De la Cour d’appel à arbitre du sport !
Martine Turenne
2017-02-21 15:00:00
Mais outre ses habiletés, justement, dans la médiation, l’arbitrage et les questions juridiques en général, le candidat devait démontrer un intérêt pour le sport. « J’ai passé l’âge de jouer au football ou au hockey sans me blesser! Mais je vais régulièrement au gym ! », dit en riant Me Dalphond.
Plus sérieusement, il est surtout le père d’une ancienne athlète de très haut niveau. Sa fille Isabelle, aujourd’hui avocate à New York, a été championne de badminton. Elle a fait de nombreuses compétitions internationales. «J’ai vu ses joies et ses déceptions. Je comprends les athlètes. Et des moments controversés, j’en ai vécu ! Il y a des décisions subjectives dans le sport. »
Ces « décisions subjectives » se retrouvent souvent au coeur de litiges que doit trancher le TAS, qui a traité plus de 600 procédures en 2016.
Un tribunal indépendant
Le TAS dépend du Conseil international de l’arbitrage en matière de sport (CIAS).
Sa dernière cause célèbre remonte à décembre, lorsque la joueuse de tennis Maria Sharapova a fait appel de sa suspension pour dopage. Celle-ci a été réduite par le tribunal.
« C’est un tribunal privé, très indépendant, dit Me Dalphond. Comme le TAS est situé à Lausanne, il est considéré comme un tribunal arbitral suisse. » Le comité olympique s’assure que chaque fédération sportive soit représentée. Le TAS est composé de 370 arbitres, nommé pour un mandat de quatre ans. Là-dessus, 92 ne sont dédiés qu’au sport le plus populaire et lucratif au monde, le soccer. Tous les pays membres du CIO doivent avoir au moins un juriste sur le TAS. Le Canada en compte 14.
Là-dessus, plusieurs anciens sportifs. Dans le même communiqué qui annonçait, en janvier, l’arrivée de Me Dalphond, le TAS soulignait avec fierté celle d’une ancienne championne de ski australienne, Zali Steggall, médaillée de bronze en slalom aux jeux de Nagano. Elle est devenue avocate spécialisée en droit de la famille et sport.
Le dopage, vedette des litiges
Les questions de dopage d’athlètes sont les plus nombreuses devant le TAS.
Encore là, Me Dalphond avait de l’expérience. «J’ai été juge à la cour criminelle et pénale, dit-il. J’ai aussi eu l’Hippodrome de Montréal comme client. Il s’agissait de chevaux plus que d’humains, mais je connaissais un peu ce système de dopage. »
Lors des Jeux Olympiques, les arbitres du TAS sont sur place, et doivent rendre leur décision dans les 24 heures lorsqu’il y a des plaintes pour dopage. « À chaque jeu, les arbitres sont de plus en plus occupés», note Pierre Dalphond, qui ajoute qu’il n’y a guère de temps pour eux pour admirer les prouesses des athlètes.
Le TAS s’occupe aussi du volet plus commercial du sport, soit les contrats commerciaux, de diffusion, ou de commanditaires.
En fonction depuis le 24 janvier, Me Dalphond attend sa première cause. La plupart sont traitées au siège du TAS, à Lausanne. Un endroit pas du tout désagréable pour passer quelques jours, dit Pierre Dalphond. « Surtout l’été, avec les festivals! »
L’avocat, membre du Barreau depuis 1979, enseigne aussi l'arbitrage interne et international à la faculté de droit de l'Université de Montréal, où il est professeur invité.