Un autre CHSLD visé par une action collective
Radio -Canada
2020-06-01 10:15:00
Le 14 mai dernier, Radio-Canada révélait que les 226 patients hébergés au CHSLD Vigi Mont-Royal avaient tous été infectés par le coronavirus, comme les 148 employés de l’établissement. Une panne du système de ventilation était en cause. Au moins 70 patients sont morts de la COVID-19 dans l’établissement, tandis que 32 autres ont été envoyés à l'hôpital.
Depuis, le système de ventilation et de recirculation de l'air de l’établissement a été réparé et l'immeuble a été complètement décontaminé. La Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) a ouvert une enquête.
Dans le document déposé en Cour supérieure par la succession d'Olga Sarlis, décédée le 28 avril dernier à l’âge de 91 ans, les conditions dans lesquelles la dame est morte sont décrites comme inacceptables.
Les plaignants réclament un dédommagement financier pour les conjoints, les enfants et les petits-enfants des résidents infectés dans ce CHSLD, qu'ils aient survécu ou non. Ils demandent une indemnité de 100 000 $ pour chaque personne qui a perdu un conjoint et une autre de 30 000 $ pour chacun des héritiers.
Pour ceux qui ont survécu à la COVID-19, la demande d'action collective établit le dédommagement pour la souffrance, le stress et les désagréments associés à la COVID-19 à 30 000 $. Des sommes de 10 000 $ pour chacun des enfants d'une personne infectée et de 2500 $ pour chacun de leurs petits-enfants sont aussi réclamées, ainsi que 5000 $ pour chaque aidant naturel qui a pris soin d'un ou de plusieurs patients.
Enfin, la somme de un million de dollars est réclamée à Vigi Santé Ltée, propriétaire du CHSLD Vigi Mont-Royal, à titre de dommages et intérêts punitifs dus au caractère exceptionnel et la négligence grave des fautes du défendeur, précise la demande déposée par la firme Ménard, Martin Avocats.
« Pour nous, ce n’est pas le fait qu’une personne ait eu la COVED qui est reproché. On comprend que le contexte était hors de l'ordinaire », explique Me Patrick Martin-Ménard.
« Ce qu’on reproche à Vigi Mont-Royal c’est de ne pas avoir agi de façon conforme aux règles de l’art pour protéger ses résidents et de ne pas avoir respecté son obligation de faire en sorte que ses installations soient sécuritaires et fonctionnelles. »
Pénurie de personnel, de matériel
Pour les plaignants, les nombreux témoignages en provenance des patients et du personnel de l’établissement présentés en preuve dans la demande d’action collective ne laissent aucun doute sur les conditions qui régnaient dans cet établissement.
« On est passé en à peine deux semaines d’un taux d’infection de 15 % à un taux d’infection de 100 %. À ma connaissance c’est inégalé. Et on constate après ça qu’il y a eu un problème de ventilation », dit Me Patrick Martin-Ménard.
« C’est des choses que la direction savait ou aurait dû savoir, dit-il. La ventilation dans une résidence pour les personnes âgées, c’est fondamental. »
Et cela sans compter les pénuries, souligne l'avocat.
Manque de personnel, manque d’oxygène, de soins d’hygiène de base, pénurie de solutés pour hydrater les patients, décès de patients dans des conditions inhumaines, dont les corps ont été laissés parfois plus de 24 heures dans leur lit : la liste des préjudices subis par les patients de l’établissement énumérés dans le document est aussi longue qu’accablante.
« Il y a eu des pénuries d’équipements de base, on parle de masques, de solutés, de narcotiques, et ça a d’ailleurs été confirmé par le rapport de l’armée qui est sorti hier. Selon le rapport, il y a des cargaisons de narcotiques qui auraient carrément disparu », a révélé Me Martin-Ménard.
Il s’agit d’un traitement indigne et inacceptable pour toutes ces personnes âgées et d’une atteinte à leurs droits fondamentaux, écrivent les plaignants.
La direction de Vigi Santé, pour sa part, ne nous avait pas rappelés au moment d'écrire ces lignes.
Troisième demande d'action collective
Le CHSLD Vigi Mont-Royal est le troisième à être visé par une demande d’action collective au Québec. Il y a tout d’abord eu une demande de recours de 5 millions de dollars à la mi-avril contre le CHSLD Herron de Dorval, où une trentaine de personnes sont mortes.
Quelques jours plus tard, une autre demande d'action collective était déposée devant les tribunaux, cette fois contre le CHSLD de Sainte-Dorothée, à Laval, où une soixantaine de personnes sont décédées ces dernières semaines.