L’affaire Khuong sous la loupe

Céline Gobert Et Daphnée Hacker-B.
2015-07-03 15:00:00

En ne prévenant personne au Barreau, Me Lu Chan Khuong a crée une mauvaise surprise et a brisé le lien de confiance. « Elle aurait dû le dire, car elle sait que tout finit par se savoir », dit quant à lui Me Lapointe, qui a été directeur de l’École du Barreau de 1995 à 2001. L’avocat à la retraite rappelle que Lu Chan Khuong est devenue vice-présidente du Barreau du Québec au cours du même mois où elle a obtenu la déjudiciarisation de son dossier (juin 2014). «Ce n’est pas une affaire qui remonte à plusieurs années, c’est tout récent. Elle aurait dû le déclarer avant les élections, quitte à perdre», lance-t-il.

De plus, le procureur est le seul à disposer des détails du dossier, en plus bien sûr de Me Khuong. « Les procureurs ont accès au registre dans le cadre de leur travail, mais les seules informations qu'ils y trouvent sont le nom du contrevenant et la date et le type d'infraction », a-t-il indiqué.
Qu’en est-il de la présomption d’innocence ?

Il rejoint ainsi l’opinion émise par l’ex-directeur général Claude Provencher. En entrevue avec Droit-inc, il rappelle qu’il n’y a ni accusation, ni condamnation, et une explication crédible non contredite. «Le rôle premier des avocats est de défendre la présomption d’innocence. En agissant de la sorte, le C.A. se discrédite lui-même», a-t-il déclaré.
Avait-elle une obligation légale et/ou morale d’en informer le Barreau ?

Car, poursuit Me Guay, la déjudiciarisation du dossier de Me Khuong signifie qu’il n’y a pas eu d’accusation. L’avocat de la Couronne qui a rencontré Me Khuong pour statuer sur son cas a jugé bon de ne pas donner suite à la plainte. Cela veut dire que le dossier n’a pas été ouvert, et qu’il ne s’est jamais rendu au procès. « Il s’agit donc d’une information qui relève du domaine privé », précise Me Guay.

Que va-t-il se passer maintenant ?

« Quand on reproche quelque chose à quelqu’un, il faut cibler avec précision ce qu’on lui reproche. » D’autant plus, ajoute Me Boulet, quand des mesures aussi drastiques qu’une suspension sont prises. « Le Barreau lui reproche son manque de transparence… mais en vertu de quelle obligation ?».
Pour Me Richard Philippe Guay, la bâtonnière Khuong pourrait très bien porter plainte pour diffamation.
En attendant le dénouement…
Selon le Règlement sur les élections du Barreau, en cas d’absence ou d’empêchement du Bâtonnier d’exercer ses fonctions, « le vice-président désigné à cet effet par le Conseil d'administration le remplace».
Le Barreau compte présentement deux vice-présidents: Antoine Aylwin, de Montréal et Louis-François Asselin, du Barreau de Laurentides-Lanaudière. Les deux juristes ont appuyé le candidat défait Luc Deshaies aux élections du Barreau du Québec le 22 mai dernier.
En cas de changement de bâtonnier, l’article 81 du Code des professions prévoit qu’un vote ait lieu au sein du C.A., afin qu’un administrateur élu puisse assurer le rôle jusqu’à la fin du mandat. Le Code stipule aussi qu’un autre mode peut être utilisé, ouvrant la possibilité de tenir de nouvelles élections.
À suivre…
!