Équité salariale : victoire partielle pour les syndicats à la Cour suprême
Radio -Canada
2018-05-10 13:15:00
Les juges du plus haut tribunal du pays ont ainsi rendu jeudi leur décision dans deux causes touchant la loi adoptée par Québec il y a une vingtaine d'années qui oblige les employeurs à maintenir l'équité salariale au sein de leur entreprise.
Victoire syndicale
Dans un premier jugement, ils ont donné raison à l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux, qui en avait contre des modifications apportées à la loi en 2009.
Ces modifications faisaient en sorte que les employeurs n'étaient désormais plus contraints qu'à évaluer tous les cinq ans le maintien de l'équité salariale, plutôt que de le faire de façon continue. Ces changements avaient été adoptés pour faciliter la tâche aux entreprises, alors que moins de la moitié des employeurs se conformaient à la loi à l'époque.
Cette raison n'est pas valable aux yeux de la Cour suprême du Canada.
« Le régime, en privilégiant les employeurs, renforce l'un des facteurs-clés de l'iniquité salariale : l'inégalité du rapport de force entre les employeurs et les travailleuses », écrit la juge Rosalie Abella, dans une décision partagée 6 contre 3.
« En tolérant les décisions des employeurs qui entraînent des iniquités salariales pour les femmes, le législateur envoie le message selon lequel il ferme les yeux sur cette inégalité du rapport de force, perpétuant ainsi davantage le désavantage », poursuit-elle.
Selon la magistrate, l'équité salariale n'est pas un « droit épisodique ou occasionnel ». La Cour suprême maintient ainsi les décisions des tribunaux québécois, qui avaient conclu que des articles de la loi sur l'équité salariale contrevenaient à la Charte canadienne des droits et libertés, qui garantit l'égalité.
Défaite pour les éducatrices
Cette victoire syndicale est assombrie par une défaite des éducatrices en garderie dans le second jugement rendu par le plus haut tribunal du pays.
La cause était portée par la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), qui représentait majoritairement des éducatrices en garderie et interprètes en langage gestuel, des emplois sans comparateur masculin.
Dans ce cas de figure, les femmes ont dû attendre six ans de plus que leurs collègues oeuvrant dans des milieux de travail mixtes pour obtenir l'équité salariale, ce que la CSQ a plaidé être discriminatoire.
Dans une décision partagée, la juge Abella conclut qu'il y a bel et bien eu violation des droits des femmes garantis par la Charte. Cette violation était toutefois justifiée parce que ce délai visait simplement à trouver la bonne solution, dans un contexte peu courant.
« Il s'agissait d'une question complexe qui commandait d'importantes recherches et analyses », écrit la juge Abella.
« Bien qu'il s'agisse d'un cas limite, j'estime que le dossier étaye la conclusion selon laquelle le Québec n'a pas agi de façon déraisonnable dans les dispositions qu'il a prises pour que le délai ne dépasse pas des limites raisonnables », signale-t-elle.