Quand puis-je tomber enceinte ?

Pierre Arcand
2012-04-23 08:30:00
Bonjour,
En cabinet privé, de taille nationale, à partir de combien d'année de pratique est-il réaliste de tomber enceinte sans que cela soit mal perçu ou que cela puisse nuire à notre avancement professionnel?
Est-ce plus facile de quitter à un jeune âge (25-26) après 2 ans de pratique ou est-il préférable d'attendre plus tard ? Par rapport à ce que je vois de mon entourage, les avocates attendent souvent d'avoir fait 5 ans de pratique et tombent enceinte vers 28-29-30 ans.
Réponse
Chère lectrice,
Dans un premier temps, j’aimerais mettre une chose au clair. Je ne crois pas que le fait de tomber enceinte soit encore aujourd’hui « mal perçu » dans les cabinets nationaux. D’un autre côté, ça ne veut pas dire que le fait de tomber enceinte ne nuise pas indirectement à votre avancement professionnel. Le fait de s’absenter de 9 à 12 mois pour ensuite revenir au travail en conciliant maternité et objectif d’heures facturables, implique inévitablement un ralentissement de l’avancement professionnel. Vous êtes, d’une certaine façon, en compétition avec les autres jeunes avocats du cabinet et ils prendront une certaine longueur d’avance lors de votre congé de maternité. Ce sera d’autant plus difficile de les rattraper à votre retour, considérant vos disponibilités et votre flexibilité réduites.

Peut-être serez-vous nommée associée deux ou trois années après vos collègues, si c’est là votre souhait. Peut-être quitterez-vous la pratique privée au bénéfice d’une entreprise ou de la fonction publique. Dites-vous que vous aurez quand même l’opportunité d’avoir une belle carrière de juriste, tant en pratique privée qu’en entreprise, à partir du moment ou vous arrêterez de vous comparer à celui ou celle qui, à tord ou à raison, aura mis tous ces œufs dans le même panier.
C’est évident que vous avez intérêt à minimiser le plus possible l’impact de votre choix et, sans vouloir avoir le beurre et l’argent du beurre, à tout le moins vendre votre beurre le plus cher possible.
Est-ce que c’est mieux d’attendre d’avoir 5 ans de pratique au compteur ? J’aurais tendance à croire que oui, bien que chaque cas soit différent. Ces 5 années vous auront permis d’investir pleinement dans votre perfectionnement en plus de faire vos preuves au sein du cabinet. Vos collaborateurs auront eu l’occasion de constater votre valeur et il y a de plus fortes chances qu’ils vous confient des dossiers de qualité à votre retour, ce qui vous permettra de réintégrer la pratique plus facilement.
Si à votre retour vous désirez quitter la pratique privée afin de mieux concilier travail et famille, vous constaterez qu’il y a beaucoup plus d’ouvertures en entreprise pour des candidats ayant 5 années d’expérience que pour ceux ayant seulement 2 années. Sans que ce soit un travail "pépère" confiné au 9 à 5, il sera habituellement plus facile de gérer les urgences lorsqu’on a un seul client, à savoir l’entreprise pour laquelle vous travaillez.
Je terminerai en vous mentionnant que la majorité, sinon la totalité de mes amies de la fac de droit, qui ont maintenant 15 années de pratique, sont des mères merveilleuses et des juristes de grande qualité. Plusieurs occupent des postes importants tant en pratique privée qu’en entreprise ou dans la fonction publique. Certaines sont associées dans des cabinets nationaux, d’autres sont vice-présidentes ou directrices des affaires juridiques. Elles ont eu à faire des sacrifices et en font encore aujourd’hui, mais elles réussissent dans leurs rôles de mère et d’avocate.
Elles se sont peut-être toutes senties coupables à un moment donné en pensant qu’elles n’étaient pas assez présentes pour leur enfant ou pas assez disponibles pour leur employeur. Je crois que ce sentiment est erroné, mais mon expérience me dit qu’il est difficilement évitable. Ce que vous devez retenir, c’est qu’il est possible de se réaliser en tant que mère et avocate (en tant que père et avocat également), mais cela requiert un peu d'organisation. Il faut aussi être réaliste face à son cheminement professionnel et adapter ses attentes en fonction des choix que l'on fait.
J’espère que mes commentaires vous seront utiles et je vous souhaite une belle semaine.
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Sur l'auteur
Pierre Arcand s'est spécialisé en recrutement juridique après avoir pratiqué le droit pendant une douzaine d'années. Ayant été associé au sein de cabinets boutiques ainsi que d'un important cabinet de Montréal, il connaît bien la communauté juridique et les enjeux reliés à la pratique du droit tant en cabinet qu'en entreprise. Arcand et Associés, une entreprise spécialisée dans le recrutement de cadres et de professionnels, a été fondée en 1999. Pierre Arcand et son équipe apporte un soutien professionnel tant aux entreprises qu'aux cabinets qui cherchent à recruter les meilleurs candidats disponibles.