Le droit à la déconnexion au Québec?
Didier Bert
2022-06-21 10:15:00
Alors que le droit à la déconnexion est sur toutes les lèvres, est-ce bientôt le tour du Québec? C’est que depuis le 2 juin, en Ontario, les employeurs comptant 25 salariés et plus sont tenus d’avoir une politique écrite de déconnexion.
Cette législation, sans précédent en Amérique, ne concerne pas seulement les employeurs ontariens, avertit Me Marianne Plamondon, avocate associée chez Langlois à Montréal, spécialisée en droit du travail et de l’emploi.
« Les employeurs aiment avoir des politiques uniformes quand ils ont des sites dans différentes provinces », fait remarquer Me Plamondon, expliquant qu’il faut donc s’attendre à des répercussions au Québec. « Il y aura des politiques de déconnexion qui vont s’appliquer au Québec alors que ce n’est pas requis par la loi ici. »
Cette politique de déconnexion vise à permettre la déconnexion du travail, donc « de ne pas s’engager dans des communications liées au travail, incluant le courriel, le téléphone, les vidéoconférences, lors des périodes de repos, des lunchs, des congés fériés et des vacances » énumère l’avocate.
Cette politique doit être écrite, de manière à « s’assurer que les gens comprennent qu’ils ont le droit de se déconnecter durant les congés stipulés par la loi », poursuit Me Plamondon. Cette obligation est relative. « Les employeurs sont libres d’en mettre plus que moins. »
Dans certains secteurs d’activité, la culture de la déconnexion sera longue à implanter. « En finance et chez les professionnels, il n’y a jamais eu de droit à la déconnexion », constate l’avocate.
On peut s’attendre à ce que les employeurs créent des exemptions, quand les besoins de l’entreprise nécessitent que le travail soit fait. « Jusqu’où iront-les employeurs? Est-ce que ces politiques vont créer réellement un bienfait pour les employés? », interroge Me Marianne Plamondon. « Si on crée de nombreuses exemptions, on risque de revenir à la case départ. »
On peut toutefois envisager que les employés se sentent confortés pour rester déconnectés lors de leurs pauses et de leurs congés. « Ils pourront se dire qu’ils ont le droit de ne pas répondre, alors que jusqu’à présent, ils pouvaient être un peu mal à l’aise. »
L’avocate se dit surprise que cette initiative ait été prise d’abord en Ontario plutôt qu’au Québec. « On peut s’attendre à ce que le sujet soit abordé lors des prochaines élections », croit Me Marianne Plamondon.