Une pratique à plein gaz !
Emeline Magnier
2014-11-03 15:00:00
Spécialisé en litige civil et commercial ainsi qu’en insolvabilité, il intervient dans des dossiers d’arbitrages d’envergure. Depuis quelques années, il a orienté sa pratique dans les domaines de l’énergie, des ressources naturelles et du gaz, des industries porteuses pour les services juridiques.
Il a expliqué à Droit-inc son parcours, ses choix et les défis de sa pratique.
Droit-inc : Pourquoi vous êtes-vous dirigé en droit ?
Me Stefan Chripounoff : Je ne m'étais pas enligné pour faire des études juridiques. J'ai d'abord suivi un baccalauréat en génie mécanique à l'Université McGill. Mais pendant mon stage, j'ai réalisé que j'aurais affaire à une machine pour le reste de ma vie et ce n'était pas pour moi. Je devais améliorer la machine pour qu'elle fonctionne plus vite, mais dans ce cas, les travailleurs voyaient leur rythme de travail s'accélérer et étaient insatisfaits. Je voulais aider les gens et leur offrir mes services pour résoudre leurs problèmes et pas l’inverse.
Depuis tout petit, j'ai toujours aimé convaincre alors j'ai décidé de me lancer en droit. J'ai d'abord commencé à la faculté de l'éducation permanente tout en travaillant dans le domaine du génie. Et là je me sentais à ma place !
Comment avez-vous choisi LKD ?
Dès le départ, j'ai été attiré par le litige civil et commercial, et à l'époque, c'était le noyau dur du cabinet qui, pour sa taille, avait un très grand groupe de litige à Montréal, sans pareil dans l'industrie. J'ai reçu une offre intéressante et je l'ai acceptée avant même d'avoir reçu celles des autres bureaux. Je savais que c'était un bon cabinet, je ne me suis pas posé 1001 questions, je me suis lancé dans l'aventure et je n'ai jamais eu de regret. Nous avons un taux de rétention élevé et je ne suis pas le seul « bébé LKD » devenu par la suite associé.
Si je regarde aujourd'hui son évolution, je me dis que j'ai fait un choix extraordinaire. Nous sommes un cabinet de moyenne taille avec une bonne position sur le marché, loin des grands bureaux qui chargent beaucoup de frais.
Dans quels secteurs pratiquez-vous ?
Ma pratique est divisée en deux. Je fais du droit de l'insolvabilité et du litige commercial, notamment des litiges entre actionnaires et de l'arbitrage: j'ai eu la chance de participer à des arbitrages d'envergure comme l'affaire Canadian Royalties c. Ungava Exploration et Canadian Pacifique contre l'Agence de Transport Métropolitain.
50 % de mes dossiers se situent dans le domaine du gaz naturel pour des vendeurs de gaz. Je me suis orienté vers ce secteur un peu par hasard: dans le cadre du litige entre Manson Insulation et Superior Energy Management, un arbitrage de longue durée touchant l’interprétation de certaines clauses contractuelles spécifiques au domaine du gaz naturel, j'ai dû recruter l'expert au dossier. Il m'a tout expliqué de l'industrie: du forage à l'exploitation en passant par le financement et le transport.
Il m'a transmis sa passion et ça a rejoint aussi mon côté plus matheux: il y a des aspects très techniques qui m'intéressent fortement. Petit à petit, je me suis bâti une niche. Dans le contexte mondial, il y a beaucoup d'offres, donc les prix diminuent et les transactions augmentent, ce qui occasionne plus de travail pour les juristes.
Quels sont les défis de votre pratique dans le domaine du gaz naturel ?
Les dossiers sont très techniques et si on va en procès, il y a toujours un risque. Il faut donc prévoir les problèmes en amont et rédiger les contrats en conséquence pour les rendre « Québec proof ». À force, on connaît les arguments qui vont être soulevés par ceux qui ne veulent pas payer pour le gaz qu'ils ont commandé.
Dans la majorité des contrats, les vendeurs prévoit un prix fixe pour un volume fixe: quand les clients ne consomment plus, ils ne veulent plus payer et plaident souvent la clause abusive. Un avocat a déjà soulevé un point par rapport à l'obligation d'information du vendeur quant à l'évaluation de la consommation future du client. Nous avons donc ajouté une clause aux contrats, spécifiant que c'est de la responsabilité de l'acheteur.
L'industrie du gaz est en perpétuelle évolution. Aujourd'hui, on parle beaucoup du gaz naturel liquéfié, ce qui engendre la construction d'usines et de pipelines. Se pose aussi la question du transport : il y a de plus en plus d'exportations, le gaz étant moins cher ici qu'en Europe. Je vais donc faire de plus en plus de droit du transport.
Allez-vous souvent en arbitrage ?
J'essaie de convaincre les vendeurs de gaz d'opter pour l'arbitrage et de nommer un arbitre qui comprend le domaine, ce qui permet de diminuer les coûts du litige. Si le juge ne comprend pas bien le dossier et la matière, la décision pourrait ne pas être celle escomptée.
Je vais donc souvent en arbitrage pour des dossiers dans le domaine du gaz, en droit du transport et droit des mines. J'ai vu toutes sortes d'incidents: de la requête en désaveu jusqu'à la contestation de la sentence arbitrale.
Selon vous, quel est l'avenir de la profession ?
Il y a beaucoup d'avocats au Québec et d'ici cinq ans, on pourrait être 36 000. Il faut essayer de trouver une niche : faire de tout ce n'est pas une bonne façon de se positionner. Chez LKD, nous sommes très conscients de l'importance de développer une clientèle spécifique et de travailler dans un domaine qui nous plaît pour assurer notre pérennité.
Le métier évolue beaucoup, les clients des grands bureaux sont un peu désabusés et s'assagissent sur les questions de coûts attachés aux dossiers. Ils veulent d'autres options en termes de litige et facturation, et redéfinissent le rôle des avocats. Ceux qui se positionnent avec une valeur ajoutée seront à l'avant-garde du marché et seront récompensés. Le plus important, c'est le client et il a bien souvent des choses à dire : il faut l'impliquer à toutes les étapes du dossier et ne pas oublier que nous sommes des mandataires.