Du Viêt-Nam au Québec
Céline Gobert
2012-02-29 15:00:00
Aujourd’hui, à 39 ans, elle possède son propre cabinet où 70 à 80 % de sa pratique concernent des litiges : obligations, vice caché, problèmes contractuels, de production, de franchise ou encore dossiers en arbitrage.
Le reste est consacré à tout ce qui touche à l’immigration, beaucoup de demandes de dossiers pour des permis de travail notamment.
35 heures de travail en moyenne, hors procès, 4 semaines de vacances, 185 $ de l’heure, et un salaire annuel qui varie entre 100 000 et 150 000 $...
Que de chemin parcouru pour la petite fille qu’elle était !
Toute sa scolarité se déroule ainsi dans la province québécoise, jusqu’à l’Université en droit d’Ottawa, et, le Barreau en 1997.
7 ans plus tard, elle se lance en solo en ayant toutefois acquis une grande expérience de travail.
« Si j’avais un conseil à donner, ce serait celui-là, dit-elle, il faut prendre de l’expérience avant de se lancer. Car ce qu’on apprend à l’école c’est bien, mais l’expérience de travail est essentielle »
Quelques années dans une firme-boutique, Mitchell Gattuso, au centre de Montréal la préparent efficacement au poste de Conseillère Juridique en entreprise qu’elle occupera ensuite un an chez Gescostar, groupe qui propose des solutions forestières globales ainsi que des services intégrés.
« Cela m’a bien formée car on faisait énormément de civil, et donc j’étais amenée à apprendre beaucoup sur différents secteurs, et ce indépendamment des besoins du client. »
En droit du travail, elle travaille avec des clients internes, et, en gestion de risque, elle fait affaire avec des cabinets externes, s’occupe des fusions et acquisitions avec des compagnies américaines ou russes.
Des expériences variées qui lui apprennent alors non pas seulement la pratique, mais également le côté relation client, primordial au regard des « stratégies de développement de clientèle » qui lui faudra par la suite établir.
Au milieu, elle trouve le temps de donner naissance à deux enfants, et, c’est là que l’idée de se lancer en solo se fait de plus en plus persistante.
« Les enfants étaient jeunes, ça prenait beaucoup de temps, ça demandait de la flexibilité. Même si mon employeur était assez compréhensif, il y a toujours quand même une certaine pression : pression des heures facturables, pression d’horaires, de clients. Je me suis dit que cela serait peut-être mieux pour moi d’être à mon compte et de gérer mon horaire »
Mais il fallait bien tout calculer : car il y avait la liberté d’un coté, certes, mais un vrai risque de l’autre.
Rien qui n’ait fait peur en tout cas à cette femme déterminée, qui ne voulait plus rendre de compte à un supérieur : « je suis quelqu’un qui a besoin de beaucoup de liberté », confie-t-elle.
Go !
En 2004, elle se jette à l’eau : autodidacte, elle apprend dans les livres.
A l’aide du Barreau, d’un bon cercle de connaissances, et de son implication au sein d’associations d’affaires locales, sa clientèle grandit.
« La première année, tout s’est très bien passé », dit-elle, ravie. C’est à la seconde, qu’elle se voit confrontée à une certaine stagnation.
« Ce fut mon plus grand challenge : il fallait prendre des décisions pour développer la clientèle, cibler, quel type de clientèle, quelle activité ? Cela été un vrai apprentissage », explique-t-elle.
Les associations qualitatives qu’elle fréquente l’aident beaucoup.
« Ce sont des organisations structurées pour cela, tout le monde est là dans ce but, on tisse des liens, on fait des activités. Nous aussi nous sommes des sources de références pour les autres. J’y ai appris à pro active, à comprendre que nous avons tous un potentiel insoupçonné »
Huit ans plus tard, et même s’il y a encore des hauts et des bas, Me Au est pleinement satisfaite.
Elle, qui déclare « travailler pour vivre, et non pas vivre pour travailler », trouve dans la pratique en litige une source « d’adrénaline » qui lui est indispensable.
« Je ne suis jamais en pilote automatique ! Dans ma pratique, je côtoie des personnes très différentes, je gère les confrontations. Il faut avoir la personnalité pour », confie-t-elle.
D’autant plus qu’être une femme ajoute de la difficulté à toute l’entreprise.
Selon elle, dans le secteur des affaires, et pour tout ce qui concerne le développement de clientèle, il faut travailler plus fort pour convaincre, faire valoir ses compétences, asseoir sa crédibilité.
« La pente est plus haute que pour un homme », confie-t-elle.
Pente qu’elle a su gravir, et ce depuis ce fameux jour de novembre 1979.