La revanche des avocats d'entreprise

Rene Lewandowski
2011-02-18 10:15:00
C'est là que ses avocats lui ont suggéré de prendre contact avec l'Association des conseillers juridiques d'entreprise, mieux connue sous son nom anglais de The Association of Corporate Counsel (ACC). L'ACC est intervenue et a déposé un mémoire de plus de 100 pages, détaillant la nature et le rôle de ces avocats et de leur importance dans les contentieux d'entreprises. BCE a obtenu gain de cause...

« L'ACC, c'est comme un gros lobby d'avocats d'entreprise », dit Martine Turcotte, qui est aujourd'hui l'un des deux seuls membres canadiens à siéger au conseil d'administration de l'ACC.
L'an dernier, raconte-t-elle, BCE et quelques autres sociétés canadiennes et européennes ont voulu contester certaines dispositions de la nouvelle loi Dodd-Frank, relative à la réforme du système financier américain, notamment celles prévoyant des récompensent financières aux employés qui communiqueraient des informations sur des infractions financières. À cinq ou six entreprises, une lettre envoyée à la SEC - gendarme des marchés financiers aux États-Unis - aurait probablement eu peu d'écho. Mais grâce au poids de l'ACC et de ses centaines d'entreprises membres, la demande a été prise au sérieux. Au point où la réforme est présentement sur la glace.
Au Canada
Depuis quelques années, l'ACC tente une percée au Canada. Elle compte près de 800 membres, mais ce nombre pourrait augmenter rapidement au cours des prochains mois. Il y a quelques semaines, l'Association du Barreau canadien (ABC) a évincé le Conseil et la direction de l'Association canadienne des conseillers juridiques d'entreprise (ACCJE) à la suite d'une dispute de financement. Pour plusieurs, la bisbille dans l'organisation concurrente représente une belle occasion de changer de camp.
« Moi, c'est sûr, je vais dorénavant soutenir l'ACC », dit le grand patron des affaires juridiques de Bombardier, Daniel Desjardins, qui n'a pas apprécié la façon de faire un peu cavalière de l'ABC. Il estime que les programmes de l'ACC ciblent bien les besoins des conseillers juridiques. Bombardier compte sur l'un des plus importants départements juridiques internes.

Il faut dire que l'ACC, c'est beaucoup plus qu'un lobby. Elle prend position et tente de faire changer les choses. Un thème particulièrement à la mode depuis quelque temps est la tarification des cabinets externes. Il y a trois ans, l'ACC a donc lancé le Value Challenge, stratégie pour forcer les grands cabinets d'avocats à revoir leurs méthodes de tarification, afin que les prix demandés pour leurs services juridiques correspondent davantage avec la valeur réelle des services livrés. Réticents au début, la plupart des cabinets ont depuis adapté leurs façons de faire et proposent des méthodes de tarifications alternatives.
L'ACC, c'est surtout un immense réseau international, en fait la plus grande organisation au monde entièrement consacrée aux intérêts des avocats en entreprise. Elle offre formation, éducation, information sur les meilleures pratiques, ressources en ligne sur les sujets importants, représentation devant les tribunaux et instances réglementaires lorsque les enjeux ont des conséquences sur le travail des avocats en entreprise...

Parfois, ils organisent des séances de remue-méninges avec des avocats d'autres pays.
« On est dans un monde globalisé; il faut être conscient de ce qui se passe ailleurs », explique Martine Turcotte. En avril, elle invité une quinzaine de chefs de contentieux pour discuter. Thème de la rencontre ? Comment gérer et naviguer devant l'intervention des gouvernements. Le groupe a ensuite soumis ses réflexions à l'ACC qui en a produit un rapport, disponible maintenant aux 26 000 membres. Dans quelques mois, ce sera au tour du chef des affaires juridiques de Domtar, Zygmunt Jablonski, de partager son savoir avec ses collègues. Il viendra leur expliquer comment un département juridique apporte de la valeur à une entreprise... et comment vendre cette idée à la direction.