La justice refuse de rejeter la poursuite d’un homme d’affaires contre Twitter
Radio -Canada
2021-12-13 13:13:00
Le fondateur de Lionsgate Entertainment, le milliardaire Frank Giustra, dit que les tweets, qui l’associent à des théories de complots concernant Bill et Hillary Clinton, entachent sa réputation.
Le géant des médias sociaux a fait valoir qu’un juge d’un de la Cour suprême de la Colombie-Britannique a erré lorsqu’il a jugé que la cause de Frank Giustra devrait être entendue en Colombie-Britannique, et non pas en Californie, où Twitter a ses quartiers généraux, et où M. Giustra possède une maison.
Toutefois, dans une décision unanime, la Cour la plus élevée de la province s’est alignée avec le juge Elliott Myers, qui a déclaré que la Colombie-Britannique est l’endroit approprié pour cette cause en raison de la « réputation significative » de M. Giustra ici, ainsi que puisque plus d’un demi-million d’utilisateurs de Twitter britanno-colombiens auraient pu avoir vu les micromessages en question.
Dans une déclaration écrite à CBC, Frank Giustra se dit satisfait de la décision. Il ajoute avoir a hâte de « poursuivre cette cause en Colombie-Britannique, enfin. »
« J’espère toujours que cette cause aidera à conscientiser les gens sur les torts qui peuvent avoir lieu lorsque les réseaux sociaux ne sont pas traités comme étant responsables des contenus publiés sur leurs sites », dit M. Giustra.
« Une théorie de complot erronée, invalidée et malicieuse »
Frank Giustra a amassé sa fortune en travaillant dans les secteurs financiers et de ressources naturelles. L’entreprise Lionsgate Entertainment, qu’il a fondée, est l’un des plus grands créateurs de films indépendants. Le philanthrope est également membre des Ordres du Canada et de la Colombie-Britannique.
Il a déposé la poursuite en diffamation en avril 2019 en vue de contraindre Twitter d'enlever les tweets qui laissaient entendre qu’il était « corrompu et criminel ».
Il a dit qu’il a été la cible d’un groupe qui l’a diabolisé pour « des raisons politiques » en lien avec les élections américaines de 2016, puisqu’il soutenait la Fondation Clinton.
Les messages offensants incluent, selon sa poursuite, des menaces de mort et des liens avec la théorie du complot dénommée « pizzagate », qu’il décrit comme étant une « théorie de complot erronée, invalidée, et malicieuse dans laquelle [M. Giustra] a été qualifié de "pédophile" ».
Twitter a tenté de faire rejeter la poursuite pour des questions de juridiction.
L’entreprise a accusé M. Giustra de profiter de ses racines canadiennes pour déposer la plainte au Canada, puisqu'aux États-Unis il aurait beaucoup moins de chance de réussir, en raison des protections de la liberté d’expression garanties par le Premier amendement.
Selon Twitter, la Colombie-Britannique a peu de liens avec cette cause, puisque Frank Giustra passe beaucoup de son temps aux États-Unis, y possède plusieurs propriétés et est fortement impliqué dans l’industrie du divertissement.
Les micromessages en question, dit Twitter, ont été majoritairement publiés et lus par des Américains.
Un problème non dit
Au début de leur décision, les juges de la Cour d’appel ont abordé ce qu’ils affirment être un problème non dit : les lois américaines protégeant la liberté d’expression qui pourraient entraver les efforts de Frank Giustra de plaider sa cause.
« Sous la loi américaine, n’importe quelle cause contre Twitter pour diffamation est vouée à l’échec », a écrit le juge Christopher Grauer, au nom des juges de la Cour d’appel.
« De plus, n’importe quel jugement concernant la diffamation obtenu contre Twitter ailleurs ne sera pas appliqué par les cours californiennes ni par les autres juridictions américaines. »
Malgré cela, la cause devant la Cour canadienne n’est pas « un exercice sans but, parce que M. Giustra aurait au moins l’occasion d’obtenir un jugement qui rétablirait sa réputation, ce qui lui est refusé d’emblée en Californie », a dit le juge Grauer.
Les documents présentés à la cour incluent une lettre que Frank Giustra a envoyée en avril 2018 au PDG de Twitter de l'époque, Jack Dorsey.
« En tant que PDG de Twitter, je vous demande d’enquêter sur la source de ces attaques prolongées contre moi, à savoir si elles proviennent d’individus, de groupes, de robots, ou d’une combinaison de tous les trois », a-t-il écrit.
« Je ne veux pas fermer mon compte Twitter, puisque cela serait une victoire pour ceux qui transforment cet outil de communication formidable en plateforme de diffamation et de haine. »