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Leur terrain s’effondre : des résidents de Sainte-Thérèse gagnent contre la Ville

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Radio-canada Et Cbc

2024-03-13 13:30:06

Mes Josée Bergeron et Louis Béland. Sources:St-Aubin Avocats et DHC Avocats
Les cours d’eau causent parfois bien des maux de tête aux propriétaires riverains. Les avocats…

« Cet été, ça s’est vraiment… tout s’est écroulé, encore plus que ce que c’était. »

Nous sommes en décembre 2023. Jean-Pascal Orsoni et sa conjointe, Pascale, nous invitent dans leur cour arrière, un grand terrain en pente entouré d’arbres matures. La piscine creusée a connu des jours meilleurs, de même que l’aménagement paysager. La pergola, une grande structure en bois, est à l’abandon pour des raisons de sécurité.

C’est ici, sous la pergola, que les dommages sont les plus visibles. Le sol, où reposent des dalles de pierre, s’est affaissé. Il ne reste que quelques rangs de pavés instables.

Une cour dangereuse depuis 2020

La facture s’était rendue sur place un an et demi plus tôt. Déjà, les dégâts étaient considérables. À l’origine de ces effondrements du sol, les ingénieurs blâmaient une canalisation bloquée, désuète et mal remblayée, construite six mètres sous le sol dans les années 1980.

« On promenait notre chien et le sol s'est affaissé sous son poids! Il a cavalé en s’appuyant sur les dalles, qui chutaient avec lui » raconte Pascale Orsoni.

Au moment de l’incident, la Ville a sécurisé les lieux et a publié un appel d’offres pour réparer le tuyau. Le plus bas soumissionnaire proposait de réaliser les travaux pour 477 000 $, une facture trop onéreuse, selon Sainte-Thérèse, qui a tout annulé. Les Orsoni étaient sous le choc. Ils ont décidé de poursuivre la Ville, convaincus d’être dans leurs droits.

« Six mètres sous terre, il y a de l'eau qui continue à égrener le sol. C'est la surprise, une épée de Damoclès au-dessus de nos têtes », se désolait Pascale Orsoni.

Alors, qui doit payer les travaux? La Ville, qui est responsable des cours d’eau ou les Orsoni, qui héritent du problème?

Nous avions demandé l’avis de l’avocate en droit municipal, Audrey-Anne Béland. Elle nous expliquait que « les propriétaires ne pourraient pas être tenus responsables, puisqu’ils n’ont pas causé l’obstruction du tuyau ».

Elle soulignait aussi que la Ville utilise cette canalisation, parce qu'elle est intégrée à son réseau d'égout pluvial. Elle doit donc faire les travaux et les payer, puisque c’est son obligation d'intervenir rapidement.

Le combat judiciaire

Sainte-Thérèse ne partageait pas ce point de vue. Selon la Ville, les Orsoni seraient les seuls responsables de la réparation du tuyau, notamment parce qu’il s’agirait d’une canalisation privée. Mais cet argument n’a pas convaincu la juge de la Cour supérieure, qui écrit : « De l’avis du Tribunal, aucun de ces moyens de défense n’est fondé ».

Dans son jugement, elle donne raison aux Orsoni sur toute la ligne.

« On a gagné! La juge force la Ville à faire les travaux. C’était le point principal qu'on cherchait, évidemment. On est très contents », s’exclame Jean-Pascal Orsoni.

Sa conjointe, Pascale, partage son soulagement, mêlé d’amertume. « On est extrêmement satisfaits, mais moi, j'ai un sentiment d'énorme gâchis, de perte de temps, d’argent », déplore-t-elle.

C’est que le combat a été long et coûteux; des milliers de dollars en frais d’experts, sans compter les autres types de dommages, comme le stress vécu depuis des années et l’impossibilité de profiter de la cour. Pour ces raisons, la Cour supérieure accorde aux Orsoni un montant de 75 000 $.

« Ç'a été très difficile, psychologiquement, parce que la vie continue, le travail, les enfants, tout continue. C'est triste que l'on soit obligé de se battre. Je ne trouve pas ça normal », dit Jean-Pascal Orsoni.

Nous avons rencontré le maire de Sainte-Thérèse, Christian Charron, pour avoir sa réaction au jugement. « On comprend que ç'a été difficile pour eux. Pour la Ville aussi, c’est un processus qui a été long. [...] Le tribunal a tranché. On aurait pu faire appel, mais nous avons décidé de respecter la décision, puis de régler la situation une fois pour toutes », confie le maire.

Une solution à 820 000 $

Le tribunal a ordonné à la Ville de réparer le tuyau et de tout remblayer, comme si aucun effondrement n’avait jamais eu lieu. Mais Sainte-Thérèse a un autre plan en tête : restaurer le ruisseau à son état original. Autrement dit, elle compte retirer le remblai, enlever le tuyau et laisser le ruisseau couler librement, ce qui va considérablement réduire la superficie du terrain.

« La décision de canaliser, de remblayer, puis d'installer une piscine, ce n’était pas la meilleure idée. On refait ce qui aurait dû être fait à l'époque, de laisser le ruisseau à l'état naturel »’ explique Christian Charron, maire de la ville de Sainte-Thérèse.

Pour réaliser son plan, la Ville propose aux Orsoni d’acquérir leur propriété. « Ils savaient que nous étions pressés de vendre la propriété. Ils nous ont fait une première offre. On a fait notre contre-offre », témoigne Jean-Pascal Orsoni.

Finalement, les parties s’entendent pour clore la vente à 820 000 $. « On a eu ce qu’on voulait. Ça nous permet de quitter la maison le plus vite possible. »

De son côté, la Ville a l’intention de faire les travaux cette année et de revendre la propriété. Comme l’explique le maire Christian Charron, « il faut prendre en considération qu'en vendant la maison, nous allons récupérer une partie de l'investissement. C'est plus avantageux. »

La fin d’un long chapitre

Pour l'une des dernières fois, Pascal jette un œil sur sa piscine creusée. « Quel gâchis, cette piscine. Je ne sais pas s’ils vont la garder ou la démolir. » Sans hésiter, Pascale répond : « Bien franchement, je m’en moque complètement. »

Ce terrain, qu'ils ont tant aimé, s’est transformé en gouffre financier et émotif. Aujourd’hui, le couple peut finalement tourner la page, comme le résume Pascale. « La justice est là pour nous protéger. Il ne faut pas baisser les bras. Maintenant, on peut finalement passer à une autre étape de notre vie. »


Jean-Pascale et Pascale Orsoni étaient représentés par Me Josée Bergeron du cabinet Grégoire Perron Avocats. La Ville de Sainte-Thérèse était représentée par Me Louis Béland du cabinet DHC Avocats.
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