Irritée par une avocate, une juge quitte la salle d’audience
Martine Turenne
2018-01-26 14:30:00
C’est ce que révèle Le Journal de Montréal.
Me Touma défend le policier Éric Deslauriers, de la Sureté du Québec. En janvier 2014, ce dernier est intervenu dans la cour de la polyvalente de Sainte-Adèle lorsqu’il a localisé une voiture volée conduite par un adolescent de 17 ans. L’histoire a mal tourné et le policier a fait feu, craignant pour sa vie. Atteint à deux reprises, le jeune homme est décédé.
Au mois de septembre dernier, la juge Roy a reconnu le sergent Deslauriers coupable de l’homicide involontaire de cet adolescent. L’accusé a porté le verdict en appel.
Or, la juge Roy a déjà tenu des propos très durs envers les policiers qui emploient une force létale alors qu’elle était présidente de l’Association québécoise des avocats de la défense. « C’est certain qu’il y a un problème, ça fait je ne sais pas combien de personnes qui se font assassiner en fait par des policiers », a-t-elle en entrevue avec Claude Poirier en 2012.
Me Nadine Touma a donc invoqué une « apparence de partialité ». La criminaliste a demandé à la magistrate de se retirer du dossier de son client à l’étape des observations sur sentence.
« Vous allez très loin Maître, sérieusement », a rétorqué la juge Roy. « Vous avez un Code de déontologie. (...) Vous rentrez dans le personnel carrément. Vos propos sont inutiles et farfelus. Ce que vous dites présentement est particulièrement odieux », rapporte le Journal de Montréal.
La magistrate a par la suite quitté promptement la salle d’audience du palais de justice pour « une pause de 10-15 minutes », pour n’y revenir que 45 minutes plus tard.
Sahalor
il y a 6 ansJe ne suis pas criminaliste. Le serais-je que je ne prendrais pas partie dans cette affaire. J'aimerais toutefois faire deux observations.
En premier lieu, voici une situation qui devrait inciter les confrères et consœurs qui ambitionnent de devenir juge de ne pas attendre de monter sur la banc pour pratiquer la retenue judiciaire. Des propos à saveur politique et les critiques sociales énoncées en dehors d'une plaidoirie peuvent venir vous hanter plus tard.
En second lieu, quelque soit le jugement que pourront porter les instances judiciaires et disciplinaires quant aux propos de Me Touma, avouons qu'il faut du cran pour tenir tête à un membre de la magistrature.
Or, tout en restant à l'intérieur des limites que nous imposent les règles de procédure et notre code de déontologie, il arrive que l'avocat et l'avocate doivent tenir tête à des représentants des pouvoirs publiques et judiciaires au nom du droit de leurs clients à une défense pleine et entière.
La profession d'avocat/e n'est pas pour les timides. Et il me revient en tête ce slogan que le Barreau a utilisé (trop brièvement) il y a quelques années: "Le courage d'être avocat". Personnellement, je m'ennui de ce slogan.
Anonyme
il y a 6 ansLe point soulevé par Me Touma apparait on ne peut plus pertinent, et à moins que la juge en question ne puisse articuler sa conclusion voulant qu'il s'agissait de propos "inutiles et farfelus", tirés de la sphère "personnelle" et en rupture avec la code de déontologie des avocats, cette prise de position de l'"honorable" est à prendre pour ce qu'elle est: une grossière tentative d'intimidation prenant la forme d'un appel du pied des besogneux du bureaux du syndic, prompt à faire rentrer de force dans le moule de 59.2 c.d.p., sans plus d'explications, ce qui a déplu à son "honneur".
Jamais de ne mettrai mon nom ici
il y a 6 ansLa retenue seulement pour les criminalistes en défense, ça va de soi.
Les juges qui ont été procureurs.es de la poursuite n'ont jamais fait de commentaires sur les trafiquants de drogue et les accusés en général, bien-sûr. Les juges qui ont été procureurs.es de la poursuite n'ont pas eu des dizaines d'amis.es et d'amants.es au sein des corps de police, évidemment.
La position de Me Touma est clairement à l'effet que la juge Roy ne peut pas entendre une cause impliquant un policier parce qu'elle a été avocate de la défense. C'est une position indéfendable. La juge Roy a été avocate, certes, mais elle est juge et elle a preté serment.
(ps: Son client ne serait pas policier vous auriez tous une opinion totalement différente)
Mario B
il y a 11 moisne jamais céder sous les menaces ou l'intimidation quelles conques, la Juge Roy a remplie son mandat avec honnêteté. Plusieurs policiers se pensent aux dessus des lois et prennent pour acquis que leurs statues les protègera d'éventuel bavures. Erreurs et que cette situation donne exemple aux autres
Bravo à la juge
Avocat
il y a 6 ansPourquoi ne pas avoir demandé à la juge de se retirer avant, si elle était SI partiale que ça?
Anonyme
il y a 6 ans"Informée de ces propos à l’automne dernier, la défense demande maintenant à la magistrate de se récuser".
Donc, après la déclaration de culpabilité. Du moins c'est ce qu'on en comprends.
lol
il y a 6 ansC'est clair que si la juge avait acquitté son client, il n'y aurait pas eu de requête en récusation pour cause de partialité. La partialité n'a donc pas été apparente. Le procès s'est déroulé sans heurts et la partialité alléguée vient uniquement de la fonction passée de la juge.
Je me demande quel avocat de la défense au Québec ne sait pas que la juge Roy était en défense et qu'elle a été présidente de l'AQAAD. Me Touma le savait assurément.
Cette requête est injurieuse. Quand nos clients nous donnent u mandat débile, aussi flic soit-elle, on peut refuser.
Le Gros Roger
il y a 6 ansCertains confrères et certaines collègues ont la très fâcheuse tendance à prendre fait et cause pour le client, d'embrasser sa cause. Les résultats ne peuvent être que funestes. Être avocat et perdre son libre arbitre, c'est un peu comme se retrouver à poil devant la Cour...
Sedia Stercoraria
il y a 6 ansEn suggérant, devant son client et devant sa consoeur, que l'avocate a transgressé son Code de déontologie, la Juge vient de se magasiner un deuxième motif de récusation, beaucoup plus puissant...
Calin Ours
il y a 6 ansVous vivez dans un monde de calinours vous. Allez à la Cour, on en reparlera.
Zola
il y a 6 ansJe propose que tous les avocats de la défense qui représentent une personne accusée d'un crime qui n'est pas policier demandent aux juges de se récuser dès lors qu'ils ont fait carrière à la poursuite.
Parce que nos collègues de la poursuite, vous savez, en règle générale, ils ne les aiment pas beaucoup, les accusés, et ne se gênent pas pour le dire.
Si la juge Joëlle Roy ne peut pas entendre une cause impliquant un policier, la très grande majorité des juges de la Cour du Québec et de la Cour supérieure ne peuvent pas entendre un cause impliquant.... Un accusé ordinaire.
Me Stéphane Lacoste
il y a 6 ansIl faut toujours agir avec délicatesse lorsque l'on présente une requête en récusation. Débattre du droit sans attaquer le décideur. Mais il faut tout de même soulever tous les éléments de faits pertinents. Tout avocat a le devoir légal de représenter son client avec zèle, surtout en matière criminelle. Il peut bien entendu déplaire au décideur de s'entendre dire qu'il n'a pas l'apparence d'impartialité requise (c'est le test établi par la Cour suprême). Mais il lui revient, dans le respect de ses propres règles déontologiques d'écouter avec sérénité et en gardant l'esprit ouvert.
Dans ce cas précis, l'avocate a-t-elle dépassé les bornes? La juge a-t-elle dépassé les bornes?
Il est impossible de porter un jugement sur ce qui s'est passé dans cette affaire car nous n'avons pas le bénéfice des transcriptions. Tous devraient donc faire preuve de retenue et peut-être aller prendre une petite pause de 45 minutes avant de commenter.
Anonyme
il y a 6 ansMe Touma n'a pas demandé à la juge Roy de se récuser parce que c'est une ancienne avocate de la défense. Me Touma lui a demandé de se récuser en raison de propos que la juge Roy, alors présidente de l'AADQ, a tenu publiquement, dans une affaire ou un policier avait tué une autre personne, lors d'une intervention.
Le client de Me Touma est exactement accusé de ça, avoir tué un individu lors d'une intervention.
Les propos que la juge Roy avait tenu publiquement, je le rappelle, en tant que présidente de l'AADQ, sont en liens directs avec l'affaire qui concerne le client de Me Touma.
On n'est pas ici dans les généralités que si tu es en poursuite tu n'aimes pas les accusés et que si tu es en défense, tu n'aimes pas les policiers.
On n'est pas non plus dans des histoires de discussions de corridors où un avocat maintenant juge aurait pu dire quelque chose contre . On parle de propos publics tenu alors qu'on occupe une position officielle.
Oui, Me Touma a attendu que son client soit trouvé coupable avant de présenter une telle requête. On peut se questionner sur ses raisons. Mais on ne peut pas nier les propos de la juge Roy.
Et on ne peut pas généraliser sur l'ensemble de la magistrature non plus, peu importe leur parcours professionnel.
AL16
il y a 6 ansMerci de bien rétablir les faits. Je me disais la même chose.
HH
il y a 6 ansUn/une Juge doit être capable de prendre une demande de récusation, un exercice toujour délicat pour tout le monde, sans sauter une note et encore moins intimider l'avocat en faisant une vague référence à son Code de déontologie, ce qui laisse entrevoir une apparence de partialité ou de perte de contrôle de la situation en soit.
Je crois que la Juge va devoir se récuser, mais qui sait.
Ça va aller en appel.
Récusé
il y a 6 ansUn nouveau procès doit être ordonné.
1/2 La juge aurait pas dû mentionner aux avocats qu'elle avait tenu ce discours envers des policiers
2/2 La juge s'est emportée lors de la demande de récusation.
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Hébert c. R., 2014 QCCA 1441 (CanLII)
La crainte raisonnable de partialité
[...]
[11] Le devoir d’impartialité auquel sont tenus les juges protège l’équité du procès. La partialité relève en effet de l’erreur judiciaire[1]. Selon l’arrêt de principe R. c. S. (R.D.), l’impartialité consiste en « l’état d'esprit de l'arbitre désintéressé eu égard au résultat et susceptible d'être persuadé par la preuve et les arguments soumis »[2]. Le critère à appliquer est le suivant[3] :
[À] quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique. Croirait elle que, selon toute vraisemblance, [le décideur], consciemment ou non, ne rendra pas une décision juste?
Toutefois, les motifs de crainte doivent être sérieux et je [...] refuse d'admettre que le critère doit être celui d'« une personne de nature scrupuleuse ou tatillonne ».
Le test est donc doublement objectif : tant la personne que la crainte qu’elle éprouve doivent être raisonnables.
[...].
Récusé
il y a 6 ansMon erreur:
1/2 La juge aurait dû mentionner aux avocats qu'elle avait tenu ce discours envers des policiers.
Moi non plus
il y a 2 ansTiens donc.... Vous devriez maintenant aller lire ce que le juge wagner a dit sur son jugement de la cause du policier deslauriers