Un cabinet touche le jackpot dans une action collective !
Didier Bert
2024-11-27 15:00:13
Plus de 4 000 heures de travail et des risques juridiques élevés : la Cour supérieure approuve des honoraires de 6,4 millions $ à un seul cabinet…
Un cabinet vient de recevoir l’approbation de la Cour supérieure pour sa demande d’honoraires dans une action collective visant une congrégation religieuse.
Le dossier a été initié en décembre 2019 quand le demandeur A.B. a déposé une demande d’autorisation d’exercer une action collective contre les Frères de Saint-Gabriel du Canada, pour des agressions sexuelles commises sur des mineurs.
Un an plus tard, la Cour supérieure l'autorisait à agir comme représentant du groupe constitué de « toutes les personnes, de même que leurs héritiers et ayants droit, ayant été agressées sexuellement alors qu’elles étaient mineures, par tout membre religieux des Frères de Saint-Gabriel, ainsi que par tout bénévole ou employé des Frères de Saint-Gabriel à l’occasion de leur fonction, durant la période comprise entre le 1er janvier 1940 et aujourd’hui ».
Le demandeur était représenté par Me Justin Wee, Me Alain Arsenault, Me Virginie Dufresne-Lemire, Me Yalda Machouf Khadir et Me Antoine Duranleau-Hendrickx du cabinet Arsenault Dufresne Wee.
L'affaire s'est conclue par une entente de règlement en mai 2023. Finalement, les réclamations de 154 membres du groupe ont été acceptées, pour un montant global de règlement de 25 905 000 $.
Le cabinet Arsenault Dufresne Wee a déposé une demande d'approbation de ses honoraires professionnels pour un montant de 6 476 250 $, représentant 25 % du fonds de règlement global à être constitué par la défenderesse.
C'est bien ce montant que le juge Sylvain Lussier de la Cour supérieure vient d’approuver. Dans sa décision, le magistrat reconnaît le caractère raisonnable des honoraires, compte-tenu de l'expérience des avocats du cabinet Arsenault Dufresne Wee auprès de plus de 2 000 victimes d'agressions sexuelles, des plus de 4 000 heures de travail consacrées à ce dossier, de la lourdeur du fardeau de la preuve exigé. Le juge a également tenu compte des compétences spécifiques déployées par le cabinet dans l’accompagnement des victimes lors de ce « processus particulièrement douloureux ».
Le juge Sylvain Lussier en conclut que « le résultat obtenu par les avocats du Groupe est dans l’intérêt des membres du Groupe. »
La Cour supérieure précise également que « 154 membres ont pu être compensés pour un préjudice subi pendant leur jeunesse, il y a très longtemps, et mettre une forme de baume sur leurs plaies.
Le résultat obtenu par entente de règlement rejoint les objectifs de l’action collective que sont l’accès à la justice et l’économie des ressources judiciaires. Espérons qu’il y aura également un aspect « modification du comportement » et que de tels gestes ne se reproduiront plus jamais.
Un procès
S’il avait fallu se rendre à procès, et possiblement en appel, les membres du Groupe auraient vraisemblablement dû attendre encore quelques années avant de recevoir une quelconque indemnisation. »
Le juge a également calculé le multiplicateur, un outil permettant d'évaluer le caractère raisonnable des honoraires. Dans ce cas, le multiplicateur était de 3,94925, ce qui signifie que les honoraires représentaient près de quatre fois le montant calculé en multipliant le nombre d’heures travaillées par le taux horaire des avocats. Le juge a comparé ce chiffre à d’autres affaires similaires où des multiplicateurs plus élevés avaient été jugés raisonnables, concluant que le risque assumé par les avocats justifiait le montant demandé.
Les honoraires du cabinet seront déduits des montants versés aux membres du groupe, « la Défenderesse n’ayant aucune responsabilité quant au paiement des Honoraires à être approuvés, ni des sommes dues au Fonds d’aide aux actions collectives et que toute somme à être payée devra l’être à même le Fonds de règlement global », précise le jugement.
L'approbation des honoraires permet donc à présent le calcul de l'indemnisation individuelle de chaque membre du groupe.
Ni la défenderesse ni le Fonds d’aide aux actions collectives ne se sont opposés au montant des honoraires réclamés.
La défenderesse était représentée par Me Marie-Nancy Paquet et Me Blanche Fournier du cabinet Lavery, De Billy.
Le Fonds d’aide aux actions collectives était représenté par ses propres avocats, Me Frikia Belogbi, Me Nathalie Guilbert et Me Ryan Mayele.