Décès de Dennis Edney, l’avocat persévérant d’Omar Khadr
Radio-canada Et Cbc
2024-01-05 10:15:34
Cet avocat avait défendu avec succès Omar Khadr devant la Cour suprême. Il s’est éteint.
L’avocat Dennis Edney est décédé le 30 décembre, à l’âge de 77 ans, a annoncé sa famille.
Il a passé les dernières années de sa carrière à défendre Omar Khadr, un jeune Canadien accusé de terrorisme en Afghanistan et emprisonné à Guantanamo pendant plus d’une décennie.
« Sa pratique juridique reflétait sa passion pour la justice et son esprit indomptable », peut-on lire dans l’avis de décès. « Tragiquement, la démence a pris la vie de cet homme exceptionnel. »
Dans les années 2000, Dennis Edney a commencé à défendre pro bono Omar Khadr, alors incarcéré dans la prison militaire américaine de Guantanamo, à Cuba. Omar Khadr avait été arrêté en Afghanistan en 2002, à l’âge de 15 ans, et accusé d’avoir tué un soldat américain.
Le combat de M. Khadr devant les tribunaux s’est étalé sur plus d’une décennie. Dennis Edney a plaidé trois fois pour lui devant la Cour suprême du Canada.
Au fil des ans, il a remporté trois victoires consécutives devant le plus haut tribunal du pays, au terme desquelles la Cour a notamment reconnu que ses droits fondamentaux avaient été bafoués.
Omar Khadr a finalement été libéré sous caution en 2015. Dennis Edney l’a accueilli chez lui, avec sa femme Patricia, pour les premiers mois de sa vie en liberté. En entrevue à 24•60 en 2016, l’avocat affirmait que sa femme et lui étaient « devenus des parents, des amis, des superviseurs » pour Omar Khadr.
Selon Alex Neve, qui a dirigé le pendant anglophone d’Amnistie internationale Canada pendant l’affaire Khadr, « Dennis était un bagarreur, prêt à se battre pour les droits et la justice ». Il salue son courage et sa persévérance.
« Il a décidé de représenter Omar Khadr très tôt, alors qu'il n'y avait pas beaucoup de sympathie envers son cas », se rappelle-t-il.
Alex Neve souligne également que la situation d’Omar Khadr a permis de rappeler au grand public et au système de justice que les droits de la personne étaient applicables en toutes circonstances.
Dennis Edney a travaillé au dossier d'Omar Khadr avec l’avocat Nathan Whitling, depuis devenu juge à la Cour du Banc du Roi de l’Alberta. Par écrit, il affirme que « Dennis était un grand avocat et un ami. Au cours de toutes mes années de carrière juridique, je n'ai jamais rencontré un avocat plus dévoué envers ses clients. »
L’organisation Avocats sans frontières Canada salue également sa ténacité. Le conseiller juridique de l’organisation, Moussa Bienvenu Haba, affirme que « cette saga a laissé un impact indélébile au Canada sur la manière dont nous faisons les choses. Et on le doit à Me Dennis Edney. »
Pour lui, « l’élément clé » à retenir de l’affaire Omar Khadr est qu’il faut « s’assurer que, si des personnes sont jugées, leurs droits sont respectés ».
En entretien à l’émission Second regard en 2016, il avouait, face à l'ampleur des procédures, avoir considéré au fil des ans l’idée d’arrêter de défendre Omar Khadr.
« Bien sûr que j’ai eu envie d’abandonner [...] mais parfois vous faites face à quelque chose de si injuste que vous ne pouvez pas abandonner », confiait-il.
Il réfléchissait également déjà à son impact sur l’état des droits de la personne au Canada. « J’espère que, quand sera venu le temps de partir, j’aurai contribué à rendre la société meilleure », affirmait-il à l’époque.