Amenez-en des constats!
Camile Laurin-desjardins
2020-10-05 15:00:00
L’avocat juge que les télémandats que les policiers pourront désormais obtenir pour entrer dans les maisons en zone rouge, s’ils jugent qu’un rassemblement s’y déroule, sont carrément illégaux. Il s’attend d’ailleurs à une multiplication de contestations des constats d’infraction qui seront ainsi délivrés…
Mais, encore plus important selon lui, le gouvernement se doit d’être plus transparent. Droit-inc s’est entretenu avec lui.
Pourquoi cette question vous interpelle-t-elle autant?
Moi, je suis un avocat qui conteste régulièrement des mandats de perquisition, y compris des mandats d'entrée, etc.
Je suis aussi l'avocat qui, en 2011, avait contesté la constitutionnalité de la Loi sur la police, en disant que cette loi devait être interprétée d'une certaine façon pour conférer certains pouvoirs, vu l'existence des chartes des droits et libertés. On avait eu un débat avec le Procureur général : est-ce que la police a le droit d'enquêter, et dans quelles mesures, sur un citoyen…? Je voulais faire contrôler le devoir de l'État d'enquêter.
On se retrouve un peu dans la même situation... J'ai un gouvernement qui dit qu'un policier, sur la base de soupçons – et c'est important ici, on ne parle même pas de « soupçons raisonnables »... En disant soupçon, on abaisse la barre des motifs raisonnables et probables de croire qu'une infraction a été commise.
On est vraiment au minimum... On est près de l'intuition. Parce qu'un soupçon qui n’est pas raisonnable, c'est une intuition.
Donc on demande à des policiers de violer la principale garantie constitutionnelle canadienne d'inviolabilité du domicile, basé sur une intuition ou des soupçons. Ça pose des problèmes majeurs.
Et pourquoi les mandats obtenus dans de telles circonstances seraient illégaux, selon vous?
On a un gouvernement provincial, qui agit en vertu d'une loi sur la santé publique, en vertu de l'article 123; c'est un droit d'ordonner certaines mesures sanitaires. Pour s'assurer de son respect, à l'article 139 de cette loi, on dit qu'on pourrait, en cas de refus d'un ordre, donner un constat d'infraction.
Un constat d'infraction, les mots le disent, mais les gens n'y portent pas attention : c'est le constat d'une infraction. Et là, on parle d'une infraction à une loi provinciale, on n'est pas en matière criminelle, et on n'est pas en matière d'une loi fédérale.
Le régime du Code criminel s'applique par principe au Code criminel et aux lois fédérales, et des fois, par certains renvois, on applique des règles de preuve, comme le Code de procédure pénale le fait, mais c'est pour des règles de preuves.
Le régime qui est prévu dans le code de procédure pénale ne prévoit RIEN pour un mandat d'entrer pour une arrestation.
Pourquoi? Parce que le code de procédures pénales, les arrestations qui y sont prévues, c'est des arrestations jusqu'à tout récemment, interprétées par les tribunaux, qui visaient à identifier une personne.
Il y a eu certains élargissements, mais ça demeure quand même fondamental.
Donc, on demande à des policiers qui soupçonnent, sur une intuition, d'entrer dans une résidence ou de parfaire leur enquête, c’est-à-dire de violer l'inviolabilité de la résidence, mais aussi du terrain de cette résidence. Et non pas pour signifier un constat d'infraction à quelqu'un qui refuse de s'identifier, mais pour enquêter.
Tout ça ne peut pas être plus illégal.
C'est pour ça que je demande au gouvernement d'expliquer et de rendre public en vertu de quoi, de quelle loi, on pourrait prétendre qu'un mandat pourrait être émis...
L'heure est un peu grave. Je n'aime pas un système de droit qui se donne des pouvoirs aussi importants sans aucune transparence, sans aucune justification, dans la confusion totale. Sans invoquer une source précise, un droit d'agir, en vertu d'une source législative...
Donc ça ouvre la porte à une flopée de contestations, selon vous?
Complètement. Et surtout, d'abus. Contester, c'est une chose, c'est a posteriori. En attendant, ça va être des abus, et on laisse ça au jugement de tous et chacun, et je pense que ça va vraiment poser problème.
Et vous pensez que vous auriez des bonnes chances de gagner une contestation, devant la cour?
Absolument. Et c'est très rare, en droit criminel, qu'on peut dire à quelqu'un que les chances de gagner sont excellentes...
Vous invitez carrément les gens qui seraient visés par un tel mandat à vous contacter?
Absolument, avec plaisir, si tel est leur désir...
Ça devient vraiment un problème. Parce qu'il faut se rappeler que l'infraction, ce n'est pas d'avoir la COVID et de risquer de la transmettre... il n'y a pas d'infraction par rapport à ça.
Les infractions, c'est sur des mesures sanitaires. Et souvent, on confond les deux. On dirait qu'on a perdu toute distinction élémentaire. Ça serait important de le rappeler!
Parce qu'on ne sait pas si la personne en question a la COVID…
Exactement. La question qui serait intéressante, c'est s'il y avait un cas avéré de COVID, qui fait un party chez lui... Là, est-ce qu'un policier ne pourrait pas dire, à l'invitation du gouvernement, qu'il va essayer de faire un test case?
À ce moment-là, on pourrait y voir un risque sur la vie et la santé. Et d'après moi, ce risque-là est tellement hypothétique qu'il ne va jamais rencontrer les exigences constitutionnelles. Parce que tenir un tel discours et tenir les commerces ou les écoles ouverts... ça ne ferait aucun sens. Si on veut criminaliser l'état d'avoir la covid et d'être un danger public, il faut le dire autrement.
Si on veut faire un parallèle, ça serait comme de dire que toute personne qui consomme de l'alcool et qui possède une voiture est susceptible de commettre une faculté affaiblie causant la mort.
Logiquement, il y a un manque de rationalité entre les deux. ça deviendrait impossible à soutenir comme argument. On ne rencontre pas l'exigence de l'urgence ou du risque pour la vie ou la santé.
Anonyme
il y a 4 ans«On se retrouve un peu dans la même situation... J'ai un gouvernement qui dit qu'un policier, sur la base de soupçons – et c'est important ici, on ne parle même pas de « soupçons raisonnables »... En disant soupçon, on abaisse la barre des motifs raisonnables et probables de croire qu'une infraction a été commise.»
«Le régime qui est prévu dans le code de procédure pénale ne prévoit RIEN pour un mandat d'entrer pour une arrestation.»
«C'est pour ça que je demande au gouvernement d'expliquer et de rendre public en vertu de quoi, de quelle loi, on pourrait prétendre qu'un mandat pourrait être émis...»
Franchement Me Bergevin devrait s'informer avant d'écrire n'importe quoi. Le mandat d'entrée est maintenant prévu aux articles 94.1 et suivants CPP mais dans cette situation c'est le nouveau mandat général qui s'applique (art. 141.1 et suivants CPP) et il est question de motifs raisonnables.
Loi visant principalement à favoriser l’efficacité de la justice pénale et à établir les modalités d’intervention de la Cour du Québec dans un pourvoi en appel Projet de loi n° 32 (2020, chapitre 12).
Anonyme
il y a 4 ansSortons le popocorn et regardons les échanges !
Mk
il y a 4 ansUn avocat qui se fait remettre à sa place par une simple parajuriste??? Il devrait se rétracté!!! Franchement, on apprend sa en technique ou dans un cours de recherche de première année de bac de faire une simple recherche juridique... Ça montre comment nous les parajuriste on est essentielles.... Rien nous échappe!!!
Anonyme
il y a 4 ansIl est bien dans les patates ce Me Bergevin!