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Rencontre avec l’analyste juridique des Jeux Olympiques

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Audrey Bonaque

2021-07-28 15:00:00

Un avocat devient analyste juridique pour Radio-Canada durant les Jeux olympiques et paralympiques de Tokyo 2020...
Me Benoit Girardin. Source  : Shutterstock et site web de LBB Stratégies
Me Benoit Girardin. Source : Shutterstock et site web de LBB Stratégies
Me Benoit Girardin a été nommé analyste en droit du sport pour Radio-Canada/CBC pour les Jeux olympiques et paralympiques de Tokyo 2020.

L’avocat spécialisé en droit du sport commente les actualités et les affaires juridiques durant la télédiffusion de l'événement du 23 au 8 août sur la chaîne Radio-Canada/CBC. Il sera aussi ombudsman avec Me Adam Klevinas aux Jeux Paralympiques à Tokyo du 24 août au 5 septembre.

Professeur en droit du sport à l’Université McGill, l’Université d’Ottawa et à l’Université de Montréal, il est le président fondateur du cabinet boutique LBB Stratégies depuis plus de 20 ans.

Il travaille sur des dossiers touchant le sport olympique, paralympique et professionnel. Il représente des athlètes et des fédérations devant les tribunaux canadiens, les fédérations internationales et le Tribunal international Arbitral du Sport (TAS).

À ses huitièmes Jeux Olympiques, il nous raconte son parcours et les dossiers à surveiller à Tokyo.

Pourquoi avoir choisi de vous spécialiser dans le droit du sport ?

J’ai eu un baccalauréat en éducation physique et une licence en droit à l’Université d’Ottawa. Plus jeune, j’ai joué au tennis jusqu’à un haut niveau puis j’ai eu une pré-carrière dans le sport à titre d’entraîneur de tennis d’athlètes professionnels du niveau provincial à national.

Lorsque je suis entrée en droit, j'ai tout de suite tenté d'appliquer mes connaissances et enseignements au sport. Après avoir terminé mon Barreau, j’ai fait mon stage chez Bélanger Sauvé à Montréal. Puis, j’ai été embauché en droit civil et commercial au cabinet Prévost Fortin D’Aoust à Saint-Jérôme.

Comment avez-vous réussi à vous spécialiser ?

Un jour, j’étais à mon bureau d’avocats et j’ai lu un article écrit par un ministre fédéral qui voulait intervenir dans une affaire sportive. Le Ministre prenait parti pour l'athlète et non la fédération. J’ai alors écrit une lettre pour lui proposer de créer un mécanisme neutre et indépendant pour régler les conflits dans le sport comme le TAS aux Olympiques.

Quelques semaines plus tard, il m’a proposé de le rencontrer et de faire une étude nationale sur les mécanismes de règlement des différends dans le sport. Après avoir fait une consultation nationale, mon rapport a été déposé. Un an plus tard, le Ministre m’a proposé de créer un tribunal arbitral du sport grâce au financement du fédéral.

Après plusieurs années, je suis devenu premier directeur général et fondateur du Tribunal arbitral du sport canadien qui s’appelle le Centre de règlement des différends sportifs du Canada et de quitter la « pratique traditionnelle du droit ». De là l’aventure olympique et professionnelle a commencé.

Comment vous êtes vous fait une place dans le milieu ?

J’ai participé à pratiquement tous les Jeux à titre d’avocat, ombudsman et représentant du tribunal depuis les jeux olympiques de Sydney jusqu’aux jeux olympiques de sotchi.

Cela m’a permis de rencontrer différents acteurs du domaine. J’ai traité plus de 300 cas de dopage, de sélection, d’affaires, de commandites reliés aux sports fédérés, aux jeux olympiques et paralympiques.

Après avoir fait mon parcours avec le Centre de règlement des différends sportifs du Canada (CRDSC), je suis revenu à la pratique privée et j’ai fondé LLB Stratégies qui est maintenant un bureau boutique spécialisé uniquement en droit du sport.

Nos clients sont des équipes de sport professionnelles, des fédérations nationales et internationales, le Comité International Olympique (CIO) et des grandes organisations d’évènements sportifs.

Le cabinet accompagne aussi plusieurs organisations sportives sur leur plan stratégique notamment dans l’organisation de grands événements sportifs avec les infrastructures, les municipalités etc.

Comment se déroule le travail des avocats durant les J.O ?

En tant qu’avocat, on rencontre différentes situations et on doit régler toutes les affaires juridiques. Parfois, on doit négocier avec les autorités policières locales.

Au cours de ma carrière, j’ai déjà plaidé trois fois devant le TAS.

Lors des audiences du tribunal, les arbitres entendent d’une manière expéditive les cas liés aux J.O. et doivent rendre une décision dans les 24 heures suivantes. Car si un athlète a un problème juridique et doit compétitionner le lendemain, on ne peut pas retarder le début de la compétition.

Par exemple, à Tokyo, il y a une dizaine d'avocats qui se sont installés dans un hôtel pendant toute la durée de l'événement. Aussi, il y a quatre firmes d’avocats japonaises qui sont prêtes 24h sur 24 et 7 jours sur 7 pour nous aider à préparer un dossier et écrire un petit mémoire rapidement. Ces bureaux d’avocats locaux sont là pour nous aider sur des dossiers criminels pour lesquels on n’a pas le droit de représentation.

Quand on plaide devant le TAS, on a peu de temps. Je me souviens qu’une année, j’ai même plaidé en habit « Team Canada ». On n’est pas en veston cravate. Pour un autre cas, on a plaidé entre minuit et quatre heures du matin pour que la décision soit rendue avant 10h le lendemain. Les trois arbitres ont écrit 22 pages de décision en seulement quelques heures.

Quels sont les défis que rencontrent les avocats durant les J.O. ?

Il faut construire un bon mémoire en peu de temps. Par exemple, l’athlète accusé par l'agence antidopage a droit à une défense. Rapidement, à titre d’avocat, on doit préparer un dossier en quelques heures et démontrer que la personne n’a pas agi intentionnellement pour se doper.

De plus, on doit rencontrer l’athlète et comprendre la situation. En dopage, il faut démonter « Comment la substance interdite s’est retrouvée dans le corps ? ». C’est l’un des fardeaux de preuves importants en matière de dopage. L’arbitre peut croire l’athlète à condition qu’il y ait une raison suffisante qui explique comment cette substance s’est retrouvée dans son corps.

La majorité du travail se fait en amont. Il y a une multitude de sources juridiques à connaître comme les procédures et règles applicables, les règles sportives pour chaque fédération etc. Il faut bien connaître la charte olympique et les règles antidopage pour être prêt rapidement.

On est confronté à différents enjeux juridiques et on doit le faire en 24 heures. Cette année, il y a eu un premier cas d’une athlète d'haltérophilie qui avait consommé une substance interdite. C’est Me Patrice Brunet qui a rendu la décision récemment.

Quels sont les dossiers chauds à suivre cette année ?

Naturellement, il y a toujours les cas classiques des J.O. impliquant le dopage. Les athlètes sont testés régulièrement pour déceler une substance interdite dans leur corps.

Il y a des nouveaux cas apparus comme de corruption ou de manipulation des résultats. Récemment, l’organisme anticorruption de l'athlétisme Athletics Integrity Unit a disqualifié huit athlètes de différents pays.

Leur enquête a révélé qu’ils avaient manipulé les résultats, utilisé des instruments non fiables et ont falsifié des photos finales des évènements de qualifications pour les J.O.. Suite à cela, ils ont décidé qu’ils ne pouvaient pas participer aux jeux. L’athlète, qui est déjà aux jeux, pourrait contester la décision au TAS.

Aussi, on pourra retrouver des dossiers impliquant des athlètes de différentes nationalités. Lorsqu’un athlète a deux nationalités, il pourrait se voir empêcher de représenter le Canada ou un autre pays s’il n’a pas obtenu un relâchement de l’autre pays dont il a obtenu la nationalité depuis moins trois ans.

Quels sont les autres dossiers intéressants qui verront le jour ?

Cette année, le CIO a assoupli la règle de la charte olympique qui interdit aux athlètes de ne pas manifester pour une cause quelconque. Il y a quelques jours, les joueurs de soccer britanniques et américaines ont fait un geste de manifestation antiracisme.

Elles ont mis un genou au sol au moment où l'arbitre a sifflé le début du match alors qu’avant ce type de manifestation était interdit. Aujourd’hui, compte tenu de tous les enjeux de droits humains, le CIO permet qu’on manifeste dans certaines circonstances.

On peut porter plainte contre l’utilisation d’un équipement sportif jugé illégal. On parle ici de dopage mécanique. On conteste des aspects techniques. Par exemple, on pourrait alléguer qu’un athlète en cyclisme aurait un mécanisme sur son vélo qui lui permettrait d’aller plus vite ou qui lui allégerait son effort.

Les avocats peuvent traiter des dossiers non sportifs. Peut-être pas cette année, mais il y a eu plusieurs cas auparavant. Un athlète peut se retrouver après sa compétition dans un bar. Sous l’effet de l’alcool, il peut commettre un méfait ou un crime, se battre avec une autre personne ou se faire arrêter par la police.

Ce sont d’autres situations juridiques en dehors des jeux qui nécessitent des interventions et représentations de notre part. Il y a certaines affaires publiques et d’autres non. Nous, les avocats, sommes là pour ramener nos Canadiens et Canadiennes sains et saufs.

Cette année est assez particulière à cause de la Covid. Quels seront les nouveaux enjeux juridiques ?

Durant les présents jeux, nous pourrions voir des disqualifications ou l'inéligibilité des athlètes qui ont obtenu un test positif. Est-ce qu’on pourra contester la validité du test covid ? Ce sont probablement de nouveaux enjeux juridiques qui surgiront.

Pour le moment, il y eu des athlètes qui ont été disqualifiés et qui ont été renvoyés dans leur pays d'origine parce qu’ils ont été testés positif au covid. Mais, il n’y a pas eu de contestations judiciaires ou de dossiers au TAS.

Cette année, il y a un nouveau document « un playbook » qui rassemble les règles et mesures sanitaires à respecter en lien avec la covid uniquement. On doit rester attentif à ces règles car les athlètes peuvent enfreindre certaines règles.

Avez-vous d’autres choses à ajouter ?

Les avocats et les arbitres ne sont pas payés aux J.O même si toutes les dépenses sont payées. Aux J.O, les arbitres et avocats signent un engagement pour que tout se fasse pro-bono.

De plus, en raison de la pandémie, les affaires sont majoritairement traitées à distance. D’ailleurs, les audiences du TAS à Tokyo se font par visioconférence. Il est probable que j’aurai des cas en plein milieu de la nuit car je vais devoir les gérer depuis le Canada.

Merci beaucoup et bon succès pour ces J.O. !
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2 commentaires
  1. Lucie F.
    Lucie F.
    il y a 3 ans
    No one is watching
    Who cares about the Woke olympics, another good thing is down the drain. People watch sports and athleticism to relax and see the best in people, now it's just another political rally for craziness.

    • DSG
      not true
      Olympics always sucked. It consists of a bunch of crappy sports people normally never watch. The wokeness gone crazy added a flair of entertainment. I was actually looking forward to seeing that transgender guy from New Zealand compete against women in weightlifting and then watch people in the media debate it. You don't see that every day. But they did not show that.

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