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Victoire pour l’industrie du taxi!

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Radio-canada Et Cbc

2024-06-26 10:15:45

Les avocats représentant les demandeurs. Sources : Trudel Johnston & Lespérance, LinkedIn, Trivium et APCHQ
Les avocats représentant les demandeurs. Sources : Trudel Johnston & Lespérance, LinkedIn, Trivium et APCHQ
Québec devra verser plus de 143 millions $ à certains propriétaires de permis de taxi. Les avocats…


La Cour supérieure condamne le gouvernement du Québec à payer plus de 143 millions de dollars à certains propriétaires de permis de taxi qui ont vu la valeur de celui-ci dégringoler après l’arrivée d’Uber dans la province.

La décision survient dans le cadre d'une action collective autorisée en 2018.

Les avocats représentant les demandeurs sont Mes Bruce W. Johnston, Mathieu Charest-Beaudry et Lex Gill du cabinet Trudel Johnston & Lespérance. Mes Katherine Pelletier et Marc-Antoine Cloutier du Groupe Trivium et Mes Wilerne Bernard et Myriam Moussignac.

Les avocats représentant la défenderesse sont Mes Éric Cantin, Maryse Loranger et Sophie Bordeleau-Roy de chez Bernard Roy Justice.

L'argument principal de l'action collective est celui de l'expropriation déguisée, c'est-à-dire que la déréglementation de Québec dans l'industrie du taxi a eu pour effet de déposséder les membres du groupe d'un bien, en l'occurrence leur permis de propriétaire de taxi.

En 2019, le gouvernement a adopté une loi abolissant le système de permis, assouplissant en même temps d'autres réglementations. Et même si le gouvernement a indemnisé les titulaires de permis, leurs avocats affirmaient que bon nombre d'entre eux avaient reçu environ 150 000 $ de moins que la valeur marchande des permis avant l'arrivée d'Uber dans la province.

Après avoir étudié le dossier, le tribunal condamne Québec à payer aux membres de l'action collective la somme de 143 873 463 $, en plus des frais de justice et des intérêts à compter du 21 septembre 2016, date qui concorde avec le lancement du projet pilote du gouvernement provincial visant à légaliser les activités d'Uber au Québec.

Pour en arriver à cette somme, la Cour supérieure a calculé la valeur marchande des permis au 21 septembre 2016 – soit plus d'un milliard de dollars – et a soustrait les 873 millions de dollars déjà versés en compensations par Québec aux chauffeurs de taxi en vertu de programmes d'aide financière.

Si on additionne les indemnités ordonnées par la Cour supérieure aux programmes d'aide gouvernementaux, Québec aura versé plus d'un milliard de dollars (1 016 000 000 $) aux chauffeurs de taxi à cause des bouleversements provoqués par Uber.

Pour Me Bruce Johnston, avocat et cofondateur du cabinet TJL, qui mène l'action collective, les programmes d'aide de Québec étaient largement insuffisants pour dédommager les propriétaires de permis.

« Le cœur de l’action collective, c'était l’injustice flagrante dont ont été victimes les détenteurs de permis ». Ceux-ci « ont été dédommagés sur une base complètement insensée », c'est-à-dire sur « la base du prix qu’ils avaient payé pour leur permis », explique-t-il.

« Ce qui faisait en sorte que quelqu'un qui avait acheté son permis en 1976 pour 10 000 $ recevait la même chose pour son permis que quelqu’un qui l'avait acheté en 2013 pour 200 000 $; vingt fois plus que pour exactement le même bien », poursuit-il.

Avant qu'Uber ne vienne changer les règles du jeu, la valeur marchande des permis de propriétaire de taxi était entièrement soumise à la loi de l’offre et de la demande, lit-on dans le jugement.

« Les gens achetaient essentiellement le droit de participer à un monopole. Parce que la compétition était restreinte, il y avait une valeur à ça. (...) Les gens étaient en droit de s’attendre à ce que cette gestion de l’offre continue », soutient Me Johnston. Il donne en exemple des chauffeurs de taxi qui ont dû retarder leur retraite parce qu'ils comptaient vendre leur permis, mais dont les plans ont changé lorsque la valeur de ce dernier a fondu comme neige au soleil.

Des indemnités, mais pas de dommages punitifs

« C’est certainement une victoire historique, mais on n'a pas obtenu tout ce qu’on cherchait », notamment sur le plan des dommages punitifs, ajoute Me Johnston.

Les personnes admissibles auront en effet droit à une indemnité d'expropriation, mais elles sont inadmissibles aux dommages punitifs de 1000 $ par membre du groupe demandés par les requérants. Le tribunal juge que l'atteinte est involontaire et qu'en vertu de l’article 952 du Code civil du Québec, le gouvernement peut exproprier quelqu'un pour cause d'utilité publique, dans ce cas-ci le projet pilote encadrant les activités d'Uber.

Se qualifient à recevoir une indemnité toutes les personnes physiques ou morales titulaires d'un permis de propriétaire de taxi au Québec depuis le 28 octobre 2013, date à laquelle Uber s'est implanté dans la province, et dont le permis a été délivré pour la première fois antérieurement au 15 novembre 2000, soit avant que le gouvernement ne fixe un nombre maximal de permis par agglomération.

Les détails du versement des indemnités restent à être déterminés.

Et « ce n'est pas la fin » de cette affaire, « car il y a une autre action collective contre Uber », indique Me Johnston. « Ce qu’on n’a pas eu contre le gouvernement, c’est Uber qui va payer pour », explique-t-il.

Précisons que le jugement concerne spécifiquement la perte de valeur des permis de propriétaire de taxi, et non des permis de chauffeur de taxi ni des permis d'intermédiaire en services de transport de taxi (publicité, répartition des appels, etc.). Aux yeux de la cour, ces deux derniers permis sont des privilèges, et non des biens.

De son côté, le cabinet de la ministre des Transports, Geneviève Guilbault, a indiqué à Radio-Canada qu'il va prendre connaissance du jugement avant de faire des commentaires.

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