La revanche du deuxième sexe
Céline Gobert
2012-01-30 15:00:00
Avant de se rattraper… « Bonjour à tous ! J’aperçois quelques hommes dans la salle », plaisante-elle.
Réunie autour du thème ''Les femmes d’action dans les postes de haute direction'', l’assemblée, majoritairement féminine il faut l’avouer, est venue entendre 4 conférencières, 4 femmes de pouvoir, dont le parcours- parfois atypique, parfois semé d’embûches, fut couronné de succès.
« Leur vision et expérience complémentaires font la richesse de cette conférence », annonce Me Latour.
Pour célébrer le 70ème anniversaire de l’accession des femmes au barreau : Me Chantal Châtelain, associée responsable du cabinet Langlois Kronström Desjardins, Me Kim Thomassin, associée directrice du cabinet McCarthy Tétrault, Me Pamela McGovern, avocate en chef d’Hydro-Québec et Me Pascale Pageau, présidente-fondatrice du cabinet Delegatus, se racontent devant une salle attentive, composée de prestigieuses figures du monde juridique.
Parmi elles, citons : la sénateur Céline Hervieux-Payette, l’honorable Louise Mailhot, ex-juge à la Cour d'appel du Québec, ou encore Lucie Nadeau, vice-présidente de la Commission des lésions professionnelles.
« De par notre métier, on a tendance à se montrer cartésiens, aujourd’hui nos discours seront plus humains, nous allons nous dévoiler, parler de nous… J’espère que les avocats et avocates présents sortiront avec quelques conseils à mettre dans leur livre de recettes », confiait Me Chantal Châtelain, avant le début de la conférence.
Au menu (justement), entre un potage aux légumes verts, un bœuf braisé et fumé à l’érable accompagné d'un gratin de pommes de terre, et un dôme à la framboise, il y aura quatre leçons de vie et un bilan : où en sommes-nous 70 ans plus tard?
Derrière l’humour
Le ton guilleret, maintenu tout du long par le quatuor féminin, cache cependant quelques réalités : un nombre de femmes en pratique qui diminue, des disparités salariales bien présentes, et des conseils d’administration essentiellement masculins.
« Être une femme est un atout. Les cabinets doivent s’adapter, c’est une réalité économique», déclare Kim Thomassin, associée directrice du cabinet McCarthy Tétrault, dont le parcours a nécessité autant de patience que de persévérance, d’humour que de psychologie.
« Croyez-moi, plaisante-t-elle, gérer des avocats relève parfois de la psychanalyse ! » Néanmoins, aujourd’hui, elle ne regrette rien. « Tous les jours, j’ai envie de faire ce que je fais », confie-t-elle. Son conseil aux femmes ? Ne jamais laisser tomber, et garder confiance.
A l’instar de Me Chantal Châtelain, associée responsable du cabinet Langlois Kronström Desjardins, seule universitaire d’une famille d’agriculteurs.
De la ferme au cabinet Langlois, elle ne cessa jamais de « croire en la force du groupe ».
« Leader ne veut pas dire boss, patron, directrice. Le leader n’a pas de fonction, d’âge, ni de sexe. C’est celui, ou celle, qui est capable de donner une direction aux objectifs communs », dit-elle.
Bien sûr, ce n’est pas sans difficulté, « no pain, no gain », précise-t-elle, mais si l’on parvient à suffisamment se démarquer, sans jamais faire preuve de négativisme, le succès est, à coup sûr, en bout de route.
« Si l’on vous donne un défi, prenez-le et gardez votre curiosité intellectuelle », conseille par ailleurs Me Pamela McGovern, avocate en chef d’Hydro-Québec, dont les 25 ans chez Lavery lui ont permis d’acquérir constance et rigueur. Elle qui s’est retrouvée face à des choix à faire, des enfants à élever avec une « culpabilité » tenace quelque peu tiraillée entre son travail et son rôle de mère, partage les ingrédients de sa recette magique : « s’organiser, écouter, bien s’entourer ».
Des enfants, Me Pascale Pageau, présidente-fondatrice du cabinet Delegatus, en a quatre. Et pourtant. Cela ne l’a nullement empêchée de poursuivre ses ambitions professionnelles.
« En créant Delegatus, j’ai voulu changer les règles du jeu concernant la pratique dans la profession », dit-elle. Comme les femmes qui l’accompagnent et qui sont toutes mères, elle a mené de front deux combats avec succès : professionnel et personnel. Aujourd’hui, elle encourage la salle à utiliser la flexibilité offerte par la technologie pour donner plus de liberté aux avocates-mamans.
« Rentrer plus tôt du travail ne veut pas dire qu’ensuite, plus tard dans la soirée, je n’ouvrirai pas à nouveau mon ordinateur pour travailler. Après que les enfants soient couchés, par exemple », dit-elle.
A la sortie, Me Jean-Guy Jam, avocat chez Bertrand Deslauriers, l’un des seuls hommes de la salle, a beaucoup apprécié le contenu de la conférence, tout particulièrement le discours autour de la figure du leader donné par Me Chantal Châtelain.
« Je tiens surtout à féliciter toutes les femmes, pour le travail qu’elles accomplissent », dit-il.