Avocats recherchés
Emeline Magnier
2013-05-23 07:15:00
Quels sont les profils les plus difficiles à recruter?
"Les avocats associés avec clientèle en droit des affaires", répond sans hésitation Caroline Haney, de Haney Recrutement juridique. Elle précise que sur ce marché, "ça joue des coudes très dur".
Me Dominique Tardif, de ZSA, explique ce phénomène par le contexte économique difficile qui impacte le nombre des transactions commerciales à la baisse. Les cabinets sont à la recherche de personnes capables d'apporter "de l'eau au moulin", dit-elle.
Ce type de demande a toujours été présente mais elle est actuellement beaucoup plus pressante. "Trouver un avocat prêt à bouger, c'est comme voir passer une étoile filante", commente Caroline Haney.
Danielle Montpetit, du Groupe Montpetit, explique que les avocats ayant ce profil ont plus tendance à faire jouer leur réseau et à se faire référer par une connaissance, membre d'un autre bureau, de sorte que leur démarche serait moins visible.
D'autres profils sont moins souvent demandés, mais tout aussi difficiles à trouver quand une offre est affichée.
Selon Dominique Tardif, la relève ne serait pas suffisante pour combler les postes d'avocats réviseurs, spécialisés en traduction et révision de documents en valeurs mobilières. Elle indique également que les avocats expérimentés en litige de propriété intellectuelle et en droit de l'environnement "se comptent sur les doigts d'une main". La double compétence droit civil common law pour une pratique généraliste est aussi un atout majeur.
Quels sont les profils les plus demandés?
Le litige est un domaine assez porteur d'emplois, selon Me Tardif. "C'est comme un mouvement inversé: quand le nombre de transactions diminue, celui des affaires contentieuses augmente", dit-elle.
Au vu du nombre de candidats sur le marché, les postes sont facilement comblés. La plupart des offres visent des avocats juniors, entre trois et cinq ans d'expérience.
"C'est justifié par le départ à la retraite des babyboomers”, explique Danielle Montpetit. D'après elle, les cabinets recherchent des avocats ayant acquis assez de pratique pour être relativement autonome mais pas trop, pour pouvoir les modeler à leur image et assurer la relève.
Pour Caroline Haney, les entreprises offrent aussi de bonnes opportunités d'emploi pour les avocats ayant entre 5 et 7 ans d'expérience. "Il suffit de regarder les offres publiées sur Droit-Inc.: 70% sont des postes en entreprise", dit-elle. Pour une question de coût et de facilité de gestion, les entreprises préfèrent avoir un avocat référent à l'interne pour traiter les affaires juridiques courantes, quitte à avoir recours à un cabinet externe pour les questions plus spécialisées.
La tendance est inversée pour les postes de direction. "Trouver un poste de numéro 1 de contentieux est beaucoup plus difficile" explique Me Tardif. Fini le temps des chaises musicales, alors que certains conseillers très expérimentés doivent se rabattre sur des postes qui requièrent des qualifications moindres.
Quels seront les profils recherchés à court et moyen terme?
Pour Caroline Haney, on assiste déjà à un déplacement du marché des cabinets vers le milieu de l'entreprise.
Les sociétés seront en demande de conseillers juridiques polyvalents, dotés de bons réflexes, et capables de "lever le drapeau rouge au bon moment" explique Me Tardif.
En grand bureau, il faudra s'atteler au développement de la clientèle ou se spécialiser dans un domaine de compétence particulier, qui pourrait être une des niches évoquées précédemment.
"Le contexte économique est aussi à prendre en considération", ajoute Caroline Haney. Si les marchés se portent bien, on recherchera des avocats en valeurs mobilières, financement bancaire et en droit immobilier. À l'inverse en cas de récession, il vaudra mieux s'être dirigé vers le domaine de la faillite et de l'insolvabilité, ou en restructuration d'entreprise.
Pour répondre aux besoins créés par la mondialisation, la maîtrise de différents systèmes de droit sera un atout important. "Il faudra être ouvert à voyager, et être absolument bilingue, voir trilingue", déclare Danielle Montpetit.
L'augmentation constante des échanges entre les pays et continents continuera d'entraîner des regroupements de cabinets d'avocats au travers le monde, "et ce n'est qu'un début", conclut-elle.