Le juge Wagner s’inquiète de la pénurie de magistrats
Radio -Canada
2023-05-11 12:00:00
C’est l’avertissement que vient de lancer le juge en chef de la Cour suprême du Canada, Richard Wagner, au premier ministre Justin Trudeau dans une lettre datée du 3 mai et dont Radio-Canada a obtenu copie.
Faisant part de sa « très grande inquiétude » au sujet de la pénurie de juges au pays, Richard Wagner dénonce le fait que 85 postes de juge de cours fédérales sur environ 1200 sont actuellement vacants. Plusieurs tribunaux du pays fonctionnent couramment avec 10 ou 15 % de postes de juge vacants qui prennent souvent des mois, sinon plus d’une année, à être comblés, dit-il.
Le juge en chef du Canada affirme que la confiance des Canadiens non seulement envers le système de justice, mais aussi envers toutes les institutions démocratiques est en jeu. De plus en plus de procès criminels et de causes au civil courent ainsi le risque de dérailler ou de s’enliser, selon lui.
« La situation actuelle est intenable et je crains qu'elle ne résulte en une crise pour notre système de justice, qui fait déjà face à de multiples défis. L'accès à la justice et la santé de nos institutions démocratiques sont en péril », mentionne-t-il.
Richard Wagner s’est déjà exprimé sur la fragilité des systèmes démocratiques en raison de la montée du populisme dans le monde. Cette nouvelle missive s’adresse directement au premier ministre et à son équipe, notant au passage que le ministre de la Justice du Canada, David Lametti, déploie déjà les efforts nécessaires pour pallier la pénurie de juges.
« Il est impératif que le Cabinet du premier ministre accorde à cette question l’importance qu’elle mérite et que les nominations soient faites en temps opportun », écrit le juge en chef.
Juge en chef de la Cour suprême depuis 2017, Richard Wagner signe sa lettre en tant que juge en chef du Canada et président du Conseil canadien de la magistrature.
« L’inertie du gouvernement quant aux postes vacants et l'absence d'explications satisfaisantes pour ces retards sont déconcertantes », déplore-t-il.
L’impact de l’arrêt Jordan
Depuis la décision de la Cour suprême en 2016 connue sous le nom d’arrêt Jordan, les tribunaux doivent traiter les accusations pénales dans un délai de 30 mois, à moins de circonstances exceptionnelles.
Dans sa lettre, le juge en chef Wagner explique à Justin Trudeau que des juges se voient de plus en plus souvent obligés de favoriser certaines causes au détriment d’affaires qui devraient néanmoins être entendues.
« Malgré tous leurs efforts, des arrêts de procédure sont prononcés contre des individus accusés de crimes graves, comme des agressions sexuelles ou des meurtres, en raison de délais dus, en partie ou en totalité, à une pénurie de juges », explique-t-il.
En Alberta, par exemple, près du quart des affaires pénales dépassent le délai de 30 mois, en grande majorité pour des crimes « graves et violents », selon le juge en chef Wagner.
Le danger, croît le juge en chef, c’est que de telles situations suscitent la colère et nourrissent le « cynisme» au sein de la population.
« Nous craignons sérieusement que, sans des efforts concrets pour remédier à la situation, nous atteignions très bientôt un point de non-retour dans plusieurs juridictions. Les conséquences feront les manchettes et seront graves pour notre démocratie et l'ensemble des Canadiens et Canadiennes », dit-il.
Anonyme
il y a un an...Trudeau va certainement trouver parmis eux des génies qu'il ne trouve pas en ce moment.