Pas sur le droit québécois
Karim Renno
2015-04-15 14:15:00
Dans cette affaire, les Défenderesses demandent à la Cour de rejeter - au stade préliminaire - l'expertise déposée par un urbaniste pour le compte des Demandeurs. Elle fait valoir que celle-ci ne contient que des constatations factuelles pour lesquelles une expertise n'est pas nécessaire et des prononcés sur le droit québécois, ce qui n'est pas permis.
Après analyse, l'Honorable juge Clément Samson se rallie à la position épousée par les Défenderesses et en vient à la conclusion que l'expertise doit être exclue immédiatement. En effet, il souligne que le droit québécois ne peut être le sujet d'une expertise :
(15) A contrario, quand le rapport d’expertise porte sur des questions juridiques, il doit être exclu. La raison en est simple : le juge est l’expert en matière juridique.
(16) Par exemple, dans l'arrêt IKO Industries Limited c. Produits pour toitures Fransyl ltée, la Cour d'appel écarte les rapports qui, de toute évidence, parce que signés par un avocat, un notaire ou un jurisconsulte, usurpent les pouvoirs du juge.
(17) Dans l’arrêt Landry c. Sainte-Foy, il est décidé qu’un témoin expert ne peut témoigner sur l’interprétation à donner à un règlement municipal.
(18) Pour la même raison, l’expert qui rédige une opinion juridique ne pourrait pas davantage livrer ses conclusions devant le Tribunal. À quoi sert-il de permettre qu’un rapport d’expertise demeure au dossier de la Cour si, d’emblée, devant le juge qui sera saisi du dossier au mérite, il ne servira pas à livrer un témoignage, car irrecevable quant au contenu.
(19) Retirer immédiatement un rapport d’expertise portant uniquement sur des questions juridiques se justifie aussi par le fait que le juge qui doit entendre une affaire ne doit pas être davantage biaisé par un rapport qui se substitue au rôle qu’il doit jouer.
Cette décision s’inscrit dans une longue lignée de décisions similaires – voir par exemple Côté c. Gagnon (2005 CanLII 667)