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La profession notariale a-t-elle l’attention qu’elle mérite ?

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Camille Dufétel

2023-07-04 14:15:00

Des notaires estiment que leur profession devrait être rehaussée dans la province et recevoir la valeur qu’elle mérite. Droit-Inc en discute avec l’un d’entre eux.
Me Hélène Potvin, Me Roberto Aspri et Peggy Mavroudis. Sources: Aspri notaires et LinkedIn
Me Hélène Potvin, Me Roberto Aspri et Peggy Mavroudis. Sources: Aspri notaires et LinkedIn
Dans une récente publication sur LinkedIn, Me Hélène Potvin, présidente de la Chambre des notaires du Québec, se réjouissait de constater que pour la première fois de son histoire, la présidence de l’organisme Éducaloi était occupée par un notaire, en l'occurrence Me Michel Beauchamp.

« Une autre façon, pour la profession, d’augmenter son pouvoir d’influence dans la société et plus particulièrement en matière d’accès à la justice », a-t-elle écrit.

De son côté, Peggy Mavroudis, parajuriste à son compte forte d’une expérience de plus de 20 ans dans le domaine notarial, publiait il y a peu une réflexion sur l’importance de rehausser la profession notariale, en mettant en avant la mission de l’Union des notaires du Québec.

Celle-ci a plusieurs objectifs dont la défense et la protection de la profession et de ses membres, ainsi que l’instauration d’un tarif contrôlé et le partage des ressources entre les notaires.

Pour Peggy Mavroudis, les parajuristes pourraient d’ailleurs bénéficier de l’amélioration des conditions de travail des notaires. Selon elle, cela permettrait à ces derniers « d'être plus compétitifs en matière de salaires et donc de retenir les services de parajuristes expérimentés et de grande qualité ».

Droit-Inc a ainsi souhaité échanger sur le sujet avec Me Roberto Aspri, qui a fondé l’Union des notaires du Québec. Ce dernier précise au passage qu’il y a à peu près 4000 notaires au Québec. Environ 2800 font de la pratique traditionnelle et les autres travaillent comme employés pour des banques, des municipalités, le gouvernement…

Pensez-vous que la profession de notaire n’est pas assez mise en avant au Québec, et pourquoi ?

Disons que le notaire au Québec est un professionnel auquel on pense seulement quand on en a besoin, par exemple pour l’achat d’une propriété, pour faire un testament, un contrat de mariage…

Il suit pas mal les grands événements des gens, mais mis à part cela, il n’est pas vraiment très connu, on ne sait pas vraiment ce qu’il fait comme travail. On voit le résultat final, trois ou quatre pages signées, mais on ne sait pas vraiment tout ce qui est en arrière de cela. Ce n’est que la pointe de l’iceberg.

C’est dommage, je pense que les notaires gagneraient à faire valoir leur importance et leur valeur ajoutée aux transactions.

Quelles sont les spécificités du notaire ? Qu’est-ce qui le différencie concrètement d’un avocat ?

Le notaire n’interviendra pas dans des choses litigieuses. Il se concentre sur les conventions entre les parties, qu’il s’agisse de conventions de vente ou patrimoniales, de règlements de succession… C’est un officier public, il est impartial.

Un avocat défend son client contre un autre client qui a son avocat. Le notaire doit protéger les deux parties. Les premières années de l’université sont similaires, pour l’avocat et le notaire, mais ça commence à se distinguer, je dirais, à la troisième année.

Avec quel objectif avez-vous fondé l’Union des notaires du Québec ?

Je l’ai fondé avec un collègue, Me Robert Jean, nous avons commencé ce mouvement il y a environ huit ans. Notre rôle est vraiment de faire le contrepoids, si on veut, à notre ordre professionnel, dont la mission est la protection du public.

Nous, notre mission, c’est la protection des notaires. Nous avons déjà accompli certains projets, par exemple, nous sommes allés chercher notre propre régime d’assurance médicaments, nous avons fait une affiliation avec la FTQ pour leur force de lobbying, ce qui est une première parce que les syndicats professionnels n’étaient pas affiliés à une grande centrale.

Nous avons également désormais le compte UNI(ON), un compte en fidéicommis à transit unique. On est en train de mettre sur pied le portail de l’UNQ, pour partager des ressources et des compétences notariales.

Cette plateforme va pouvoir répartir le travail des notaires à travers la province. Par exemple, si un collègue vient de perdre sa collaboratrice pour cause de maladie, il pourra se faire aider grâce au portail par des collègues qui ont plus de temps pour lui prêter main forte.

On a fait aussi des actions pour protéger la profession, des requêtes ou mises en demeure dans des cas où il y avait des organismes ou des compagnies qui venaient dans le champ des notaires, nous causer des dommages, etc.

On a créé le fonds patrimonial des notaires. Et il y a notre tarif obligatoire qu’on est en train de discuter. Les notaires ici au Québec avaient un tarif obligatoire minimum qui a été abrogé en 1991, parce qu’il n’était pas respecté.

On veut le remettre en vigueur parce que ça donnerait une façon de protéger la profession. On veut suivre une logique professionnelle et non pas une logique marchande. On se base sur la qualité et non sur le volume. Un tarif obligatoire minimum protégerait la pérennité de la profession. Le public y gagnerait en qualité de travail.

Pourquoi est-ce si important pour vous de mettre davantage en avant la profession de notaire au Québec ?

Le notariat est une institution qui était ici au Québec avant la profession d’avocat. Au début de la colonie, c’était le notaire qui représentait la justice. Tout le système judiciaire était relié au notariat. Par la suite, le système anglophone s’est implanté. Certains actes sont restés dans les mains des notaires, mais le reste est passé du côté des avocats.

Nous croyons que le notaire est important parce qu’il se spécialise dans des conventions, dans tout ce qui s’appelle le non-litigieux. Le notaire, par son caractère impartial, est comme un magistrat. Il a un degré de confiance assez important chez le public, ce serait bête si on le laissait dépérir.

Lorsque le ministre Jolin-Barrette a ouvert la porte à la magistrature aux notaires, justement ce caractère d’impartialité était très important, et on l’a déjà.

Comment pourrait-on mettre la profession notariale davantage sur le devant de la scène ?

Je crois que les notaires devraient être un peu plus présents non seulement sur les réseaux sociaux, mais également dans le milieu. Par exemple, il survient un événement et on voit qu’à la télévision, des avocats vont être interviewés, ou des juges… C’est rare qu’on demande l’opinion d’un notaire, sa perspective par rapport à un événement. En Europe, en France, c’est l’inverse.

Quelle est votre priorité aujourd’hui ?

C’est sûr que le tarif obligatoire, si on réglait ce volet, 85 % de la problématique dans la profession serait réglée. On irait vers une situation où le professionnel est payé de façon juste et raisonnable. Il s’agirait d’un tarif obligatoire minimum qui serait contrôlable avec un logiciel qui générerait des factures.

On s’est engagé à faire une vaste campagne médiatique pour expliquer le travail du notaire, parce que quand on ne le sait pas, tout semble excessif et abusif…
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3 commentaires
  1. Simart Gilles
    Simart Gilles
    il y a un an
    Médiateur accrédité
    Concernant la nouvelle parue sur le réseau Droit-Inc. du 4 juillet 2023, un élément retient l’attention: « le notaire n’interviendra pas dans des choses litigieuses » …

    Tout notaire n’est pas sans savoir qu’en amont des procédures judiciaires, le Code de procédure civile (CPC) prescrit des principes de procédure applicable aux modes privés de prévention et de règlement (PRD), qui sont principalement la négociation entre les parties d’un différend, de même que la médiation ou l’arbitrage dans lesquelles les parties peuvent faire appel au notaire (art. 1-7 CPC).

    On y retrouve ainsi le notaire qui dans le cadre de sa mission envers le public, a les devoirs et les obligations suivantes :

    « Le notaire doit favoriser les mesures de formation et d’information du public dans les domaines où il exerce sa profession.

    Il doit également, en matière de règlement des conflits, favoriser toute mesure susceptible d’encourager les règlements amiables et ainsi le public des mécanismes offerts. » (Code de déontologie des notaires, RLRQ, c. N-3, r. 2, art. 3)

    L’art. 3 al. 1 CPC ne prescrit-il pas que les parties doivent considérer le recours aux modes privés de PRD avant de s’adresser au tribunal, alors que maintenant l’art. 7 CPC prévoit désormais qu’une demande est instruite en priorité, dans toutes les matières autres familiales, si elle est accompagnée d’une attestation délivrée par un médiateur accrédité ou un organisme offrant la médiation en matière civile.

    Au-delà de l’affirmation à l’effet « que le notaire est important parce qu’il se spécialise dans des conventions », il faut reconnaître que l’image distinctive du notaire passe par la promotion et la reconnaissance de ses différents rôles auprès du public et de la communauté juridique, entre autres : officier public, auxiliaire de justice, conseiller juridique, rédacteur d’acte notarié, négociateur, médiateur, arbitre, juriste de l’entente, notaire accrédité en procédure non contentieuse et en matière de reconnaissance au majeur, etc.

    Ainsi, depuis l’avènement du Code de procédure civile en 2016, plusieurs changements à la justice civile militent en faveur d’une pratique notariale renouvelée. Cela va bien au-delà d’une simple mission de la protection du notaire.

    Pour la Chambre des notaires :

    « La fonction stratégique des notaires comme officiers publics au sein de l’État québécois, leurs rôles de juristes impartiaux auprès des citoyens et citoyennes, leurs fonctions sociales, la grande répartition géographique des notaires et l’accessibilité à leurs services constituent des atouts de premier ordre. » (Chambre des notaires du Québec, mémoire sur le projet de loi 18 instituant le nouveau Code de procédure civile, 10 septembre 2013).

    Me Gilles Simart, notaire et médiateur accrédité (LL.B., D.D.N. LL.M.)

  2. Anonyme
    Anonyme
    il y a un an
    Le notatiat devrait être fusionné avec la profession d'avocat
    Il ne devrait y avoir qu'un ordre professionnel pour les juristes.

    En administrant des examens pour différentes branches du droit, et en exigeant possiblement certains prérequis universitaire, on pourrait tout fusionner. Les comptables l'ont fait.

  3. Me Gilles Simart, notaire
    Me Gilles Simart, notaire
    il y a un an
    Médiateur accrédité
    La question de fusion des ordres professionnels revient …

    En bref, en rapport avec les différentes branches du droit qui sont généralement le droit privé (rapports entre les personnes) et le droit public (relations entre les personnes et l’État), un rapprochement des deux ordres professionnels, et non une fusion, permettrait de soutenir la modernité du notariat au service des personnes et des juristes.

    Au-delà d’assurer la protection du public qui est une fonction principale de chaque ordre professionnel, tout autant que l’exercice professionnel de ses membres et d’une possible concurrence, le Code de procédure civile représente une opportunité de développer la spécificité notariale en prévention et règlement des différends (PRD).

    L’acte notarié, dans son essence, est une procédure de PRD qui peut être utilisée par les personnes dans le règlement de leur différend, même pendant un processus judiciaire. L’entente en résultant peut être sous la forme notariée (art. 2818-2819 C.c.Q.) qui correspond à un mode privé de PRD (art. 1, al. 2 et 6 C.p.c.) et à une justice civile privée pour les personnes.

    D’autant que selon la Loi sur le notariat, le notaire dans son rôle d’officier public a pour mission de constater que les termes et conséquences d’une entente de médiation soient compris par les personnes et correspondent à leurs volontés : la sécurité juridique.

    Il faut reconnaître que le Code de procédure civile vise à permettre, dans l’intérêt public, la prévention et le règlement des différends et des litiges, par des procédés adéquats, efficients, empreints d’esprit de justice et favorisant la participation des personnes.

    Il revient aux membres des ordres professionnels d’y donner suite, dans un esprit de collaboration.

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