Les ententes entre avocats sont sacrées
Julie Couture
2012-08-02 14:15:00
Dans la plupart des cas, ces négociations se font de manière informelle, puisqu’elles sont verbales, d’où l’importance de s’assurer que la Couronne consigne bel et bien ces notes au dossier, afin de protéger, de façon minimale, l’entente préalablement établie.
Évidemment, un juge ne sera jamais dans l’obligation de respecter une telle suggestion, mais qu’en est-il lorsque soudainement l’entente préalablement négociée ne tient plus?
La Cour d’appel s’est récemment penchée sur cette question dans l’arrêt ''R.'' c. ''Gagnon'' en précisant l’importance du respect des ententes entre avocats.
Cette cause concernait le cas d’un homme accusé de conduite avec des facultés affaiblies, ayant causé des lésions corporelles et qui avait décidé, à la suite de négociations entre son avocat et la poursuite, d’enregistrer un plaidoyer de culpabilité en échange d’une suggestion commune qui prévoyait un emprisonnement avec sursis. La sentence avait alors été reportée en 2009, dans le but d’effectuer un rapport présentenciel et d’en savoir le résultat.
Cependant, il y eut un changement de procureur au dossier et, la veille du prononcé de la sentence, la Couronne informa la défense que l’entente ne tenait plus, étant donné les faits particuliers de ce dossier. Elle laisserait donc la sentence à l’appréciation du tribunal, au lieu de présenter la suggestion commune telle que convenue. Ainsi, quelques mois plus tard, l’avocat de la défense fit une demande de retrait du dossier car il était appelé à témoigner dans la requête en arrêt des procédures qui devait être déposée sous peu.
Monsieur Gagnon fut donc contraint de se procurer les services d’un autre avocat afin de déposer une telle requête.
C’est ainsi qu’au mois de septembre 2009, la requête fut déposée et entendue par la Cour qui conclut que l’arrêt des procédures n’était pas la solution, étant donné les circonstances de l’affaire qui n’était pas des plus exceptionnelles.
Cependant, la Cour fut d’accord d’admettre que la répudiation de cette entente constituait un abus de procédure de la part du ministère public et que, par conséquent, un remède devait être appliqué afin de réparer le préjudice subi par l’accusé.
Le tribunal a donc conclu que le remède approprié, en l’espèce, était le paiement des frais du nouvel avocat de l’accusé par le ministère public, et l’imposition de la sentence qui avait préalablement été établie lors des représentations sur sentence, soit l’emprisonnement avec sursis.
Par le biais de ce jugement, la Cour d’appel est venue simplement rappeler le caractère sacré du respect de ces ententes, mais également faire état de la sévérité que la Cour entend exercer pour de tels comportements.
Note sur l'auteure :
Julie Couture se spécialise en droit criminel au sein du cabinet Couture & Boulet Avocats.