Cynik

So you want to become a lawyer? Illusions et désillusions

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Cynik

2010-12-16 13:15:00

Mégafusions de grands cabinets, occasions professionnelles intéressantes, bel avenir pour la profession... Pourtant, illusions et désillusions se côtoient de près depuis quelque temps sur votre site web préféré.
On assiste à une autre petite vague de dénonciation des méconceptions sur la réalité post-étudiante du droit – et pas qu’au Québec, comme en témoignent par exemple les capsules vidéos délicieusement acides de So you want to go to law school?.

Dans les journaux, revues et évènements spécialisés se bousculent les annonces de grandes firmes qui « cherchent avidement de nouveaux avocats pour combler leurs besoins » jusqu’aux commentaires étudiants décrivant des aspirations de carrière avec une telle certitude emplie de motivation que ça en devient romantique. Et quand on fait une recherche « statistique » sur la profession, on saute au plafond en contemplant les chiffres! Taux de placement universitaire annoncé: plus de 90%; nouveaux postes disponibles chaque année selon les décomptes effectués par le gouvernement: environs 600; revenu statistique moyen de la profession: 110 000$ par an; salaire statistique moyen durant les premières années : 60 000$ en montant…

Mais après le dernier coup de hache dans la monstrueuse hydre des examens de l’École du Barreau, une écrasante majorité des survivants nouvellement arrivés dans la profession déchante à vitesse grand V en constatant que, loin d’en avoir terminé, leur parcours galérien d’un cheminement en droit ne fait là que commencer.

Voici un conseil aux étudiants de droit : Ne vous fiez pas à la représentation de la profession qui est généralement dépeinte au public. Cette image qui occupe tout l’espace de visibilité relève de la glorification publicitaire pour se faire bien paraître par les grandes firmes et envoyer un message que tout le monde rayonne d’excellence et de prospérité pour faire mousser le marketing et les relations publiques.

Pas que ça soit illégitime de leur part, bien au contraire, mais c'est ce que ça donne comme tableau au final.

La réalité professionnelle dépeinte de manière générale aux cohortes étudiantes est en fait la réalité du petit nombre des 0.1% des meilleurs notes au Canada et de ceux pourvus d’une voie royale toute tracée par les contacts de papa l’associé directeur ou de maman l’administratrice. Ce sont -eux- qui sont visés par ces « campagnes promotionnelles » - et on ne les retient généralement pas pour leur valeur personnelle, mais bien parce que ça fait joli d’avoir un étudiant avec de bonnes notes, ou parce que ça fait plaisir à un ami associé à qui on doit une faveur.

En vérité, la pratique se fiche des étudiants, des stagiaires et des jeunes avocats en tant que personnes. Tant que de longues années à faire ses preuves et à démontrer qu’on peut survivre à une carrière en droit ne se sont pas écoulées, les jeunes avocats ne sont en réalité qu’une seule chose : du cheap labour générique – interchangeable et remplaçable par un des milliers d'autres disponible sur le marché.

En droit, la personnalité s'acquiert par prescription acquisitive.

Hé oui, c'est une réalité que vous avez le choix d’accepter maintenant, ou de tenter de nier jusqu’à ce que vous la preniez en pleine gueule. C'est comme ça et ça fait partie du jeu dans lequel on s'embarque.

On peut critiquer autant qu'on veut la réalité de la profession, ce n'est pas à elle de changer pour remonter le moral aux pauvres petits jeunes de première année de pratique déçus de pas être à Paris en train de plaider devant un panel arbitral de la Chambre de Commerce Internationale. Nous n’avons pas tous le chic d’appartenir à une classe soutenue par des organismes à vocation communautaire et exiger, comme les Lola de ce monde, de changer tout un système en fonction de nos illusions et de nos petites expectatives d’enfants gâtés.

Dépression?

Doit-on sombrer dans la dépression pour autant et regretter de ne pas être devenu plombier ? Pas forcément. Un cheminement en droit peut effectivement amener à rejoindre ces rêves qui nous ont porté durant nos études, mais ça ne se produira qu'après un investissement considérable d'efforts pendant plusieurs années de sacrifice pour ceux qui y parviendront.

Cette inadéquation entre ce que beaucoup croient durant leurs études mais que seul peu obtiennent comme ils le pensaient doit être d'avantage reconnue par la profession – particulièrement par les universités. Quitte à augmenter de trois crédits le programme de baccalauréat en droit en rajoutant un cours en bonne et due forme à cet égard, il serait plus qu'opportun de préparer plus adéquatement les étudiants au marché du travail et à l'environnement professionnel qui les attend, au-delà de l'application pratique des notions de droit apprises en classe.

Ou est-ce que ça sera à Wikileaks de s'en charger ?


-Cyniquement vôtre.
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