Super Samet s’attaque à Uber et Téo!
Jean-francois Parent
2017-04-18 15:00:00
Concurrence déloyale, conditions dérogatoires à la loi, iniquités envers certaines catégories de consommateurs, non respect du droit à la mobilité, incompatibilité avec la Loi sur la protection du consommateur...
Les arguments appuyant la plus récente salve juridique de Gérard Samet, avocat chez Colas Moreira Kazandjian Zikovsky sont nombreux. Et soulèvent certains aspects troublants—voire illégaux—d'une réforme de l'industrie du transport par taxi péchant par excès d'inéquité.
C'est du moins ce qu'affirme celui que les lecteurs de Droit-Inc connaissent sous le sobriquet de Super Samet : « On demande au tribunal de statuer sur l'équité des projets pilotes » autorisant Téo et Uber à offrir du transport par taxi.
Concurrence déloyale
La requête en action collective déposée fin mars au palais de Justice de Québec soutient que la distribution de permis de transport à Uber et à Téo causent « des effets préjudiciables aux propriétaires de permis de taxi ».
Un chauffeur de taxi de Québec, Japic Zaim, et une militante des droits des personnes handicapées, Lisa D'Amico, demandent à la Cour supérieure l'autorisation d'intenter un recours collectif contre Uber, Téo Taxi et une pléthore d'organismes publics.
La requête a été déposée le 29 mars et rendue publique lundi au palais de justice de Québec.
Alors que les propriétaires traditionnels de permis de taxi québécois ont déboursé jusqu'à 200 000 dollars pour avoir le droit de transporter des clients, Uber se voit octroyer des centaines de permis « quasi-gratuits ». Ils ne sont pas vendus selon les conditions normales de marché.
En outre, alors que l'industrie traditionnelle doit respecter plusieurs contraintes réglementaires, Uber « capitalise sur les gains financiers importants liés à l'évitement des contraintes réglementaires et législatives de la concurrence classique », s'indigne Me Samet.
Quant à Téo, l'accès à des permis à rabais indisposent les demandeurs.
Dérogations multiples
Autre série de questions auxquelles la requête veut obtenir des réponses : « Est-ce que les ententes offertes par Québec sont licites? », poursuit Me Samet.
« Selon la loi sur le transport par taxi, seuls les propriétaires de véhicules peuvent obtenir un permis de taxi. Or, Uber, qui est propriétaire des permis, ne possède pas de véhicules, tandis que les chauffeurs d'Uber, eux, ne possèdent pas de permis. »
Il s'agit donc pour les représentants du recours, un chauffeur de taxi de Québec et une militante des droits sociaux de Montréal, de demander à un juge de déterminer si l'entente intervenue entre Québec et Uber est conforme à la Loi sur les services de transport par taxi.
Traitement de faveur à PET?
Problème supplémentaire, tant Uber que Téo se sont vus accordés des places à l'Aéroport de Montréal à des conditions tellement peu contraignantes qu'elles sont également jugées déloyales envers les taxis traditionnels. Par exemple, Téo a reçu une douzaine de place sans avoir à participer au tirage au sort habituellement fait, et sans payer les 4 167 $ que coûte chacun de ces permis.
« Notre objectif n'est pas de juger les pratiques d'Uber et de Téo, mais de s'assurer que les règles du jeu sont les mêmes pour tout le monde. » D'ailleurs, même le propriétaire de Téo, Alexandre Taillefer, est d'avis qu'un mécanisme de rachat des permis devrait être mis de l'avant pour compenser le manque à gagner des propriétaires de flotte traditionnelle, fait remarquer Me Samet. « Les ententes actuelles confèrent un avantage indu aux nouveaux joueurs. En Europe notamment, on a dédommagé les chauffeurs traditionnels. »
Et les clients à mobilité réduite ?
Les dangers posés par Uber et Téo ne s'arrêtent pas là, poursuit Super Samet. « Alors qu'on exige des services de transport de se doter d'équipement adapté pour les personnes à mobilité réduite, rien n'est prévu dans les ententes pour forcer les nouveaux joueurs à faire de même », déplore-t-il.
Québec renie ainsi ses engagements internationaux, de même que ses propres lois sur la mobilité, et ne tenant pas compte des besoins de ces clientèles.
« C'est quand même incroyable qu'on créé de nouveaux services publics sans se préoccuper de transport adapté! On ne demande même pas à Uber d'avoir quelques voitures adaptées », tonne Me Samet, qui s'indigne en outre que « tous les grands principes sur la mobilité sont battus en brèche ».
Enfin, la requête tente également d'obtenir un jugement sur la conformité des services à loi sur la protection du consommateur. « Est-ce que l'utilisation de carte de crédit pour retenir une voiture, donc avant d’avoir reçu le service, fait en sorte que le paiement est une garantie? », poursuit Me Samet, qui demande à la cour de statuer sur la conformité de ces pratiques à la Loi sur la protection du consommateur.
« Sans compter que l'exigence d'utiliser une carte prive plusieurs personnes de ce service; les handicapés sans travail n'ont pas accès facilement à ces produits », ils ne pourraient donc même pas utiliser des véhicules adaptés s’ils existaient.
Pour lire la requête, cliquez ici.