Lu Chan Khuong: « J’ai toujours su que je devais me battre ! »
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Jean-Francois Parent
2017-04-27 15:00:00

Son mot d'ordre : le changement. « Le fait qu'il ait fallu avoir recours à la Loi sur l'accès à l'information pour connaître la rémunération des administrateurs » en dit long sur la culture du secret qui doit cesser, explique Lu Chan Khuong, rencontrée en marge du débat l’opposant à l’autre candidat au bâtonnat, Paul-Matthieu Grondin, organisé par l'AJBM mardi, à Montréal.
Un autre exemple de cette culture à changer, selon elle, réside dans le manque de proximité des dirigeants de l'ordre avec ses membres. « Je parle aux gens sur le terrain, je les écoute », dit-elle, affirmant au passage que l'appui massif qu'elle avait reçu lors du vote de 2015—où elle avait récolté 63 % des suffrages—n'a pas diminué.
« Mes enfants ont beaucoup souffert »
Mais qu'est-ce qui peut bien l'avoir amené à vouloir revivre les aléas d'une campagne électorale?
L'absence de soutien du Barreau à LANEQ, les incommensurables délais dans l'administration de la justice civile—au sujet desquels la Protectrice du citoyen avait écrit, en septembre dernier, qu'ils constituaient un « déni de service », voilà autant de raisons qui l'ont convaincu de reprendre du service.
Et cette fois-ci, elle sait à quoi s'attendre : « Mes enfants avaient peur d'aller acheter le journal. Ils ont beaucoup souffert des événements de l'été 2015. » Chaque jour, « elle faisait la Une ». Cette fois, elle les a mis dans le coup dès le début. Et elle a appris à gérer la virulence des attaques lancées contre elle. « J'ai toujours senti, pendant ma carrière, qu'il fallait que je me batte. »
N'y a-t-il pas un besoin de rédemption aussi? Retrouver le sceptre bâtonnal redorerait un blason terni par les événements de 2015.
Elle réfute cette analyse, affirmant qu'elle n'a rien à prouver. « Si je perds, j'ai un agenda professionnel très bien rempli... »
Sortie électorale

« Je n'avais pas le choix, le Barreau en avait été avisé en mai 2016 », explique-t-elle. Elle se défend d'avoir été opportuniste : « C'est le temps qui a été nécessaire pour confirmer toutes les informations », et appuyer les allégations sur une base solide.
Citant cette sortie comme la « goutte d'eau qui a fait déborder le vase », la bâtonnière sortante, Claudia P. Prémont, a choisi en début de semaine de mettre fin à sa campagne.
Une sortie qui étonne Lu Chan Khuong. « Me Prémont avait les qualifications requises : elle a été bâtonnière à Québec avant d'arriver au Barreau, elle a l'expérience... »
Ses attaques ne risquent-elles de miner sa capacité à se poser comme une bâtonnière qui saura rallier les membres à ses projets? Ses adversaires lui reprochent d'aliéner ses vis-à-vis.
L'administratrice agréée, titulaire d'un MBA, rétorque : « Je suis administratrice depuis 20 ans, pendant lesquelles j'ai siégé sur plusieurs CA. » Estimant avoir « ce qu'il faut » pour guider le prochain CA dans la direction qu'elle souhaiterait lui voir prendre, elle insiste sur l'importance du débat d'idées. « Si je perds un vote du CA, je passe à autre chose. Ce qui important, c'est le débat d'idées », dit-elle.
Un Barreau nouveau
Sur les réseaux sociaux, elle insiste sur ses compétences. Me Khuong soutient que la pratique du droit a changé et qu'il faut que les avocats élargissent leurs horizons. « Il faut sortir », dit-elle : aller au théâtre, siéger sur des conseils, faire de la philanthropie, s'impliquer dans la communauté..
Mais il faut également « un Barreau plus près de ses membres et géré rigoureusement ». Sur ce dernier point cependant, n'est-elle pas vulnérable à la critique? Elle recevait en 2015 un blâme du comité électoral du Barreau pour un rapport incomplet relatant ses dépenses électorales de 93 000 dollars…
« On avait changé les règles en cours de route », se défend-elle pour justifier qu'elle n'avait pas tenu un compte rigoureux de ses dépenses, payées de sa poche.