université McGill et à l'Institut canadien d'administration de la justice, le mandat de former des juges chinois en matière de primauté du droit et relativement aux systèmes juridiques occidentaux.

Cette initiative a ouvert la porte à de multiples échanges et accords. La faculté a fondé une école d'été à la CUPL, qui a accueilli plus de 500 étudiants québécois depuis 2002. De 30 à 40 étudiants chinois viennent chaque été assister à des cours offerts par la faculté. Une trentaine de leurs compatriotes s'inscrivent chaque année à la maitrise en droit des affaires dans un contexte de globalisation, programme créé en 2006 par M. Lefebvre.

À gauche, on y voit Jin Huang, président de la CUPL, au centre, M. Lefebvre et à droite, Yon Zhu, vice-président de l’établissement chinois
À gauche, on y voit Jin Huang, président de la CUPL, au centre, M. Lefebvre et à droite, Yon Zhu, vice-président de l’établissement chinois
Les professeurs d'ici ont entrepris des travaux de recherche avec leurs collègues chinois, ce qui a donné lieu à des colloques et à de nombreuses publications... en mandarin! «Nous voulons assurer une meilleure diffusion de nos travaux en nous adressant à eux dans leur langue», indique le doyen.

Au départ, les échanges entre chercheurs portaient surtout sur le droit du commerce. Aujourd'hui, il est davantage question de droit public. «Les professeurs chinois se penchent maintenant sur le mariage entre les conjoints de même sexe, les relations entre la presse et le gouvernement, la gouvernance... On n'aurait jamais vu cela il y a 10 ans!»

L'héritage de Norman Bethune

Selon Guy Lefebvre, cette relation privilégiée s'explique notamment par la similarité de nos systèmes juridiques. «Le Québec et la Chine ont tous deux des systèmes civilistes», signale-t-il.

Le Québec est un laboratoire intéressant pour les futurs juristes chinois. «Nous manions les deux plus importants systèmes juridiques de la planète, le droit civil et la common law», précise-t-il.

Selon Guy Lefebvre, la relation privilégiée s'explique notamment par la similarité des deux systèmes juridiques
Selon Guy Lefebvre, la relation privilégiée s'explique notamment par la similarité des deux systèmes juridiques
Le Canada est une destination de prédilection pour les Chinois. «Nous avons une excellente réputation à l'étranger. L'héritage du médecin canadien Norman Bethune, qui a marqué l'imaginaire collectif chinois, est encore bien présent. On m'en parle à chacune de mes visites», déclare M. Lefebvre.

Pour les étudiants québécois, leur séjour en Chine constitue une expérience inestimable. «Ils élargissent leur horizon en s'initiant à une culture où la collectivité est plus importante que l'individu, où le souci de l'autre est capital en affaires, où la négociation est un art, où le sentiment nationaliste est très fort, même chez les jeunes...», constate le doyen.

Vers le Sud

Maintenant que la Faculté de droit a établi une relation de confiance avec l'empire du Milieu, elle se dit prête à inclure d'autres pays dans ce partenariat. «Nous souhaitons aider à créer des liens entre la Chine et des pays en émergence de l'hémisphère Sud, comme le Brésil, l'Équateur et le Pérou», mentionne Guy Lefebvre. Un projet de doctorat sur les questions d'innovation, de technologie et de droit est déjà sur papier. Il se réalisera conjointement avec la CUPL et une université brésilienne.

«Nous avons plusieurs projets dans nos cartons, mais, comme nous l'ont appris les Chinois, nous procédons avec patience en espérant en tirer des avantages un jour ou l'autre», conclut M. Lefebvre.

Quelques dates à retenir

1998-2001

La Faculté de droit, en partenariat avec l'Université McGill et l'Institut canadien d'administration de la justice, met sur pied un programme pour renforcer la qualité du pouvoir judiciaire chinois.

2002

La China University of Political Science and Law

La China University of Political Science and Law
Création d'une école d'été à la China University of Political Science and Law (CUPL).

2006

• Implantation d'une école d'été à la Faculté de droit offerte aux étudiants chinois de la CUPL. La East CUPL de Shanghai et l'Université de Macao y ont aujourd'hui accès.

• Première année du programme de maitrise en droit des affaires dans un contexte de globalisation, destiné aux juristes étrangers.

2009

• Entente de coopération avec l'Université de Wuhan.

• Entente de coopération avec la East CUPL de Shanghai.

2010

Entente avec la CUPL et la East CUPL de Shanghai permettant aux étudiants chinois inscrits à la maitrise en droit des affaires dans un contexte de globalisation d'obtenir un double diplôme.

2011

Création d'un programme de formation continue en droit des affaires chinois pour les juristes en exercice en partenariat avec la CUPL et la East CUPL de Shanghai.

2012

• Ouverture du Centre sino-canadien en droit et culture juridique de la CUPL, codirigé par le doyen Guy Lefebvre.

• Entente de coopération avec l'Académie des sciences sociales de Chine.

• La Faculté de droit et la CUPL créent un consortium pour l'innovation en matière de gouvernance mondiale et d'ordre juridique international.


Note
Cet article a été publié par le Journal FORUM, de l'Université de Montréal; il est reproduit ici avec l'autorisation de la directrice des publications.
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2 commentaires
  1. DSG
    UdeM to China...
    Me love you long time.

  2. Anonyme
    Anonyme
    il y a 11 ans
    Et que font les chinois pendant ce temps ?
    "L'Agence canadienne de développement international donne à la Faculté de droit, ainsi qu'à l'Université McGill et à l'Institut canadien d'administration de la justice, le mandat de former des juges chinois en matière de primauté du droit "



    Pendant que les chinois montrent aux africains (du moins à certains d'entre eux) à "runner" des prisons, "à la chinoise".

    Vive la primauté du droit !

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