Notaire et...karatéka!
Céline Gobert
2018-11-15 15:00:00
Voilà ce qu’a appris Me Andrei Roman entre le premier et le deuxième degré (le «dan») de sa ceinture noire de karaté.
«Oui, il y a les échelons, la hiérarchie, mais le karaté est davantage une philosophie de vie, et moins une compétition qu’une famille. Sans la philosophie du karatéka, on peut couler son examen», explique à Droit-inc le notaire qui a commencé cet art martial japonais quand il avait 14 ans.
«À chaque nouveau degré, on doit écrire un essai sur la philosophie ou l’histoire du karaté, dit-t-il. Et plus on avance dans les degrés de ceintures, plus c’est la philosophie et les changements de vie que ça t’apporte qui comptent.»
À aujourd’hui 27 ans, il est clair que la pratique de ce sport a eu un effet plus que bénéfique sur sa carrière. Notamment parce qu’il a choisi l’une des branches les plus émotionnelles du notariat : la liquidation de successions.
«J’ai appris la patience, l’empathie, ce qui m’est utile avec ma clientèle, assure celui qui est devenue ceinture noire après six ans de pratique du «yoshukan», l’un des différents styles de karaté. Je n’ai pas de difficulté à expliquer trois, quatre fois quelque chose à un client qui est en deuil. Je suis là pour aider les gens.»
Le karaté lui permet en outre d’évacuer le stress. «Un esprit sain dans un corps sain», dit-il, précisant qu’à chaque début de cours il dépose métaphoriquement son «sac de pierres», symbole de son stress, à l’entrée du dojo.
«On change le mal de place. Si on laisse le stress à la porte, on le reprend toutefois quand on s’en va. Mais pendant le cours, tout ce qui compte c’est qu’on s’entraîne.»
Celui qui montre le chemin
De plus, Me Roman enseigne l’art martial japonais à de jeunes adultes. Il fut un temps où il avait même ouvert temporairement son propre dojo à Lasalle.
Au karaté, il est donc un « sensei »! Soit littéralement : celui qui est venu avant nous, celui qui montre le chemin, le professeur.
« Quand on est sensei, on doit être capable de vulgariser nos propos, de se mettre à la place de nos interlocuteurs. Et si on n’a pas compris un concept, on le voit tout de suite car on n’est incapable de l’enseigner.»
Pourtant, au départ, rien n’indiquait que Me Roman allait exceller dans cet art. Au point qu’aujourd’hui, en plus de pouvoir enfiler le «dogi» noir (couleur réservée à l’habit du karatéka ceinture noire), il est aussi capable de briser des planches à mains nues!
«Quand j’étais jeune, mes parents m’ont encouragé à aller au karaté même si j’avais peur. Au début, j’étais le plus maladroit du dojo! Je ne savais pas ce que je faisais, je ne tenais pas en équilibre sur une jambe!»
Mais l’esprit d’entraide et «de famille» de ses camarades de l’Association Yoshukan ainsi que le soutien de son professeur l’ont poussé à persévérer. «Comme le disait l’un de mes professeurs, on est un village ensemble, on se bâtit ensemble, brique par brique. Même si c’est un sport individuel, c’est un travail collectif.»
Et c’est ainsi que le jeune ado qu’il était n’a alors plus juré que par le karaté! Au point qu’il ne voulait même plus faire ses devoirs!
Mais voilà encore une chose positive qu’a apporté le karaté à Me Roman au fil des ans : mieux gérer son temps, et par extension mieux jongler avec de nombreux dossiers.
«J’ai aussi appris à mieux accepter la critique, ajoute-t-il. Je suis devenu capable de reconnaître qu’elle peut être constructive et positive. Ça m’a aidé à être plus mature, à comprendre les gens avec qui je travaille.»
Plus de solidarité
Quant aux combats à la Bruce Lee, et bien.. ce n’est pas ce que préfère Me Roman, qui passe pourtant de 5 heures en moyenne à 15 heures en période d’examen dans le dojo.
«Je crois que la meilleure défense, c’est le combat que l’on n’a pas besoin d’avoir», dit-il avec sagesse.
Cette philosophie, le notaire l’applique d’ailleurs aux relations avec ses confrères du milieu notarial, dans lequel il y a beaucoup de compétition.
«C’est la même chose du côté juridique. Si toute la communauté notariale se comporte de façon solidaire, on sera plus forts, dit-il. Mais ce n’est pas ce qui arrive tout le temps.»
À bon entendeur…