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Un an plus tard, l’arrêt Jordan hante les victimes

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Radio -Canada

2017-07-06 10:15:00

Près de 950 requêtes en arrêt des procédures pour délais déraisonnables ont été déposées depuis un an, des chiffres accablants pour les victimes...
Lise Castonguay
Lise Castonguay
Alors qu’un présumé meurtrier, Sivaloganathan Thanabalasingham, est déporté aujourd’hui dans son pays d’origine sans être jugé, les victimes et leur famille vivent dans la peur que l'arrêt Jordan marque une fin cruelle au processus judiciaire qu'elles traversent....

Après 12 mois, le système judiciaire assure que la crise des délais judiciaires est enfin terminée, même si de nouveaux problèmes ont émergé.


Aucune date fixée près d’un an après le meurtre

Lise Castonguay ne prononce jamais le nom de l'assassin allégué de sa fille. Lorsqu'elle y fait allusion, son regard se durcit, ses lèvres se serrent et ses propos sont sans équivoque : nul doute qu'elle parle de « lui ».

Cet homme, c'est Maxime Labrecque, l'ex-conjoint et père des deux enfants d'Isabelle Lavoie, 31 ans. Il est accusé d'avoir poignardé à mort la mère de famille dans son logement de Saint-Hyacinthe, trois semaines après leur rupture.

Dix mois après son arrestation, Maxime Labrecque est détenu et aucune date n'a encore été fixée pour son enquête préliminaire, et encore moins pour son procès.

Lise Castonguay et ses proches ont vu avec effroi trois meurtriers allégués obtenir un arrêt des procédures au Québec à cause des délais déraisonnables. Les mois s'écoulent vite, et Mme Castonguay craint déjà que le plafond de 30 mois soit dépassé.

« C'est très pénible, affirme-t-elle doucement. On ne fera pas notre deuil tant qu'il ne sera pas condamné. Mais là c'est toujours reporté, comment peut-on faire notre deuil? »

Le 8 juillet 2016, la Cour suprême a établi dans l'arrêt Jordan que les procédures judiciaires ne doivent pas excéder 18 mois en cour provinciale et 30 mois en Cour supérieure. Au-delà de ces limites, les délais peuvent être considérés comme « déraisonnables » et mener à l'arrêt des procédures.


Une amélioration notable

Près de 950 requêtes en arrêt des procédures pour délais déraisonnables ont été déposées au Québec depuis un an.

Environ 145 décisions ont été rendues et 68 d'entre elles ont mené à l'abandon des accusations. Une grande proportion de ces décisions concernaient des dossiers de conduite avec les facultés affaiblies.

Jacques R. Fournier
Jacques R. Fournier
Le juge en chef de la Cour supérieure, Jacques R. Fournier, partage l'indignation de la population. « La population est outrée, et elle a raison. Elle a raison d'être outrée », dit-il.

Si de longs mois peuvent s'accumuler avant l'enquête préliminaire, comme dans le cas de Maxime Labrecque, M. Fournier affirme que les procédures judiciaires s'accélèrent ensuite.

Depuis un an, la crise a permis de réduire de 30 à 17 mois le délai entre la fin d'une enquête préliminaire et le procès.



Des conséquences inquiétantes

Une bonne nouvelle, qui comporte toutefois un revers, selon le juge en chef. « Pendant ce temps-là, le cancer des retards est en train de gruger les délais ailleurs. »

Les cours civiles sont engorgées et les causes familiales prennent du retard parce que des juges ont été déplacés vers les cours criminelles.

Le magistrat plaide pour un changement de culture chez les avocats. « Il faut qu'on arrête de perdre du temps dans des débats qui sont stériles, soutient-il. Le nombre incalculable de requêtes il faut que ça cesse (...) Il faut que le juge prenne le contrôle de sa salle d'audience. »

Jacques R. Fournier dénonce aussi les procès civils entre citoyens fortunés qui s'étirent inutilement. « On ne peut plus avoir des procès de 60 jours dans un divorce. Je l'ai vu, je trouve cela scandaleux. »

Annick Murphy
Annick Murphy
« L'hécatombe annoncée n'a pas eu lieu », affirme la directrice des poursuites criminelles et pénales, Annick Murphy, qui est convaincue que tous les dossiers ouverts depuis l'arrêt Jordan vont se conclure à temps.

L'année qui s'est écoulée a été essoufflante pour les procureurs qui se sont montrés proactifs, selon Me Murphy.

« Ils s'adressent aux avocats de la défense, évaluent leurs dossiers, préparent les admissions possibles, vont voir les juges, demandent un processus de facilitation. Il y a énormément de choses », dit-elle.
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4 commentaires
  1. DSG
    I saw this on tv
    The mother of that woman who was killed by her boyfriend broke my heart. And the rest of them just deflect the blame onto others. The judge said that it's the lawyers who bog down the system with needless motions. Like no kidding. I realized that when I was a stagiaire, years ago. You want to know what's causing the delays? Go see the empty hallways at the courthouse on a Friday afternoon or on any other day during the months of July and August.

  2. En réflexion
    En réflexion
    il y a 7 ans
    Les oeufs se retrouvent dans les mêmes trousses
    Si on investiisait plus que 1% du budget de la province pour faire rouler le système de la justice et que le fédéral y mettait du sien, on n'en serait pas là. Losqu'on a les moyens de payer les médecins spécialistes 500K à un million et plus par tête par année...(allez voir les chiffres, c'est renversant!)soit jusqu'à 20 fois et plus le revenu médian c'est qu'indéniablement, les ressources y sont mais que sa distribution est aberrante. Après tout, ils ne sont pas les seuls au Canada à poursuivre de longues et savantes études.

    • DSG
      Pas comparable
      First of all you may cherish your diploma from your bac, but you can't compare that to a medical degree. I'm sure I'm not the only one, but if I wasn't a complete zero in math I would never have chosen this miserable profession. As for pay, doctors cure ailments whereas we for the most part cause them.

    • SBS
      YEP!
      One of your best comment DSG! Can't believe someone is actually comparing the work of a lawyer to the work of a doctor.

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