Un cabinet montréalais poursuivi pour 13 M$
Mathieu Galarneau
2020-02-06 15:00:00
Hilco a embauché Me Karim Renno de Renno Vathilakis pour défendre ses intérêts dans cette histoire. Ce dernier n’a pas voulu commenter l’affaire.
Joint par Droit-inc, Me Kandestin a nié toute responsabilité dans ce litige, mais n’a pas voulu émettre davantage de commentaires ni même fournir le nom de ses avocats engagés pour le représenter.
En 2009, Hilco se tourne vers Kugler Kandestin pour l’aider dans l’achat de l’équipement d’Aleris, une usine d’aluminium en faillite. Mais le syndic de la vente choisit de vendre à Tim Martinez et sa compagnie Koenig & Viks (KV), malgré plusieurs offres de Hilco.
Si Koenig & Viks ne conclut pas la transaction, une seconde entreprise, Corporate Assets, peut alors accoter KV et partir avec les biens.
Hilco apprend que Koenig & Viks a justement besoin de financement pour conclure l’acquisition des biens au prix prévu. Hilco et KV commencent à travailler ensemble pour mettre la main sur les équipements.
Un prête-nom
Hilco se tourne alors vers Kugler Kandestin pour s’assurer de bien faire les choses dans les règles du droit. Le cabinet soumet alors l’idée que pour que le syndic accepte la transaction, seule Koenig & Viks doit apparaître dans les documents d’achat. Hilco devrait alors se servir de Koenig & Viks en tant que prête-nom.
Kandestin suggère également d’agir comme avocat de Koenig & Viks, question de « contrôler le dialogue » avec le syndic et empêcher qu’il découvre l’implication de Hilco, assurant que toute cette démarche était « légale, appropriée et éthique », selon ce qui est écrit dans la poursuite.
Corporate Assets, ayant eu vent de l’implication de Hilco dans l’achat de KV, s’adresse alors à la Cour supérieure, contestant la transaction. « Les défendeurs (Kugler Kandestin) savaient ou auraient dû savoir que les arrangements de prête-nom et les déclarations connexes qu'ils avaient faits au syndic et au tribunal de faillite ont exposé Hilco à une réclamation valide de Corporate Assets pour ingérence délictuelle », reproche Hilco dans la demande introductive d’instance.
Puis, Kugler Kandestin a omis, selon la poursuite, d’indiquer à Hilco que la Cour avait retenu les revendications de Corporate Assets contre Hilco.
La compagnie américaine allègue donc que le cabinet a commis une faute professionnelle en la conseillant d’utiliser un prête-nom, d’avoir utilisé des documents devant la Cour et le syndic signifiant que Martinez et Koenig & Viks étaient les seuls acheteurs, en la conseillant de continuer ces tactiques en sachant qu’elles consistaient en de l’ingérence délictuelle, et d’avoir omis de la conseiller de s’afficher comme la véritable acheteuse des biens.
Un litige coûteux
Koenig & Viks et les compagnies mises en place par Kugler Kandestin pour brouiller les pistes de Hilco finissent par pouvoir acheter la machinerie d’Aleris. Hilco vend le matériel en mars 2010 et réalise un profit net de 9 792 633 $US.
En juillet 2011, Corporate Assets s’adresse à la Cour supérieure, arguant que Hilco et Martinez ont fait de l’ingérence délictuelle en cachant l’intérêt de Hilco dans le processus d’achat.
Au départ, Kugler Kandestin avise son client qu’il peut le représenter dans ce litige, les rassurant en lui disant que Corporate Assets n’avait pas de cause. Double erreur : le juge a obligé le cabinet à comparaître, et donc il ne pouvait représenter Hilco, et Corporate Assets a gagné sa cause… et, au final, après des années et des années de litige, les 11 529 290 $ de profits et intérêts.
Aujourd’hui, Hilco se tourne donc vers la Cour supérieure pour condamner Kugler Kandestin à lui verser les profits de la vente perdue avec intérêts, soit 12 922 358,51 $CAN, et les 198 470,08 $ en frais juridiques payés aux avocats du cabinet.