Entre fraude et incendie
Daphnée Hacker-B.
2015-06-04 14:15:00
En entrevue avec Droit-inc, le comptable raconte que l’« audit classique », ça n’a jamais été son truc. À ses débuts de carrère à la firme Deloitte, il a rapidement bifurqué vers les enquêtes de fraude et la quantification de préjudices économiques dans des situations de litige commercial. Il a d’ailleurs agi à plusieurs reprises comme témoin expert lors de procès. « J’aime faire la lumière sur les évènements et rendre les chiffres accessibles et compréhensibles pour le juge », explique-t-il.
M. David a ainsi développé sa pratique autour des réclamations d’assurance pour malhonnêteté d’employés. Depuis 15 ans, toutefois, il consacre une plus grande partie de son temps aux réclamations d’assurance liées aux interruptions d’affaires. Ces interruptions sont très souvent causées par de graves incendies, qui font parfois disparaître en quelques heures des millions de dollars de matériel. Le juricomptable et son équipe ont alors le mandat d’évaluer l’ensemble des pertes, et de calculer le profit perdu durant la période d’interruption.
La crise du verglas
Bien qu’il traite surtout des dossiers liés aux incendies, c’est ironiquement l’eau (glacée !) qui lui a fait découvrir ce pan du métier. Tout a commencé en 1998, lors de la crise du verglas. « Il y avait tellement d’entreprises touchées, certaines ont dû suspendre leurs activités durant des semaines, d’autres ont subi de lourdes pertes… on ne savait plus où donner de la tête tellement il y avait de travail ! », se remémore-t-il.
À force de traiter ce genre de dossier, le juricomptable affirme avoir eu la « piqûre » pour ce type de mandat. Il a ainsi développé une expertise pointue en évaluation des interruptions d’affaires, ce qui l’a entraîné vers la firme de juricomptabilité LBC International.
Durant 13 ans à LBC, il a notamment appris qu’il faut être patient avant de pouvoir compléter un dossier. Avant que les parties s’entendent sur un quantum final, parfois plus d’un an et demi peut passer…« C’est important de prendre son temps pour bien faire les choses, peu importe si le client est l’assureur ou l’assuré, il faut être certain de bien comprendre dans quel état était l’entreprise avant le sinistre », explique-t-il. Pour bien cerner ces détails, le juricomptable doit comprendre les fins rouages du secteur d’activité.
Traquer les malhonnêtes
Bien comprendre les détails du fonctionnement d’une entreprise, c’est un atout majeur pour mener des enquêtes de fraudes. Au fil des années, M. David a pris goût au fait de jouer les détectives. « Je suis toujours surpris de voir à quel point certains employés font preuve de créativité pour arriver à leur fin », dit-il. Selon l’expert, aucun secteur n’est à l’abri d’un employé malhonnête, que ce soit dans le secteur manufacturier, en distribution, en restauration, dans le domaine scolaire… Il en a vu de toutes les couleurs.
Fait inusité, il traque de plus en plus de femmes. « Avant, tous les dossiers de fraude que j’ai eus étaient liés à un homme, mais en l’espace de quatre ou cinq ans, cette donne a complètement changé. Maintenant j’ai autant de cas des deux sexes », explique-t-il. Comme quoi l’égalité homme femme, « c’est à tous les niveaux », dit-il avec un clin d’oeil.
Alain David a été un des premiers employés de la firme Accuracy Canada. Il a été recruté en 2011 par la juricomptabale Guylaine Leclerc, nommée récemment vérificatrice générale du Québec.
À titre de vice-président, il est appelé à former la relève. « J’aime beaucoup travailler avec les plus jeunes, je les amène sur le terrain. Je leur explique l’importance d’aller à la rencontre du client, de visiter les lieux. » Offrir un bon service client, c’est aussi important que de bien manier les chiffres, conclut-il.