Les robots menacent-ils votre emploi?

Emeline Magnier
2015-01-13 15:00:00

Si le tableau dressé n'est pas très réjouissant, il n'est pas pour autant complet : une autre menace pèserait sur l'économie de l'industrie juridique. D'ici 2030, des robots dotés de processeurs d'intelligence artificielle seraient capables d'exécuter le travail accompli par de jeunes avocats. C'est ce que rapporte une étude effectuée par Jomati Consultant, un cabinet de conseil juridique établi à Londres - et rapporté par Usine digitale- intitulée « Civilisation 2030 : le futur proche des sociétés juridiques ».
Ces machines « ne ressentiront pas la fatigue, ne chercheront pas à avoir de l'avancement, elles ne demanderont pas d'augmentation de salaire. Le prix des tâches juridiques qu'elles accompliront baissera rapidement » tandis que « le nombre d'avocats que les cabinets embaucheront diminuera fortement », peut-on lire dans le rapport.
Prévision alarmiste ou futur inéluctable ? Me Jean-François De Rico penche plutôt pour la seconde option et n'est pas étonné de cette prévision. « Une partie de la technologie est déjà accessible, c'est donc possible et réaliste; l'intelligence artificielle va prendre une place grandissante », considère l'associé du cabinet Langlois Kronström Desjardins, spécialisé en droit des technologies de l'information.
Certaines firmes américaines, comme Neota Logic, ont déjà développé des logiciels performants à destination des contentieux d'entreprises et cabinets d'avocats. Ils permettent de croiser des informations issues de la jurisprudence et des textes législatifs pour répondre à une question juridique précise grâce à une base de données et à un questionnaire détaillé complété par l'utilisateur, ajoute Me De Rico. « La réponse est livrée de la même façon que si c'était un avocat qui avait effectué la recherche. »
Recherche et analyse

Des domaines tels que le droit fiscal ou le droit du travail, - quand il s'agit par exemple de calculer un délai congé ou une indemnité de licenciement - pourraient être visés. « Cela pourrait même être plus large et aller jusqu'à l'analyse de risque et l'estimation en pourcentage des chances de succès d'une cause.»
Me Johanne Brodeur est quant à elle plus réservée. « L'évolution de la technologie est inévitable mais je ne pense pas qu'elle permettra de dépasser le stade de l'information et de la recherche juridique », indique l'ancienne bâtonnière du Québec.
La diffusion d'opinion juridique et la relation avec le client requiert un aspect humain qui ne saurait être robotisé, considère-t-elle. « Le droit a un volet technique et analytique mais c'est aussi une sciences humaine. »
Elle cite en exemple la notion de l'intérêt de l'enfant, omniprésente dans les dossiers de droit de la famille. « Une machine ne peut pas tenir compte de toutes les nuances applicables et analyser les différents rapports des psychologues.»
Redéfinition des tâches

« Nous aurons besoin de moins d'avocats pour faire des recherches mais de plus d'avocats pour faire de l'analyse, ils devront passer à des tâches plus spécialisées, indique Me Brodeur. Quand les secrétaires ont vu arriver les dactylographes électroniques et les ordinateurs, elles ont cru qu'on aurait plus besoin d'elles et ce n'est pas arrivé ; leur travail a simplement évolué.»
Au contraire, l'intelligence artificielle pourrait même être créatrice d'emploi dans l'industrie juridique. « La catégorisation qui permettra aux robots de fonctionner nécessite une intervention humaine pour les alimenter et déterminer les paramètres à utiliser. Il y aura donc de nouvelles perspectives d'embauche », souligne Me De Rico.
Il ajoute que cette technologie ouvre une fenêtre supplémentaire vers l'accessibilité à la justice pour les citoyens. « Les avocats vont s’affranchir du travail de volume et le coût des services va diminuer d’autant.»
À une époque où le wifi n'est pas disponible dans tous les palais de justice et où il est impossible de déposer une preuve électroniquement à la cour, l'ancienne bâtonnière souligne le clivage existant entre l'informatisation de la justice et le recours grandissant à la technologie dans la pratique. « Nous avons deux systèmes issus de deux millénaires différents. Il y a un méchant coup de barre à donner pour informatiser la justice et avec le contexte d'austérité, on ne peut espérer d'amélioration dans les cinq prochaines années même si on est en retard sur ce qui existe déjà en Angleterre et en France », déplore-t-elle.
Adam Beauregard
il y a 10 ansJe suis d'accord que l'évolution des technologies de l'information fait en sorte que plusieurs recherches pourront s'effectuer via des ordinateurs (et pas des robots, lol!).
Toutefois, l'absence de jurisprudence sur certaine question oblige les juristes à raisonner par analogie. Les ordinateurs y arriveront-ils? L'ordinateur ne sera pas plus intelligent que la programmation...
De plus, et tel que l'indique l'article, il y a un côté humain important dans les rapports avec les clients, mais aussi dans l'interprétation de certains éléments qui échappent aux ordinateurs: le sentiment de justice, le bon sens et le traitement des émotions.
Je ne crois pas qu'un ordinateur va remplacer des étudiants, stagiaires et jeunes avocats.
La même question peut se poser pour la médecine.
Mon opinion.