La Cour suprême retire les décisions unilingues de son site
Marie-Ève Buisson
2024-11-12 13:15:47
Accès limité aux jugements de la Cour suprême : un recul pour l'accès à la justice ?
À partir de maintenant, seuls les jugements qui sont traduits dans les deux langues officielles seront accessibles en ligne via le site Web de la Cour suprême, a annoncé le Bureau de la registraire dans un communiqué de presse.
Les personnes souhaitant avoir accès à l’ensemble des décisions de la Cour, y compris celles rendues avant 1970, peuvent consulter des bases de données en ligne accessibles à tous.
À l’occasion du 150e anniversaire de la Cour, la traduction des décisions antérieures à 1970 « qui sont les plus importantes d’un point de vue historique ou jurisprudentiel » seront accessibles en français et en anglais sur leur site web.
La semaine dernière, Droits collectifs Québec a déposé une demande à la Cour fédérale pour contraindre le Bureau du registraire, responsable administratif de la Cour suprême, à traduire les anciennes décisions rendues uniquement en anglais par le plus haut tribunal.
Le retrait des décisions unilingues du site web pourrait compromettre les démarches juridiques entreprises par Droits collectifs Québec, malgré les conclusions du commissaire aux langues officielles, Raymond Théberge.
Ce dernier avait affirmé, dans un rapport d’enquête préliminaire en juin et confirmé dans son rapport final de septembre, que l'absence de traduction des jugements antérieurs à 1969 constituait une violation de la Loi sur les langues officielles, selon la Presse canadienne.
Retirer plutôt que de traduire
« Plutôt que de se décider à bel et bien traduire officiellement ses décisions en français, la Cour suprême nous sert plutôt un « après moi, le déluge » et a choisi de carrément supprimer la totalité des décisions antérieures à 1970 de son site web », mentionne Droits Collectifs dans un communiqué.
Selon l’organisme, la Cour suprême choisit de retirer les décisions de l’accès au public que de devoir les traduire en français.
« Non seulement ce geste unilatéral ne règle pas toutes les questions litigieuses soulevées par DCQ, que la CSC a choisi de faire face à la situation avec la pire des solutions possibles, soit en sacrifiant l’accès à la justice et à l’information jurisprudentielle pour l’ensemble des Canadiens et Canadiennes », conclut Droits Collectifs Québec.
Traduction
Entre 1877 et 1970, la Cour a publié environ 6000 jugements, dont certains en français, d’autres en anglais, et quelques-uns dans les deux langues officielles.
Avec l’adoption de la Loi sur les langues officielles en 1970, le Bureau du registraire a instauré une politique exigeant que tous les nouveaux jugements soient disponibles en français et en anglais.
En 2019, « le Bureau du registraire a pris des initiatives pour rendre accessibles en ligne l’ensemble des décisions de la Cour », y compris celles rendues avant 1970.
Toutefois, le Commissaire aux langues officielles a rappelé que les jugements rendus avant cette date n'étaient pas obligés d’être publiés dans les deux langues, « puisque la Loi sur les langues officielles n’est pas rétroactive ».
Les avocats du gouvernement seront favorisés, une fois de plus.