Une approche d’avenir!
Camille Dufétel
2024-01-04 14:15:39
Un avocat considéré comme un potentiel leader de demain conjugue droit et compétences psychosociales. Il se dit fier que son approche soit reconnue!
Me Maxime A. Pouliot s’est récemment distingué à l’occasion du dernier Gala « Les leaders de demain », organisé par le Jeune Barreau de Montréal (JBM). Il fait partie de la liste des « Avocats JBM de l’année » pour 2023 et est reconnu dans la catégorie du droit familial.
L’avocat et médiateur travaille à son compte et se dédie aux mécanismes de règlement des différends familiaux, dont la médiation, le droit collaboratif, la négociation et le conseil. Il accompagne aussi des projets d’adoption, de procréation assistée, de grossesse pour autrui et de familles à plus de deux parents, incluant auprès de populations LGBTQ+. Comment en est-il arrivé à ouvrir son propre cabinet, en mettant de l’avant « une approche qui intègre le droit au domaine de la santé mentale et des relations humaines »?
Pour le comprendre, il faut revenir quelques années en arrière. Me Pouliot a d’abord étudié en techniques de travail social, au Cégep de Lévis-Lauzon. « Mes parents nous ont encouragés à faire des études menant directement à une profession, se souvient-il. J’ai choisi ça parce que je voulais travailler avec des gens. »
Pour ajouter une corde à son arc, il a décidé d'étudier ensuite au baccalauréat ès arts, sexologie, à l’UQÀM.
« C’est en travaillant chez Rézo, un organisme communautaire notamment actif auprès des hommes gais ou bisexuels, que j’ai commencé à toucher un peu plus au droit avec la divulgation du statut sérologique, tous les aspects de criminalisation et de santé publique autour de cela, explique l’avocat. J’ai rencontré quelqu’un qui avait fait son cours à McGill et qui m’a dit que j’avais de bonnes réflexions juridiques et un profil qui correspondait à cette université. »
C’est là qu’il a décidé de se tourner plus concrètement vers le droit, en s’inscrivant au baccalauréat en droit à McGill.
Le goût du terrain
« J’ai trouvé ça vraiment difficile parce que pendant mes études, j’ai travaillé dans le milieu communautaire, remarque-t-il. J’avais une approche très « terrain », je travaillais avec des populations vulnérables, on faisait beaucoup avec peu... Et là, j’entrais dans un monde très privilégié, avec différentes attentes. Ç'a été vraiment un choc culturel pour moi. Mais je trouvais le droit intéressant, j’avais hâte d’aller sur le terrain. »
Il dit avoir trouvé sa force « dans le concret, dans le local, dans le fait d’aider les gens au quotidien ».
Il a travaillé comme étudiant en droit notamment chez Éducaloi et à la Chambre de la jeunesse de la Cour du Québec, avant d’effectuer un stage chez Miller Thomson, en 2018.
Assermenté à la suite de celui-ci en 2018, il a débuté sa carrière comme avocat en droit familial chez RSS à Montréal, où il est resté jusqu'en juillet 2020.
« Le droit de la famille, c’était la jonction entre le psychosocial et le juridique, note-t-il. Mais le litige ne m’a pas du tout convenu. Je m’intéressais par contre aux principes du droit, j’aimais travailler sur des mémoires d’appel par exemple, ou développer des plans d’argumentation. J’aimais vraiment la théorie du droit, je m’intéressais aux questions complexes du droit de la famille, mais je trouvais que dans le quotidien, le litige n’était pas toujours la meilleure voie. »
Un temps de réflexion
En plein cœur de la pandémie, il raconte avoir perdu son appartement et avoir décidé de prendre un temps de recul dans sa famille, en Beauce. Il a travaillé comme greffier et conseiller juridique pour la Ville de Beauceville. L’avocat parle d’un saut dans le vide. Il n’avait pas d’idée précise de ce qu’il ferait ensuite, mais savait déjà qu’il ne ferait pas de litige.
Après une année de réflexion, il a décidé de lancer sa pratique autonome. Dans le même temps, il a appris qu’un poste à temps partiel comme conseiller juridique était à combler à l’Ordre professionnel des sexologues du Québec. Me Pouliot a obtenu le poste, qu’il continue d’occuper aujourd’hui tout en travaillant comme avocat indépendant.
En tant que conseiller juridique, il répond aux questions déontologiques des sexologues, crée des formations, des chroniques déontologiques, des guides de pratique. Il est aussi responsable de l’usurpation de titres et de l’exercice illégal et s’occupe de la rédaction des règlements de l’Ordre. Il conseille par ailleurs l’Ordre sur tout aspect juridique pertinent, et est appelé à le représenter auprès de différentes instances.
Il évoque par exemple la question de la grossesse pour autrui. « Des séances d’information devront être données par les membres de quatre ordres professionnels dont les sexologues, et on est en train de monter cette formation ».
Un cabinet en solo
Il a fondé son cabinet, qui porte son nom, en avril 2021. « Dès le départ, j’ai voulu faire un ‘statement’ très clair en ne faisant pas du tout de litige. Donc je fais du conseil, de la négociation, du droit collaboratif, de la médiation, du conseil aussi pour des familles à plus de deux parents, ou des grossesses pour autrui. J’ai une certaine clientèle LGBT, ce que j’apprécie particulièrement parce qu’il y a des enjeux différents, ne serait-ce que la sensibilité avec l’utilisation des termes, etc. »
D’anciens collègues avec qui il a travaillé le réfèrent, ainsi que des clients.
Me Pouliot souhaite toutefois être clair: « Je ne prétends pas que mon approche est une panacée pour régler tous les dossiers. Des procédures judiciaires demeurent nécessaires et importantes dans plusieurs situations, incluant en matière de violence. Je souhaite seulement offrir une alternative viable aux tribunaux, pour les situations qui s’y prêtent ».
Il aime travailler à son compte, car cela lui permet d’aligner sa carrière sur ce qu’il a envie de faire. « J'ai rédigé un mémoire sur le projet de loi numéro 2, la réforme du droit de la famille, et j’ai pu libérer du temps dans mon horaire pour le faire sans penser aux heures facturables », précise-t-il par exemple, ajoutant qu’il prend aussi du temps pour faire du bénévolat.
Depuis septembre 2023, Me Pouliot est par ailleurs chargé d’enseignement à l’Université Laval, au certificat de santé sexuelle où il donne un cours baptisé « Pratique et enjeux en santé sexuelle ».
Se distinguer comme leader de demain est une fierté pour l’avocat, qui ne s’y attendait pas du tout et en a même pleuré. « Je n’ai pas plaidé devant la Cour suprême! » pointe-t-il. Pour lui, cela montre que « ce qui se fait à échelle plus humaine est aussi reconnu ».
Me Pouliot rappelle que les enjeux juridiques sont « rarement juste juridiques ».
« En droit de la famille, c’est presque jamais, souligne-t-il. Mais la première personne qu’on va voir, c’est un avocat ou une avocate alors qu’il y a une panoplie d’autres professions, d’autres disciplines, qui ont une vision du conflit. C’est un peu ce qui m’a frappé quand je suis arrivé en droit, je trouvais ça très juridique mais je me demandais si on avait bien posé toutes les questions, compris les dynamiques familiales, abordé l’aspect de la violence. Tous ces aspects ont énormément d’impact sur la stratégie juridique et je trouve qu’on ne fait pas assez de place à cela. »